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Politique - Enquête sur l'explosion du port

Diab refuse d'être interrogé par le juge Sawan qui fixe une nouvelle audience pour vendredi

"Je n'exécuterai pas l'ordre du juge Sawan" s'il demande l'arrestation de Diab, affirme pour sa part le ministre sortant de l'Intérieur.

Diab refuse d'être interrogé par le juge Sawan qui fixe une nouvelle audience pour vendredi

Le Premier ministre démissionnaire libanais, Hassane Diab. Photo d'archives AFP / DALATI ET NOHRA

Le Premier ministre démissionnaire libanais, Hassane Diab, a refusé lundi d'être interrogé par le procureur général près la Cour de Justice, le juge Fadi Sawan, en charge de l'enquête sur l'explosion meurtrière du 4 août au port de Beyrouth, l'affaire ayant pris une tournure politique et confessionnelle depuis l'inculpation de M. Diab et de trois ex-ministres, la semaine dernière.

Une source officielle anonyme a confirmé lundi à l'agence Reuters que M. Diab "a refusé d'être interrogé" par Fadi Sawan. "Le juge a contacté le bureau de Hassane Diab la semaine dernière, demandant un rendez-vous pour lundi, mais il lui a été dit que M. Diab refuserait d'être questionné", a indiqué la source, qui fait partie du bureau du Premier ministre démissionnaire.

"Homme d'institutions"

Depuis hier, Hassane Diab n’est en effet plus au Sérail. Il a regagné son appartement pour ne pas avoir à accueillir au siège de la présidence du Conseil Fadi Sawan. Les anciens ministre des Finances Ali Hassan Khalil et des Travaux publics Youssef Fenianos et Ghazi Zeaïter, qui ont également été inculpés par le juge Sawan, ont eux aussi refusé d'être questionnés aujourd'hui. Selon la chaîne LBCI et le quotidien Daily Star, le juge Sawan a fixé une nouvelle audience pour vendredi à 9h afin d'entendre M. Diab. Les ex-ministres inculpés doivent pour leur part être entendus mercredi, jeudi et vendredi.

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Dans des propos accordés à la chaîne LBCI, un responsable du bureau de presse de la présidence du Conseil a affirmé que Hassane Diab s'en tient toujours au communiqué publié la semaine dernière et dans lequel il affirme "être un homme d'institutions qui respecte la Constitution qui a été violée par le juge Sawan". M. Diab "a dit ce qu'il avait à dire au sujet de l'explosion du port. Point", conclut le bureau de la présidence du Conseil. "Jusqu'à présent, je n'ai pas été informé des causes derrière ma convocation", a pour sa part affirmé Ghazi Zeaïter à la LBCI.

Le mouvement Amal a pour sa part accusé la décision du juge Fadi Sawan d'être anticonstitutionnelle. "La décision du procureur général est incompatible avec les règles constitutionnelles et juridiques", a estimé le bureau politique d'Amal dans un texte publié à l'issue de sa réunion hebdomadaire. "Ce qui s'est réellement passé, c'est que les articles 40 (relatif à l'immunité parlementaire, ndlr) et 70 (relatif à la mise en accusation du président du Conseil, ndlr) de la Constitution ont été contournés sans aucune justification. Cela soulève des interrogations sur le déroulement de l'enquête et ses procédures, ce qui retarde le dévoilement de la vérité et la justice pour les martyrs", a-t-il ajouté. Le parti a aussi affirmé son attachement à "tenir l'enquête loin de toute politisation, à déterminer les responsabilités juridiques et à prendre des mesures contre les coupables.

Dans ce contexte, le procureur général près la Cour de cassation, le juge Ghassan Oueidate, s'est retiré lundi du dossier de l'enquête, du fait de son lien familial avec le député Zeaïter, son beau-frère. Conformément à la loi, la prérogative de la poursuite de l'enquête en ce qui concerne le rôle du parquet de la Cour de cassation revient à l'avocat général près la Cour de cassation, le juge Ghassan el-Khoury.

Les 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium qui ont explosé le 4 août se trouvaient dans le hangar 12 du port de Beyrouth depuis 2014. Elles étaient stockées selon les autorités sans mesures de précaution. Plusieurs avertissements avaient été lancés à ce propos au cours des dernières années jusqu'en juillet, sans qu'aucune disposition ne soit prise pour évacuer de manière sécurisée ces matières. Jeudi, plus de quatre mois après la double explosion qui a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés, les premières inculpations de responsables politiques ont été annoncées dans l'enquête du procureur général près la Cour de Justice. Sont visés le Premier ministre sortant, Hassane Diab, et les anciens ministres Ali Hassan Khalil, Youssef Fenianos et Ghazi Zeaïter.

