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Société - Covid-19

« Les bases scientifiques pour la fermeture et la réouverture du Liban ne sont pas claires »

Salim Adib, épidémiologiste, estime que « les bases scientifiques » adoptées par le gouvernement « pour la fermeture et la réouverture du pays ne sont pas claires ».

« Les bases scientifiques pour la fermeture et la réouverture du Liban ne sont pas claires »

Avec les moyens limités du gouvernement à suivre de près les voyageurs rentrés au Liban, permettre à des milliers de personnes de venir dans le pays tous les jours a contribué à la propagation rapide de l’épidémie. Photo d’archives Aziz Taher/Reuters

La décision prise mardi par le gouvernement d’ouvrir pratiquement l’ensemble du pays, alors que les cas de contamination au coronavirus et les décès des suites de la maladie poursuivent leur envol, soulève davantage de questions sur les critères scientifiques des mesures prises par le gouvernement dans son traitement de la pandémie.

« Quand on prend des décisions restrictives mal placées, on sera forcé de prendre des décisions d’ouverture mal placées », critique Salim Adib, professeur d’épidémiologie et de santé publique à l’Université américaine de Beyrouth, soulignant à L’Orient-Le Jour que « les bases scientifiques pour la fermeture et la réouverture du pays ne sont pas claires ». « Le gouvernement est incapable d’expliquer les mesures qu’il prend, constate-t-il. Il faut souligner dans ce cadre l’histoire des piscines extérieures et intérieures (les piscines intérieures sont toujours fermées, alors que le risque qu’elles présentent en termes de contamination est le même que celles extérieures, NDLR). Arrive un moment où en raison de toute cette incohérence, le gouvernement ne peut plus prendre les décisions qu’il faut parce qu’il a épuisé sa crédibilité. »

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Ce qui est sûr, c’est que la pandémie au Liban a atteint le stade de transmission communautaire et qu’il est désormais plus difficile de la contrôler. « Mais ce n’est pas une raison pour multiplier les opportunités de transmission, insiste le Dr Adib. Les rassemblements massifs non nécessaires sont déconseillés tant que la pandémie se poursuit dans le monde. C’est à la communauté maintenant de prendre des décisions qui se basent sur l’évidence scientifique. Ce virus circule et va continuer à le faire. Désormais, il fait partie de la faune virale habituelle au Liban, comme partout ailleurs dans le monde. Les gestes barrières (port du masque, distanciation sociale et lavage des mains) restent de mise. »

Pour l’épidémiologiste, il est vrai que « la responsabilité peut être partagée », il n’en reste pas moins que « le principal responsable de cette propagation du virus reste l’incurie du gouvernement ». Il souligne que ce dernier savait qu’il ne pouvait pas accueillir plus de 1 000 personnes par jour pour pouvoir les tester, leur communiquer les résultats rapidement et les suivre de près. Or « lorsqu’il autorise l’arrivée de plusieurs milliers de voyageurs par jour, tout au long du mois d’août, il ne faut pas s’étonner de voir l’épidémie » se propager à pas de géant, affirme-t-il. Et de reprendre : « Maintenant que les vacances sont terminées, le danger est moindre. Et puis de toute façon, sans l’intervention du gouvernement, on va se retrouver d’ici à la fin de l’année dans une situation meilleure, parce que le virus est en train de disparaître dans la nature libanaise. D’ici à la fin du mois courant, l’épidémie reviendra au point où elle était en avril. »

Le Dr Adib craint toutefois que l’épidémie ne soit « maintenue de manière fictive, en raison du conflit d’intérêts apparent ». « Cette manière de compter les cas, sans les valider, à chaque fois qu’il y a un PCR positif est une porte ouverte à l’abus, d’autant qu’il y a un conflit d’intérêts. Les laboratoires ont tout intérêt à trouver des PCR positifs, parce qu’un plus grand nombre de personnes viendront se faire tester. Il ne faut compter que les cas symptomatiques, hospitalisés et dont les tests sont accrédités. »

Cinq décès

Hier, le pays a enregistré cinq décès et 553 nouveaux cas de contamination au Covid-19, selon le bilan du ministère de la Santé, faisant grimper à 21 877 le nombre de cas cumulés depuis l’apparition de la pandémie dans le pays en février, dont 212 décès. Dans les détails, 93 cas ont été détectés dans le caza de Baabda, 79 dans le Metn, 59 à Beyrouth, 44 à Aley, 30 dans le Chouf. Cent cas sont en cours d’investigation. Au total, 7 024 patients se sont rétablis, alors que 400 personnes sont encore hospitalisées, dont 121 en soins intensifs.

