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Société - Sûreté alimentaire

La perquisition d’un dépôt de viande de poulet périmée fait des vagues

La tournée médiatisée du ministre de la Santé mardi soir a semé la panique en ville, malgré le retrait des produits suspects du marché. Quelles sont les implications de cette saisie ?

La perquisition d’un dépôt de viande de poulet périmée fait des vagues

Qui peut protéger les Libanais en l’absence d’une réelle commission d’experts qui réglemente le contrôle ? Photo Bigstock

Après la crise financière et économique, la propagation du coronavirus, le regain potentiel de la crise des déchets, les coupures de courant, la pénurie d’essence et de mazout… Voilà venu le temps des craintes sur la qualité des aliments consommés par les Libanais. Mardi soir, lors d’une tournée ultramédiatisée, le ministre de la Santé, Hamad Hassan, a annoncé la perquisition et la fermeture d’un dépôt de viande de poulet dans la région de Zekrit, au Metn. Le ministre a qualifié les relents se dégageant de ce grand hangar, qui comporte également une usine de production de produits dérivés du poulet, d’insupportables, et certifié que de la viande de poulet périmée depuis bien longtemps y était transformée en denrées commercialisées dans les magasins.

Hier, le ministère de l’Économie a donné des détails sur l’incident, précisant avoir participé à la perquisition avant la tournée du ministre de la Santé. La Direction générale de la protection du consommateur, relevant du ministère, a précisé dans un communiqué qu’à l’issue de cette visite, « un procès-verbal a été établi et le dépôt a été scellé à la cire rouge, vu la présence de viande de poulet avariée et impropre à la consommation, dégageant une odeur pestilentielle ». Et de poursuivre : « Il s’est également avéré que ces stock de viande de poulet étaient utilisés dans la production de “nuggets”, d’escalopes et d’autres produits dérivés. La viande était congelée puis broyée avant d’être mélangée à d’autres ingrédients, et enfin distribuée à différents commerces et points de vente. » Le communiqué précise que le ministre de l’Économie, Raoul Nehmé, a pris, à la suite de cette tournée, la décision « de retirer du marché les différents produits en cause des marques Lipoul, Shuman et Carry, après avoir eu la preuve que des matières premières périmées ont été utilisées dans leur production ». Selon la LBCI, neuf personnes seraient en état d’arrestation dans le cadre de cette affaire, et le dossier est désormais devant la justice pour déterminer avec plus de précision quelles institutions se sont procuré des produits dérivés du poulet auprès de ces compagnies.

Toutefois, une source du ministère de l’Économie insiste sur le fait que ce ne sont pas les produits à base de poulet vendus sur le marché ou distribués il y a quelques semaines à des populations défavorisées (elles avaient été saisies du fait d’une hausse des prix injustifiée) qui sont périmés et impropres à la consommation, mais bien les produits dérivés cités dans le communiqué du ministère. Par ailleurs, selon cette source, toutes les listes qui ont circulé sur des établissements s’étant soi-disant approvisionnés auprès de ce dépôt sont fausses.

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Quant à la société Carry, évoquée dans le cadre de cette affaire, elle a publié un communiqué dans lequel elle précise n’avoir de lien avec la compagnie Freiha – poulets Shuman – que pour la production de deux produits qui ont déjà été retirés du marché. Elle ajoute se pourvoir en poulets issus de quatre autres grandes fermes au Liban.

L’importance d’une enquête complète

Cette affaire n’a pas manqué de soulever plusieurs interrogations autour de la sécurité alimentaire : pourquoi les autorités, qui déclarent que cette usine est fonctionnelle depuis quatre ans, ont-elles mis autant de temps à mettre un terme à son activité ? Quelle confiance peut-on avoir dans les produits du marché après ce scandale si bien médiatisé ?

Un expert, bien informé mais ayant requis l’anonymat, émet des réserves sur la façon dont l’affaire a été menée, se demandant si les manquements qui ont permis à l’usine de fonctionner en toute impunité quatre ans durant allaient vraiment être révélés (il semble que les autorités n’aient été alertées qu’après une plainte des voisins concernant l’odeur). « J’aurais préféré que la perquisition soit plus discrète pour plusieurs raisons, poursuit cet expert. D’une part, parce qu’il est important d’identifier les vrais coupables, qui sont probablement influents et pourraient s’en sortir en douce après la médiatisation de cette affaire. D’autre part, parce qu’il aurait fallu mener toutes les investigations sur la propriété du dépôt et la distribution des aliments afin d’établir les réelles responsabilités de ces fermes que l’on a ainsi traînées dans la boue. Enfin, cette affaire porte non seulement préjudice aux organismes officiels, dont on constate une nouvelle fois la négligence, mais elle sème aussi le discrédit sur tout un secteur, celui de la production de poulet, qui est florissant au Liban et jouit d’une réputation régionale. Et cela ne devrait pas être pris à la légère. » Selon cet expert, il faut également tester la viande afin que son degré de nocivité soit établi, ce qui affecterait la peine infligée aux responsables. « Employer de la viande avariée est impardonnable de toute évidence, mais il faut savoir que celle-ci était frigorifiée puis cuite longuement, ce qui détruit en principe les microbes, explique-t-il. Toutefois, les épices introduisent des mycotoxines (toxines élaborées par diverses espèces de champignons microscopiques) qui sont nocives. Il faut donc tester des échantillons pour avoir des réponses aux angoisses générées par cette affaire auprès de la population. »

