Avec l’arrivée à Beyrouth du secrétaire d’État adjoint américain pour les questions du Proche-Orient David Schenker prévue le 12 octobre, le processus de négociation sur le tracé des frontières entre le Liban et Israël pourra réellement commencer. Depuis l’annonce officielle de la conclusion de l’accord-cadre pour ces négociations, faite par le président de la Chambre jeudi dernier, ce sujet n’en finit pas de faire couler de l’encre et les spéculations se multiplient dans les médias. Certains voient dans l’annonce de cet accord en ce timing précis le début des concessions du tandem chiite aux Américains, après la réussite de la politique de sanctions maximales. Cet accord-cadre serait donc le premier pas vers un accord entre les Israéliens et les Libanais sur le tracé des frontières maritimes et le prélude d’un accord de paix, suivi d’une normalisation des relations entre les deux parties, dans la foulée de certains États du Golfe. Ce qui, à terme, devrait mener vers la fin de l’existence des armes du Hezbollah, dont la principale justification réside dans le droit de résister contre les attaques israéliennes, consacré par la Constitution. Pour les partisans de cette thèse, le fait que Nabih Berry lui-même dans sa conférence de presse ait utilisé le mot Israël constitue de sa part et, à travers lui, de la part du Hezbollah une reconnaissance claire de l’État israélien. Pour les sources proches de Aïn el-Tiné, cette thèse n’a rien à voir avec la réalité des faits. En juillet déjà, le président de la Chambre avait déclaré que l’accord-cadre était pratiquement achevé et qu’il ne restait plus que d’ultimes détails à mettre au point. Mais, toujours selon les mêmes sources, ce sont les Américains qui s’étaient alors quelque peu rétractés, notamment lors de la dernière visite de David Schenker à Beyrouth début septembre lorsqu’il a rencontré un conseiller du chef du législatif. Les éléments qui devaient servir de point de départ aux négociations avaient été adoptés, mais il y avait encore quelques détails de forme à régler.
Le principe était donc désormais acquis et il ne restait plus qu’à annoncer l’accord-cadre. Le président de la Chambre a décidé de le faire jeudi dernier dans un timing précis qui a certainement des connotations politiques et diplomatiques, et qui comporte des messages aux Américains et aux autres. Par la voix de Nabih Berry, le Liban a donc voulu faire un petit geste à l’égard des États-Unis à la veille de l’élection, sans pour autant toucher aux principes qui dictent sa position, ni à ce qu’il considère être ses droits. De même, le timing de l’annonce a eu lieu après le recul de l’initiative française dans le but d’ouvrir des fenêtres d’espoir dans un quotidien assez morose.
Concernant l’utilisation du terme Israël par le président du Parlement lors de sa conférence de presse, il faut préciser qu’à ce moment-là, Nabih Berry était en train de lire un texte officiel qui sera déposé dans les archives des Nations unies. Et dans les textes officiels internationaux, il n’y a jamais des expressions du genre « entité israélienne » ou « ennemi sioniste ».
Donc, jusqu’à nouvel ordre, les sources proches de Aïn el-Tiné insistent sur le fait qu’il n’y a aucun changement dans la position officielle libanaise, ni dans celle du président de la Chambre. Les négociations devraient donc commencer la semaine prochaine conformément aux points figurant dans l’accord-cadre.
Il s’agit d’abord de négociations techniques, limitées au dossier des frontières maritimes et terrestres. Il ne s’agit donc pas de négociations politiques portant sur un éventuel accord de paix ou une normalisation des relations entre les deux parties. Le chef de l’État devrait superviser les développements, notamment avec la partie libanaise après le choix établi par le commandement de l’armée des officiers libanais qui devraient se charger de négocier indirectement avec les Israéliens. On parle du général Bassam Yassine, qui occupe actuellement le poste de chef d’état-major adjoint pour les opérations. Les négociations devraient se dérouler au siège principal de la Finul à Naqoura. Une salle devrait être équipée dans ce but. Les délégations libanaise et israélienne s’installeront à des tables séparées, et leurs échanges passeront par les représentants de la Finul et ceux de l’administration américaine. Les discussions se feront en anglais et chaque partie aura ses propres interprètes. Cela pour l’aspect technique.
