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Société - Législation

Dans les zones grandement sinistrées de Beyrouth, les transactions immobilières gelées pour deux ans

La loi de protection des régions sinistrées et de soutien à leur reconstruction suite à la double explosion au port a été adoptée mercredi à l’unanimité au Parlement.

Dans les zones grandement sinistrées de Beyrouth, les transactions immobilières gelées pour deux ans

Un trou béant en guise de façade dans le quartier traditionnel de Gemmayzé. Photo A.-M.H.

Deux mois après la double explosion qui a soufflé plusieurs quartiers de Beyrouth le 4 août dernier, faisant près de 200 morts, plus de 6 500 blessés et quelque 300 000 sans-abri, le Parlement libanais a adopté mercredi, à l’unanimité, « la loi de protection des régions sinistrées et de soutien à leur reconstruction suite à l’explosion au port ». Une loi qui gèle pour deux ans toute transaction immobilière dans les zones détruites du port, de Saïfi, de Medawar et de Rmeil, et qui entend protéger les demeures à caractère patrimonial, qui impose une reconduction automatique des loyers pour une année dans ces zones, dans le cadre de la protection des droits des locataires, qui débloque un fonds gouvernemental de 1 500 milliards de livres libanaises pour compenser les habitants et les institutions, et qui impose la création d’un comité spécial présidé par l’armée libanaise pour la bonne marche du processus d’assistance. Cette loi est le résultat d’une « excellente collaboration et sans friction aucune » entre le député des Forces libanaises Georges Okaïs et celui du Courant patriotique libre Nicolas Sehnaoui, comme le rapportent ces derniers à L’Orient-Le Jour, sans oublier la députée du courant du Futur Rola Tabch et l’ancien ministre de l’Économie Nicolas Nahas, connu pour sa technicité en matière financière.

À Gemmayzé, une maison à caractère patrimonial particulièrement ébranlée par la double explosion du port de Beyrouth. Photo A.-M.H.

Une collaboration FL-CPL en bonne entente

Le nouveau texte regroupe donc les propositions de lois présentées par les deux grandes composantes chrétiennes adverses, mais aussi les idées avancées à l’issue du drame par les différents courants politiques, pour éviter tout changement démographique, pour empêcher que quiconque n’abuse des sinistrés, pour encourager la reconstruction et la protection de l’héritage patrimonial de Beyrouth, mais aussi pour que les aides soient distribuées de manière équitable. « Cette loi nous tenait tous à cœur. Différentes parties politiques ont proposé des idées que nous avons rassemblées pour en faire une structure cohérente », explique à L’Orient-Le Jour le député Nicolas Nahas, proche de l’ancien Premier ministre Nagib Mikati. « Nous sommes donc partis de l’impératif de conserver la présence, le patrimoine et l’histoire des quartiers meurtris, de la nécessité aussi de redonner espoir à leurs habitants, en leur donnant les moyens de reconstruire », ajoute le député.

Pour mémoire

Gemmayzé lance un SOS pour la protection de ses demeures historiques dévastées

Président de la sous-commission parlementaire issue des commissions conjointes et chargée d’étudier la mouture finale, Georges Okaïs fait part de son soulagement car le texte est « bon et réaliste ». « C’est un puzzle que nous avons monté en un temps record, à l’unanimité et en bonne entente », précise-t-il. « Le législateur a d’abord unifié les pratiques exercées après le 4 août », autrement dit, il a « chargé une commission officielle, sous la responsabilité de l’armée libanaise, de créer une base de données ». Toutes « les institutions concernées par la remise en état des quartiers sinistrés y seront représentées », depuis les ministères et les municipalités jusqu’aux ordres professionnels concernés, barreau de Beyrouth, syndicat des ingénieurs, en passant par le Haut Comité de secours. « Et pour s’assurer que l’assistance est distribuée en toute transparence et de manière équitable, toutes les ONG sur le terrain ont l’obligation de se faire enregistrer auprès de cette commission, même celles qui distribuent des paniers alimentaires », souligne-t-il. Le législateur a ensuite « suspendu pour une période de deux ans toutes les transactions foncières dans les quartiers sinistrés ». « C’est en fait l’objectif principal de la loi car, aussitôt après le désastre, les intentions de profiter de propriétaires sinistrés étaient claires », constate le député FL. « Il était donc important que le délai soit assez long pour que chaque sinistré reçoive les subventions permettant la reconstruction de son bien et ne soit pas acculé à vendre par nécessité », insiste-t-il.

