La tension monte, dans la Békaa, depuis que l’homme d’affaires Adnane Dabaja s’est fait kidnapper par des inconnus armés le 17 novembre. Malgré les nombreux appels de ses proches et de parties politiques en faveur de sa libération, il était toujours hier aux mains de ses ravisseurs. Les sit-in à Dahr el-Baïdar, principal axe reliant le Mont-Liban à la Békaa, sont récurrents, mais, aujourd’hui samedi, les manifestants, appuyés par le courant du Futur, comptent carrément bloquer la route à cet endroit afin d’exprimer leur mécontentement.
Cette information a été confirmée à L’Orient-Le Jour par Saïd Yassine, coordinateur du courant du Futur dans la Békaa centrale. Celui-ci affirme également que « la partie responsable de l’enlèvement est bien connue », sans toutefois la nommer, et que « les ravisseurs ont demandé une rançon de 3 millions de dollars pour libérer Dabaja ».
Ce n’est pas la première fois que l’homme d’affaires de 58 ans, longtemps émigré en Amérique latine et installé au Liban depuis une dizaine d’années, se fait enlever dans la Békaa. En 2016 déjà, il avait été kidnappé avec son frère Khalil. Et il y a onze jours, les deux hommes étaient tombés dans un guet-apens, près du site du projet touristique que Adnane Dabaja était supposé construire entre Kefraya et Jeb Jennine, dans la Békaa-Ouest. « Plusieurs hommes armés dans des véhicules nous avaient barré la route, raconte Khalil Dabaja à L’OLJ. L’un d’eux m’a menacé de son kalachnikov, me jetant à terre et m’enjoignant de ne plus bouger. »
Si Khalil Dabaja ne donne aucune indication sur l’endroit où son frère aurait été emmené, d’autres sources de la Békaa estiment que les ravisseurs sont probablement partis vers la région de Baalbeck-Hermel. « Ce jour-là, je suis rentré en larmes chez moi, raconte Khalil Dabaja, amer. J’ai regretté d’avoir encouragé ma famille à rentrer dans un pays où l’on enlève les gens et où on saisit leur argent dans les banques après 27 ans de dur labeur. » Il pense que les mobiles de l’enlèvement sont purement matériels, estimant que rien ne permet d’affirmer jusque-là qu’il s’agit de la même partie qui avait enlevé son frère la première fois. « Nous sommes en contact permanent avec les forces de l’ordre et les parties officielles compétentes, ajoute-t-il. Mais l’affaire n’est pas traitée avec le sérieux nécessaire, sinon mon frère aurait déjà été libéré. »
Craintes d’une tournure confessionnelle
L’affaire bouleverse profondément la société dans la Békaa. Les imams des mosquées sunnites, durant la prière du vendredi, ont tous mis en garde contre les conséquences de cet enlèvement. Durant les sit-in, les manifestants, filmés par la télévision, ont clairement demandé aux trois présidents, notamment au président du Parlement Nabih Berry, d’intervenir dans « une région où il a son mot à dire ». La victime étant sunnite et M. Berry un leader chiite, l’allusion est claire. Et nombreux sont ceux qui craignent, d’ores et déjà, que cette affaire n’embrase un front sunnito-chiite.
De leur côté, les habitants de Qaraoun ont haussé le ton dans un communiqué publié hier : « Nous ne nous tairons pas jusqu’à ce que (Dabaja) soit libéré des mains de ces bandes de malfaiteurs, ont-ils affirmé. Cette affaire prouve que la situation sécuritaire s’est tellement dégradée qu’il faut désormais être vigilants et responsables, et appliquer à la lettre les directives des forces de l’ordre. »
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Et le Prestige de l’Etat ? Au fait le Prestige de l’Etat concerne surtout les contrevenants à la circulation alternée. Dans ce domaine on ne rigole pas, sous peine de se faire tabasser séance tenante par des dépositaires de l’ordre public
Lecteur excédé par la censure
10 h 05, le 28 novembre 2020