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Société - Rentrée scolaire

Risque d’« écoles fantômes » aujourd’hui face aux nouvelles mesures de bouclage

Au premier jour du retour en classe des élèves de troisième, première et terminale, le ministère de l’Intérieur décrète le confinement de 169 localités. Une mesure qui plonge le secteur éducatif dans l’incertitude.

Risque d’« écoles fantômes » aujourd’hui face aux nouvelles mesures de bouclage

Une rentrée scolaire très incertaine. Photo d’archives Hassan Assal

La rentrée scolaire des classes de troisième, première et terminale promet d’être particulière aujourd’hui, au lendemain de l’annonce du bouclage de 169 localités par le ministère de l’Intérieur, pour une semaine entière, pour cause d’explosions du nombre de contaminations du Covid-19. Particulière, parce que les établissements scolaires qui se trouvent dans les zones confinées seront fermés. Et parce que ceux situées dans les régions non bouclées verront un taux record d’absentéisme, sans aucun doute. Ni les élèves, ni les instituteurs, ni les directeurs, habitant les localités concernées par la mesure du ministère de l’Intérieur n’auront l’autorisation de sortir de chez eux, même pour se rendre à l’école située dans une localité voisine, non confinée elle. La situation fait jaser. Les réseaux sociaux se sont emparés de ce qu’ils considèrent être un bras de fer entre le ministre de l’Intérieur Mohammad Fahmi et le ministre de l’Éducation Tarek Majzoub. Deux ministères mal guidés par un ministère de la Santé qui multiplierait les recommandations de manière discrétionnaire et politique, accusent certains. On se demande à ce titre pourquoi la capitale est exemptée de confinement, alors qu’elle est aussi atteinte, sinon plus, que les 169 localités. On se demande aussi, à titre d’exemple, pourquoi dans le Metn, Broummana, où la vie nocturne bat son plein, est le seul village de cette région à ne pas être confiné.

Dans le public, la moitié des effectifs au maximum

Mais, au final, cette réalité plonge le domaine éducatif dans une incertitude qui ne fait que refléter l’absence de gouvernance et de vision de la classe au pouvoir. « Nous attendons toujours les instructions de la direction. Que vais-je faire de mon fils qui est en troisième ? Son école est située à Roumieh, zone bouclée dès ce lundi, alors que nous habitons Broummana, zone qui n’est pas concernée par le confinement », demande cette mère de famille. Une inquiétude d’autant plus forte qu’elle porte un regard critique sur l’enseignement en ligne. « À 14 ans, les jeunes se concentrent difficilement sur le travail devant leurs écrans. Ils préfèrent jouer ou chatter avec leurs amis », constate-t-elle. Pour consacrer cette incertitude, aucun chiffre n’est disponible quant au nombre d’élèves, d’enseignants ou de directeurs qui seront privés de première semaine d’école aujourd’hui pour cause de confinement. Notons que cette date du 12 octobre consacre le démarrage des cours du secteur public pour les trois classes citées plus haut, qui se fera en hybride (en présentiel pour une semaine, en ligne la semaine suivante), avec la moitié des effectifs au maximum. Quant au secteur privé, il a déjà fait sa rentrée à distance depuis le mois de septembre, et n’attendait plus que l’autorisation officielle pour ouvrir les classes, dans le respect des gestes barrières, compte tenu qu’en période de pandémie, les autorités ont formellement interdit aux écoles privées d’ouvrir leurs portes.

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Face aux critiques dénonçant les contradictions officielles, le ministère de l’Éducation a publié un communiqué hier, réfutant les accusations de non-coordination avec son homologue de l’Intérieur. « Celui qui lit attentivement les décisions des ministères de l’Intérieur et de l’Éducation réalisera qu’elles se retrouvent dans le sens d’une fermeture totale des écoles dans les zones bouclées, et d’une non-obligation pour les administrateurs scolaires et corps enseignant qui résident dans des zones bouclées de se rendre à leurs écoles situées dans des régions non confinées », a-t-il souligné. Le ministère de l’Éducation appelle par ailleurs tous les établissements scolaires « à se conformer aux décisions d’ouverture des classes de troisième, de première et de terminale uniquement, à assurer un enseignement hybride, et à ne pas dépasser la moitié de la capacité des classes en présentiel ». Une limite qui doit également être appliquée pour le transport scolaire. « Quant aux personnes à risque, elles ont le devoir d’en avertir le directeur de l’établissement par écrit, afin de ne pas mettre le secteur de la santé sous pression supplémentaire », poursuit le communiqué.