Sur le plan des conditions, le Liban a obtenu, d’abord, de ne pas limiter les discussions dans le temps (le secrétaire d’État américain Mike Pompeo voulait fixer un délai maximal de six mois), ensuite qu’elles se tiennent au siège principal de la Finul à Naqoura, c’est-à-dire en terrain neutre, et qu’elles se fassent sous la houlette de l’ONU, mais avec la médiation des États-Unis (les Américains et les Israéliens voulaient qu’elles se fassent avec la seule médiation américaine, sans la Finul). Sur le plan de la concomitance des volets terrestre et maritime, l’accord-cadre reste plutôt ambigu. Il parle essentiellement de négociations sur le tracé des frontières maritimes. Mais dans sa conférence de presse, Nabih Berry a précisé ce point en déclarant que si la concomitance n’est pas respectée, le Liban n’appliquera aucun point qui n’a pas son aval, et celui-ci ne sera pas enregistré dans le texte final. Enfin, il a tenu à évoquer les arrangements d’avril dans le texte de l’accord-cadre parce qu’ils mentionnent le droit du Liban à se défendre suite à d’éventuelles agressions israéliennes pendant la période des négociations. Ce qui constitue un démenti de toutes les spéculations sur une fin proche des armes de la résistance.
Sur le fond, selon les sources proches de Aïn el-Tiné, le processus pourrait être long et tout dépendra de l’esprit dans lequel se feront les négociations. Selon ces mêmes sources, les négociations devraient essentiellement tourner autour d’une superficie de 860 km² entre les blocs 8 et 9 que se disputent les Libanais et les Israéliens. Tout a commencé à cause d’une confusion dans l’accord conclu avec le gouvernement chypriote en 2007 et en 2009, qui reste imprécis au sujet de cette bande, en se basant sur de vieilles cartes. Lorsqu’en 2010, le président de la Chambre avait repris ce dossier, il a réclamé que les frontières maritimes soient tracées en incluant les 860 km² dans les eaux territoriales libanaises. Les discussions ont duré près de dix ans et la meilleure proposition jusque-là avait été faite par l’émissaire américain Frederic Hoffe qui a proposé au Liban 500 km² des 860 km², pour donner le reste à Israël. Mais le Liban avait refusé. Dans une semaine, les négociations devraient commencer, et chaque partie avancera ses arguments... Il faut encore préciser que la conclusion d’un accord est importante pour les deux parties : les Israéliens voudraient commencer l’extraction des ressources dans un climat de non-belligérance, et le Liban, qui traverse la plus grave crise économique de son histoire moderne, attend la manne pétrolière et gazière.
Il n'a pas dit en arabe "Israël" mais plutôt "daoulat Israël". Je comprends l'embrassas de l'auteure, mais quand-même, il faut se souvenir qu'au moins 90% des lecteurs de l'OLJ lisent et entendent l'arabe. L'Etat d'Israël donc dans ledit discours, rappelle l'histoire rigolote d'Arafat à Paris, quand Roland Dumas lui a dit de rappeler devant la presse que la destruction d'Israël n'est plus dans la charte de l'OLP, et Arafat a eu un mal fou pour prononcer le mot "Caduc" cadouk, cadoque suggéré par Dumas. Ce matin l'aviation israélienne a violé la souveraineté de notre territoire et personne n'a protesté auprès de l'ONU. Il serait nécessaire que notre Gouvernement le fasse pour ne pas donner l'impression que cet agissement de l'ennemi est inclus dans l'accord-cadre.
16 h 47, le 07 octobre 2020