Depuis, les critiques se multiplient à l'encontre du juge Sawan et le dossier a pris une tournure politique et confessionnelle. Ainsi, les anciens Premiers ministres Saad Hariri, Tammam Salam, Fouad Siniora, Nagib Mikati et le mufti de la République, Abdellatif Deriane, ont dénoncé une atteinte à la présidence du Conseil, un poste réservé à la communauté sunnite en vertu du Pacte national de 1943. Certains accusent même la présidence de la République d'avoir poussé la justice à cibler certains personnalités et pas d'autres. Des accusations démenties par le palais de Baabda samedi.

Fahmi solidaire de Diab

Prenant la défense de Hassane Diab, le ministre sortant de l'Intérieur, Mohammad Fahmi, lui aussi de confession sunnite comme le chef du gouvernement démissionnaire, a dit qu'il refuserait d'ordonner l'arrestation de M. Diab si un mandat en ce sens était délivré par le juge Sawan. Devenu coutumier des polémiques et des déclarations fracassantes, le ministre sortant de l'Intérieur a souligné sa position à ce sujet dans un entretien accordé au quotidien local Al-Joumhouria.

L'édito de Issa GORAIEB

Premiers pas

"L'inculpation de Hassane Diab dans le crime de l'explosion du port est une injustice et de la diffamation car il ne faut pas faire assumer au Premier ministre le poids des suites d'un dossier complexe qui remonte à sept ans, alors que le chef du gouvernement n'est au Sérail que depuis plusieurs mois", a estimé le ministre sortant de l'Intérieur.

M. Fahmi a ensuite affirmé que la décision du juge Sawan était "partiale". "Cela renforce le bien-fondé de ma prise de position qui n'a pas plu à certains", a-t-il estimé, en référence à ses récents propos selon lesquels "95% des juges sont corrompus" au Liban. Des propos qui avaient provoqué un tollé et qui lui avaient valu d'être entendu par la justice.

Interrogé par le quotidien sur sa position si le juge Sawan venait à émettre des mandats d'arrêt contre le Premier ministre sortant et les trois anciens ministres inculpés, et en réponse à une question sur le fait de savoir s'il ordonnerait aux forces de l'ordre de mettre à exécution de tels mandats, Mohammad Fahmi a répondu : "Excusez-moi... mais je n'exécuterai pas cet ordre". "Évidemment que je ne demanderai pas aux services de sécurité d'exécuter un tel ordre de justice. Qu'on (la justice) me poursuive si l'on veut. Ce qui compte, c'est que j'agisse en fonction de ma conscience", a ajouté le ministre sortant.

"Une femme qui a perdu sa virginité"

Pour sa part, l'ancien ministre des Affaires sociales, l'avocat Rachid Derbas, a estimé que "les poursuites judiciaires qui perdent leur caractère secret sont comme une femme qui a perdu sa virginité". Les commentaires sexistes de l'ex-ministre ont été tenus dimanche soir lors de l'émission "W Halla' Chou", diffusée sur la chaîne Al-Jadeed. Le site Megaphone News a dénoncé lundi l'absence de réaction de la part de l'animateur de l'émission, le journaliste Georges Salibi.

Sur le terrain, un groupe de manifestants a organisé un sit-in devant le palais de Justice de Beyrouth afin d'exprimer son soutien au juge Sawan.

Le Premier ministre démissionnaire libanais, Hassane Diab, a refusé lundi d'être interrogé par le procureur général près la Cour de Justice, le juge Fadi Sawan, en charge de l'enquête sur l'explosion meurtrière du 4 août au port de Beyrouth, l'affaire ayant pris une tournure politique et confessionnelle depuis l'inculpation de M. Diab et de trois ex-ministres, la semaine...

commentaires (12)

Nul n'est au-dessus des lois, y compris M. Diab, ni tout autre officiel. Son immunité, s'il en avait une, ne l'excuse pas de répondre à la convocation d'un juge dans le cadre d'une enquête judiciaire.

Tony BASSILA

17 h 47, le 15 décembre 2020

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Commentaires (12)

  • Nul n'est au-dessus des lois, y compris M. Diab, ni tout autre officiel. Son immunité, s'il en avait une, ne l'excuse pas de répondre à la convocation d'un juge dans le cadre d'une enquête judiciaire.

    Tony BASSILA

    17 h 47, le 15 décembre 2020

  • Une enquête international et basta , n'est-ce pas mr. Hassouna?