Autre article d’importance, dans le cadre de la protection des demeures à caractère historique et culturel, « les baux de location seront automatiquement prolongés d’un an », ce qui nécessitera leur réparation et empêchera leur destruction. Par ailleurs, « les sinistrés seront exemptés de taxes et d’impôts, y compris ceux qui ont perdu leur véhicule dans l’explosion, observe Georges Okaïs. De même, les fonds reçus par les associations humanitaires engagées au bénéfice des sinistrés seront exemptés de taxes ».

Une enveloppe de 1 500 milliards de LL de compensations

La législation adoptée mercredi accorde une place de taille à la reconstruction. Les autorités débloqueront par conséquent une enveloppe de 1 500 milliards de LL qui sera distribuée aux sinistrés. « La priorité sera accordée aux plus touchés et aux plus précaires », souligne Nicolas Sehnaoui, député de Beyrouth. « Le défi est de trouver l’argent en plein blocus, relève-t-il toutefois. Nous devons donc nous débrouiller tout seuls. » Il estime à ce propos qu’avec les fonds que les autorités devraient réussir à mobiliser, « une solution serait envisagée pour près de 85 % des destructions ».

Pour mémoire

Plus de 600 bâtiments historiques touchés par l’explosion du 4 août

Au cœur de la nouvelle loi également, « une couverture médicale pour les familles des personnes tuées et handicapées de manière permanente par la double explosion », affirme le député CPL. De même, « la Banque centrale devra assurer aux sinistrés des devises étrangères pour l’achat des matériaux et équipements nécessaires à la reconstruction de leur logement ».

Les détails de la loi sont nombreux et particulièrement techniques. Il n’en reste pas moins que « deux critères ont été pris en considération pour l’écriture du texte », note Nicolas Sehnaoui. « D’abord, la zone géographique la plus sinistrée, qui englobe les quatre quartiers cités plus haut. Mais aussi le critère de dommages au-delà de la zone géographique du port, de Medawar, Saïfi et Rmeil car chaque sinistré a droit à une compensation. » Le député rappelle à ce titre que dans les quatre zones où les ventes foncières sont gelées, l’objectif est « d’empêcher les propriétaires de paniquer et de vendre leur bien à n’importe quel prix ». Alors que le renouvellement automatique des baux de location a pour objectif « de préserver les vieilles demeures et d’empêcher la gentrification ». L’objectif global est de n’oublier personne et de n’écarter aucune considération importante.

Le texte devrait rapidement être publié dans le Journal officiel. Au gouvernement de faire alors son devoir et de plancher sur les mécanismes d’application sans plus attendre.


Deux mois après la double explosion qui a soufflé plusieurs quartiers de Beyrouth le 4 août dernier, faisant près de 200 morts, plus de 6 500 blessés et quelque 300 000 sans-abri, le Parlement libanais a adopté mercredi, à l’unanimité, « la loi de protection des régions sinistrées et de soutien à leur reconstruction suite à l’explosion au port ». Une loi qui...

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Il faut faire attention de ne pas vendre au Hezbollah parceque Achrafieh sera fini

Eleni Caridopoulou

18 h 08, le 04 octobre 2020

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Commentaires (1)

  • Il faut faire attention de ne pas vendre au Hezbollah parceque Achrafieh sera fini

    Eleni Caridopoulou

    18 h 08, le 04 octobre 2020

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