L’ouverture des écoles, un test

Selon une source informée, « l’ouverture des écoles fait figure de test ». La rentrée se fera donc de « manière progressive », en fonction de l’évolution de la pandémie. « Le choix s’est d’abord porté sur les élèves les plus âgés, les premières et terminales, plus ceux du brevet, une classe à examen officiel, parce qu’ils sont assez responsables pour appliquer les gestes barrières », ajoute cette source à L’Orient-Le Jour. Et si l’enseignement hybride est aujourd’hui privilégié, c’est parce que « l’enseignement en ligne a montré ses limites, plus particulièrement à l’école publique où élèves et enseignants souffrent d’un manque d’équipements adéquats, et n’ont pas toujours accès à l’internet ou même à une alimentation régulière en électricité ». Quant au bras de fer entre les deux ministères de l’Éducation et de l’Intérieur, la source informée ne commente pas, mais précise qu’ils se basent tous deux « sur les recommandations du ministère de la Santé ». « Le pays n’a plus les moyens de fermer. Il risque la faillite », avance-t-elle toutefois, rappelant qu’en France, les écoles ont ouvert leurs portes en présentiel avec 100 % de leurs effectifs. Et d’assurer qu’il n’est pas question de prendre des risques. « Les gestes barrières doivent être appliqués. Et les premiers jours de classe permettront d’en vérifier la bonne marche », soutient-elle.

À l’école privée, si on salue l’annonce même partielle de la rentrée scolaire, on regrette « la mesure contradictoire » adoptée soudain par le ministère de l’Intérieur sans la moindre explication, et sans la moindre concertation avec le secteur éducatif. « Les écoles privées sont mises devant le fait accompli. Elles n’ont même pas été consultées, alors qu’elles sont prêtes à accueillir les élèves dans le respect des mesures sanitaires recommandées par l’Organisation mondiale de la santé », dénonce à L’OLJ le père Boutros Azar, secrétaire général des écoles catholiques et coordonnateur de la Fédération des associations éducatives privées. Dans cette situation, « les écoles risquent d’être vides », aujourd’hui, regrette-t-il, mettant en garde contre « les risques élevés de déscolarisation, si les différents ministères concernés persistent à agir sans coordination entre eux ». Et ce qu’il trouve encore plus inadmissible, c’est « l’interdiction faite aux établissements scolaires privés d’accueillir les élèves en présentiel, avant la rentrée du public, sous peine de sanctions, ce qui est un précédent », alors que « les garderies, elles, peuvent exercer en toute liberté ». Rappelons qu’en temps normal, la rentrée scolaire dans les écoles privées du pays se déroule un mois environ avant celle du secteur public. « Arrêtez de vous jouer des écoles ! » lance le père Azar aux autorités, en référence à la série de mesures qui n’ont cessé d’enfoncer les établissements privés dans la crise, depuis l’adoption en août 2017 de la loi 46 sur la hausse des salaires des enseignants, jusqu’à la non-adoption par le Parlement la semaine dernière des 200 milliards de livres libanaises d’aides à la scolarité à l’intention des parents d’élèves.

La rentrée scolaire des classes de troisième, première et terminale promet d’être particulière aujourd’hui, au lendemain de l’annonce du bouclage de 169 localités par le ministère de l’Intérieur, pour une semaine entière, pour cause d’explosions du nombre de contaminations du Covid-19. Particulière, parce que les établissements scolaires qui se trouvent dans les zones...
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