Dans ce cadre, le ministre sortant des Affaires étrangères, Charbel Wehbé, a été testé positif. Il se trouve en isolement pour une durée de deux semaines.

À Tripoli, Jamil Jiblaoui, président du comité de crise au sein de la municipalité de la ville, a tiré la sonnette d’alarme. « Nous sommes entrés effectivement dans la phase de transmission communautaire et nous avançons rapidement vers une immunité collective, à l’ombre du non-respect des mesures de prévention par une grande partie de Tripolitains », a-t-il déploré lors d’une conférence de presse.

En outre, le site internet de l’hôpital Rafic Hariri de Beyrouth a été brièvement piraté hier. Une mention « piraté par des pirates informatiques iraniens » était visible lorsqu’on entrait sur le site de l’hôpital en cours de journée.

Rentrée des classes « anxiogène »

Sur le plan éducatif, le ministre sortant de l’Éducation, Tarek Majzoub, avait annoncé que la rentrée scolaire s’effectuerait à partir du 28 septembre sur la base d’un système hybride basé sur le présentiel en classe et l’enseignement à distance. Consciente de la nature « anxiogène » de la rentrée, Petra Khoury, conseillère du Premier ministre sortant Hassane Diab pour les affaires de santé, a tenté d’apaiser les appréhensions des parents. Elle a fait remarquer dans un tweet qu’« au mois de février dernier, il était impératif de fermer les écoles puisqu’on ne savait pas grand-chose sur le Covid-19 ». « Désormais, nous savons que les enfants sont les moins susceptibles de contracter le virus et les moins susceptibles de contracter une forme sévère du virus, a-t-elle poursuivi. De même, les enfants n’ont pas eu un rôle significatif dans la transmission du virus. »

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« Les disparités socio-économiques ont été exacerbées par la fermeture des écoles », a constaté Mme Khoury, regrettant « l’effet négatif sur l’éducation, la santé mentale et le développement social des enfants » de cette décision. Elle a également déploré « la difficulté d’accès aux appareils électroniques et la faiblesse du réseau internet (WiFi) » qui ont « considérablement restreint l’apprentissage à distance ». Petra Khoury conclut en insistant sur le droit des enfants libanais d’avoir « accès au meilleur enseignement possible pendant qu’est mis en place un plan de retour à l’école qui soit sûr ».

« Ma3an »

Enfin, le ministère de la Santé a annoncé hier le lancement de l’application mobile « Ma3an », destinée à suivre les personnes en contact avec des patients contaminés par le coronavirus. Cette application, dévoilée en juillet dernier, est désormais disponible sur l’App Store d’Apple, sur Google Play pour Android et sur Huawei.

La décision prise mardi par le gouvernement d’ouvrir pratiquement l’ensemble du pays, alors que les cas de contamination au coronavirus et les décès des suites de la maladie poursuivent leur envol, soulève davantage de questions sur les critères scientifiques des mesures prises par le gouvernement dans son traitement de la pandémie.« Quand on prend des décisions restrictives mal...

commentaires (3)

« Les bases scientifiques pour la fermeture et la réouverture du Liban ne sont pas claires »..... hahahaha...elle est bonne celle là... Parce-que tous les autres problèmes ont finalement été résolus scientifiquement.... 5 bouteilles d'arak par jour ne vont plus me suffire pour oublier notre état dé-ri-soir.....

Wlek Sanferlou

17 h 13, le 10 septembre 2020

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Commentaires (3)

  • « Les bases scientifiques pour la fermeture et la réouverture du Liban ne sont pas claires »..... hahahaha...elle est bonne celle là... Parce-que tous les autres problèmes ont finalement été résolus scientifiquement.... 5 bouteilles d'arak par jour ne vont plus me suffire pour oublier notre état dé-ri-soir.....

    Wlek Sanferlou

    17 h 13, le 10 septembre 2020

  • C'est une illusion de croire qu'une societe soit construit sur des "critères scientifiques".

    Stes David

    10 h 39, le 10 septembre 2020

  • DES INCOMPETENTS ET DES IGNORANTS A TOUS LES POSTES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 56, le 10 septembre 2020

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