La commission nationale, la vraie solution

Interrogé sur cette affaire par L’OLJ, Zouhair Berro, président de l’Association de protection des consommateurs, affirme qu’il n’a pas du tout été surpris par le scandale et qu’il craint même que les aliments avariés, dont on a modifié la date d’expiration, ne soient beaucoup plus communs qu’on ne le pense sur le marché. « La situation est grave et la crise perturbe grandement le flux des marchandises, dit-il. Malheureusement, nous n’avons toujours pas bâti d’État digne de ce nom ; les commerçants continuent de décider de tout et les autorités concernées sont toujours aussi inefficaces. »

M. Berro affirme qu’il n’y a absolument pas de pénurie d’aliments dans le pays, mais bien un souci au niveau de la sûreté alimentaire. « Le système reste inchangé, souligne-t-il. La Commission pour la sécurité des aliments a été adoptée il y a des années de cela, mais sans avoir été formée. »

L’expert cité plus haut déplore lui aussi que cette commission n’ait toujours pas été formée, probablement pour des considérations en rapport avec le partage de gâteau politique. Il estime que c’est seulement en confiant cette question à une commission de véritables experts scientifiques, qui transcenderaient les conflits d’intérêt entre les différents ministères concernés par ce dossier, qu’il sera véritablement possible de protéger les Libanais. Ce qui n’est certainement pas le cas pour l’instant.

Après la crise financière et économique, la propagation du coronavirus, le regain potentiel de la crise des déchets, les coupures de courant, la pénurie d’essence et de mazout… Voilà venu le temps des craintes sur la qualité des aliments consommés par les Libanais. Mardi soir, lors d’une tournée ultramédiatisée, le ministre de la Santé, Hamad Hassan, a annoncé la perquisition...

commentaires (13)

Pour une fois c'est pas la faute aux Iraniens !!!Dans tous les cas on a heureusement du Caviar non perimé...

aliosha

11 h 56, le 25 juillet 2020

Tous les commentaires

Commentaires (13)

  • Pour une fois c'est pas la faute aux Iraniens !!!Dans tous les cas on a heureusement du Caviar non perimé...

    aliosha

    11 h 56, le 25 juillet 2020

  • TOUT LE MONDE VEUT IMITER LES POLITICIENS. GAGNER DE L’ARGENT FACILEMENT QUITTE À TUER DES CITOYENS INNOCENTS. DERRIÈRE CE TRAFIC IL Y A SÛREMENT UN DES LEURS MAIS CELUI LÀ NE SERA JAMAIS RETROUVÉ NI CITÉ. .

    Sissi zayyat

    18 h 20, le 23 juillet 2020

  • Que voulez-vous avec trois heures de courant par jour tout ce gate. On dirait la Chine

    Eleni Caridopoulou

    16 h 22, le 23 juillet 2020

  • Pas un mot de crédible dans cette cabale qui vise un éleveur libanais au profit d'importateurs complices. J'espère que l'entreprise citée saura se défendre, on n'en peut plus des menaces, rackets trafics et autres crimes contre le Liban.

    Christine KHALIL

    14 h 54, le 23 juillet 2020

  • Bizarre cette découverte soudaine. Que fait le gars des douanes au fait dans ce dépôt? Ce n'est pas à lui des les arrêter à la douane?? et non dans ce bled? Pourquoi a t on annoncé fort les marques en question? alors que les tabasseurs des avocats à achrafieh, des tabasseurs des manifestants, on n'annonce QUE les initiales? et jamais qui les envoie? Pourquoi là? maintenant? Y a t il de la marchandise IRANIENNE à écouler pour remplacer ces marques? AUCUNE CONFIANCE en ce Gouvernement, classe politique et régime actuel. Sorry les gars...Y a magouille en dessous.

