Mardi, la Banque mondiale (BM) dénonçait, dans un rapport, l’irresponsabilité « délibérée » des dirigeants libanais qui ont systématiquement échoué à prendre (ou évité de le faire) les décisions critiques imposées par la crise qui perdure depuis plus d’un an. Moins de 24 heures plus tard, les intéressés ont confirmé le diagnostic de l’organisation internationale en se renvoyant tous la patate chaude concernant l’épineux dossier des subventions sur certaines importations. Mis en place par une série de circulaires de la Banque du Liban (BDL) adoptées dès octobre 2019, ces mécanismes, financés à partir de ses réserves de devises qui sont en principe presque à sec, permettent aux importateurs de plusieurs produits « stratégiques » et de « première nécessité » d’acheter des dollars à la BDL à un taux inférieur de celui du marché. Ils ont été présentés comme un moyen de limiter la hausse des prix sur ces produits en plein contexte de crise marquée par une dévaluation de la livre face au dollar (environ 8 000 livres pour un dollar ces derniers jours). Ils bénéficient aux importateurs de carburant, de blé, de médicaments, d’équipements médicaux, de matières premières destinées à l’industrie pharmaceutique et d’un panier d’environ 200 biens de consommation.
Absence de Riad Salamé
Le sujet devait initialement faire l’objet d’une réunion du conseil central de la BDL programmée hier mais qui a finalement été reportée à aujourd’hui. Dans un entretien diffusé mardi soir par la chaîne saoudienne al-Hadath, le gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, a justifié ce report en affirmant attendre le résultat de la réunion des commissions parlementaires mixtes – Finances et Budget, Administration et Justice, Économie et Planification, Santé et Travail et Affaires sociales – prévue hier et consacrée au dossier. Les décisions de ces commissions n’engagent pas le Parlement, même si ce dernier se base généralement sur leurs travaux au moment de voter les textes qui lui sont soumis.
Or si ces commissions se sont bien réunies hier en présence des ministres concernés, ainsi que de représentants de la BDL et de l’Association des banques du Liban (ABL), leurs membres ont annoncé qu’ils prendraient finalement une décision sur la base d’une « étude » que le gouvernement et la BDL devaient leur transmettre, avec une liste d’alternatives envisageables aux subventions.
À noter que le gouvernement de Hassane Diab n’avait pas mentionné les subventions dans son plan de redressement économique voté le 20 avril et présenté au Fonds monétaire international en mai.
Plusieurs députés ont pointé du doigt l’absence du gouverneur de la BDL, qui était pourtant attendu. Le député chiite indépendant Jamil el-Sayyed a considéré cette absence comme « une insulte au Parlement » et a accusé l’intéressé de faire partie d’un système de « corruption et de pillage ».
Le député Ali Fayad, affilié au Hezbollah, a également relevé cette absence et ajouté que certains députés avaient émis des réserves concernant la « transparence » des chiffres communiqués pendant la réunion par les représentants de la BDL – parmi lesquels figurait notamment le second vice-gouverneur, Salim Chahine.
Enfin, du côté de l’exécutif, seul le ministère de l’Économie et du Commerce a pour l’instant réellement planché sur le dossier en tentant, avec la contribution de la BM, de définir de nouvelles modalités d’octroi de ces subventions afin qu’elles ciblent plus efficacement les Libanais qui en ont le plus besoin. Les contours de ce nouveau mécanisme n’ont toujours pas été rendus publics, tandis qu’une source au ministère a répété à plusieurs reprises que rien ne pouvait être mis en place avant la formation d’un nouveau gouvernement – celui de Hassane Diab ayant démissionné en août, dans le sillage de la double explosion meurtrière qui a ravagé Beyrouth et son port.
Mardi, Riad Salamé avait, lui, indiqué que les réserves de la BDL suffiraient encore à subventionner les importations pendant deux mois. Les chiffres exacts sur le niveau des réserves sont inconnus mais des sources « officielles », citées par Reuters la semaine dernière, faisaient état de « 17,9 milliards de dollars », dont « 800 millions de dollars » pouvant encore servir à financer les subventions, le reste étant constitué par les réserves obligatoires que la BDL ne peut en principe pas utiliser. La même source avait également révélé que le gouverneur envisageait d’abaisser ce ratio imposé aux banques pour pouvoir maintenir les mécanismes de subventions plus longtemps. Les réserves de devises pouvant servir à financer les subventions n’incluent par l’or détenu par la BDL.
Le système des subventions a été mis en place pour aider la population à contrer l’inflation qui ne cesse d’augmenter depuis le début de la crise, il y a plus d’un an, et dont le taux a atteint 136,8 % en octobre en glissement annuel, réduisant considérablement le pouvoir d’achat des Libanais.
Audit des institutions publiques : Wazni appelle Diab à faire pression
Le ministre sortant des Finances, Ghazi Wazni, a demandé hier au chef du gouvernement démissionnaire, Hassane Diab, d’inviter toutes les institutions publiques, les municipalités, ou encore les administrations ayant des budgets autonomes à accepter de faire contrôler, dans le cadre d’un audit juricomptable, les comptes qu’elles détiennent à la Banque du Liban et qui seraient protégés par le secret bancaire.
Cette demande a été consignée dans un courrier adressé au Premier ministre sortant cinq jours après que le Parlement se fut prononcé à l’unanimité en faveur du lancement d’un tel audit « sans entrave ni invocation du secret bancaire ». Mardi, le ministre des Finances avait adressé une première lettre au gouverneur de la BDL, Riad Salamé, lui demandant de se conformer au vote des députés.
L’audit de la BDL et plus précisément son volet juricomptable ont été érigés au rang de condition préalable au déblocage de toute aide financière pour redresser le pays, en crise. Le 26 novembre dernier, le cabinet américain Alvarez & Marsal, en charge de l’audit juricomptable de la BDL, a résilié son contrat avec l’État, moins de trois mois après l’avoir signé. Le cabinet avait alors invoqué sa conviction qu’il ne parviendrait pas à obtenir les documents demandés à la BDL sans lesquels il ne serait pas à même d’effecteur sa mission. La BDL et le ministère des Finances se sont toujours réfugiés derrière la loi libanaise sur le secret bancaire pour justifier leur refus de transmettre certains les documents. Un argument catégoriquement rejeté comme non valable par d’autres voix, parmi lesquelles celle de ma ministre sortante de la Justice, Marie-Claude Najm.
Les réserves que la BDL ne peut pas utiliser? Croyez le si ne serait ce qu’une somme en monnaie de singe existait réellement il l’aurait annoncé sur tous les toits avec les trompettes qui vont avec en mentionnant le montant exact. Il n’y a plus rien dans les comptes et encore moins en réserve d’où leur mutisme sur la valeur des réserves et l’endroit de leur dépôt. Ils ont tout dilapidé et nous font croire qu’il existe encore une issue et de l’argent auquel il ne peuvent pas toucher qui est cependant censé servir en cas de crise majeure. Ils nous prennent pour des bobets et se réjouissent de notre inaptitude à défendre nos droits en nous servant des excuses bidons pour nous endormir. ET ON CONTINUE À LES LAISSER FAIRE.
11 h 39, le 03 décembre 2020