    Eleni Caridopoulou

    17 h 40, le 15 décembre 2020

  • Diab n’a pas à accepter ou refuser de se présenter. Il est convoqué par un juge, il doit s’exécuter et répondre à ses questions point. Si à chaque occasion que la justice se manifeste pour mettre de l’ordre dans ce bordel tout le monde crie au complot, même qui hier réclamaient justice on n’est pas sorti de l’auberge. Zou, il doit s’exécuter et respecter les lois de ce pays sinon une perquisition et un mandat d’arrêt devrait suivre. C’est comme ça qu’un pays démocratique fonctionne. Nul est au dessus de la loi et chacun doit assumer ses responsabilités, n’est ce pas pour être au service du pays qu’ils sont payés par les contribuables?

    Sissi zayyat

    11 h 40, le 15 décembre 2020

  • SI LE JUGE POURRAIT NOUS EXPLIQUER POURQUOI IL NE POURSUIT PAS L,IMPORTATEUR ET LE PROPRIETAIRE DU NITRATE POURTANT BIEN CONNU ET N,EN A JAMAIS FAIT MENTION JUSQU,AUJOURD,HUI. ET POURQUOI DIAB ET HASSAN KHALIL ET PAS LA TETE DE L,ECHELLE ?

    MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

    21 h 48, le 14 décembre 2020

  • "... les poursuites judiciaires qui perdent leur caractère secret sont comme une femme qui a perdu sa virginité". P.... quelle puissante métaphore! Mais bon sang que viennent faire les femmes dans cette histoire et en quoi leur virginité (pour lui certainement une question de bonnes moeurs) concerne-t-elle cet ex ministre moyenâgeux? Plutôt lamentable pour un diplômé en droit de 79 ans!

    Paul-René Safa

    19 h 04, le 14 décembre 2020

  • Monsieur Diab, vous n'êtes nullement homme d'institutions. Vous prétendez être ce que vous êtes le contraire.

    Esber

    18 h 21, le 14 décembre 2020

  • C'est habile de refuser de répondre pour éviter de commettre un parjure, au cas où le juge lui pose une question comme par exemple, s'il avait discuté de ce problème avec quelqu'un avant ou après le transfère du dossier aux ministres en charge. Ne pas se faire accuser ainsi que le droit au silence font partis des lois démocratiques élémentaires et de ceux des droits de l'homme, qu'il convient de faire avec. A sa place, j'aurais reçu gentiment le juge et écouté les questions sans apporter la moindre réponse, ou bien prendre note des questions et prétendre qu'il va voir ce qu'il va faire avec, après consultation de ses avocats. Le juge, peut/devrait aussi envoyer ses questions par écrit au PM sortant pour inscrire son action dans l'Histoire (avec grand H). M. Diab est un homme intelligent ! et le juge exécute bien son devoir avec courage. Je trouve que les deux personnalités ont raison !

    Shou fi

    16 h 22, le 14 décembre 2020

  • Adieu loi au Liban. Dans un pays tribal confessionnel la justice ne pourra jamais survivre .

    Antoine Sabbagha

    15 h 54, le 14 décembre 2020

  • S’il ne veut pas faire appliquer la loi, il doit démissionner (oups, c’est déjà fait...). C’est ça le problème avec les ministres libanais. Ils s’imaginent qu’ils sont là pour donner leur avis, alors qu’ils ne sont là que pour servir le peuple...

    Gros Gnon

    14 h 00, le 14 décembre 2020

  • LE BIZARRE DANS TOUTE CETTE AFFAIRE C,EST QU,ON POURSUIT UN P.M. A PEINE NOMME IL Y A QUELQUES MOIS ET UN MINISTRE DES FINANCES ET ON IGNORE L,IMPORTATEUR ET LE PROPRIETAIRE BIEN CONNUS DE CE NITRATE DU MALHEUR. ET ON VEUT NOUS CONVAINCRE QU,IL Y A UNE JUSTICE DANS CE GRAND BORDEL QU,EST DEVENU LE PAYS GRACE AUX MAFIEUX QUI LE GOUVERNENT EN FAIT DE LA PLUS GRANDE TETE AU PLUS PETIT DE L,ECHELLE DES MAFIEUX.

    MON CLAIR MOT A GEAGEA CENSURE

    13 h 49, le 14 décembre 2020

  • Même sous mandat du pays le plus pauvre de la planète le pays serait mieux géré.

    AntoineK

    13 h 33, le 14 décembre 2020

  • C’est à nouveau la preuve, que c’est une république bananière.

    Elias

    12 h 47, le 14 décembre 2020

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