    LE FRANCOPHONE

    11 h 53, le 23 juillet 2020

  • Ceci représente une véritable tentative d’homicide et j’espère que, show télévisé ou non, tous les responsables en subissent les conséquences (les responsables directs ainsi que TOUS leurs « facilitateurs » entre officiels et techniciens). Ce qu’il nous faut au Liban c’est de laver cette sale culture à l’acide pour que l’on cesse de penser, d’une bonne fois pour toutes, que faire de l’argent en empoisonnant les autres n’est pas intelligent (chatarrah) sinon criminel (haywané). Celà ne pourra être accompli qu’avec des châtiments exemplaires pour commencer (plutôt que des chatoiements télévisés) suivis d’un programme d’éducation civique pour enfants et adultes à échelle nationale. Mais comment pourrait-on espérer voir ceci instauré un jour si ce n’était de la main d’un dictateur ou quelque puissance étrangère qui nous colonise pour enfin nous éduquer à coup de bâtons?

    Fady Abou Hanna

    11 h 40, le 23 juillet 2020

  • Déjà dans l’article on modère la nocivité de ces produits pour ne pas embarrasser nos grands commerçants et anéantir nos exportations et on s’attaque évidement à ce gouvernement et on montre que la douane n’a rien à faire dans cette trouvaille mais que par l’odeur allèche et prévenu la police a trouvé tout cela après 4 ans Dans l’article on decouvre aussi qu’une commission avait été formé il y a plusieurs années mais jamais constituée LA VÉRITÉ TOUT LES GOUVERNEMENTS DEPUIS 2005 ONT FAIT VOTE DES LOIS SANS JAMAIS LES METTRE EN APPLICATION CAR IL N’AYAIT PAS CONSENSUS SUR LE PARTAGE DU GÂTEAU CELA A ÉVIDEMENT EMPIRÉ AVEC AOUN CAR SLEIMAN NE DEVAIT RIEN À HEZBALLAH POUR SON ÉLECTION DÉCIDÉE À DOHA ALORS QUE AOUN DOIT TOUT À NASRALLAH ET CELA JUSQU’À AUJOURDH’UI MR BERRY DEMANDER A APPLIQUER LES LOIS QUE VOUS FAITES VOTES AU LIEU DE LES GARDER BIEN AU CHAUD DANS LES TIROIRS ET QUE LE GOUVERNEMENT ANNONCE QUE TOUTE PERSONNE RECOMMANDE PAR UN PARTI EST AUTOMATIQUEMENT EXCLU DE LA NOMINATION DÉSIGNÉE C’EST COMME CELA QUE NOUS AURONS DE VRAI TECHNOCRATES DANS CE PAYS

    LA VERITE

    11 h 40, le 23 juillet 2020

  • Et dire que des relents se dégageant de ce grand hangar, on a distribué tout un lot gratuit de poulets aux gens de Mansourieh , et bizarrement personne n’est mort il y a deux mois . Et à signaler aussi que selon certaines sources l’armée est une bonne clientèle de ces produits . Enfin on ne sait pas le rôle de la douane dans toute cette campagne sauf si ce gouvernement si affaibli veut blanchir son image .

    Antoine Sabbagha

    10 h 08, le 23 juillet 2020

  • Non seulement les aliments sont périmés dans ce pays mais malheureusement ses trois responsables également !

    S. A.

    10 h 01, le 23 juillet 2020

  • Au lieu de mener des investigations discrètes pour établir un dossier solide pouvant inculper tous les criminels impliqués dans cette affaire, on préfère faire un show télévisé ultra médiatisé pour montrer l’efficacité de ce qui est appelé gouvernement de technocrates indépendants. C’est un simple résumé de l’état d’esprit des personnages grotesques qui pensent gouverner le pays

    Lecteur excédé par la censure

    09 h 14, le 23 juillet 2020

  • VIANDE PERIMEE, POULETS PERIMES, POISSONS PERIMES, LEGUMES ET FRUITS ARROSES AVEC DE L,EAU POLLUEE ETC... ETC... ETC... LES LIBANAIS SONT NOURRIS A DOSES DE POISONS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 00, le 23 juillet 2020

  • rappelons nous- je voulais dire rappelons aux autorites incompetentes que certains "experts" seront tres heureux de defendre certaines pratiques pour peu qu'ils aient ete contactes par qui de droit. la triste realite n'encourage pas a dresser une liste d'exemples, beaucoup trop longue/

    Gaby SIOUFI

    08 h 49, le 23 juillet 2020

  • De commission d’experts a une autre, on va finir par en revendre a l'exportation- tiens une idee qui fera des rentrees de FRESH $ vite avales par la mafia ambiante- . encore une fois tout gesticulation et autre tentatives resteront inutiles tant que les criminels DE TOUS GENRES ne seront pas PUBLIQUEMENT RAPIDEMENT PUNIS - comme on a vu avec une multitude de scandals dont les acteurs restent libres comme l'air- le plus petit fonctionnaire acceptera de tt coeur se faire graisser la pate pour taire une infraction - la crise n'ayant rien a voir avec cette culture devenue congenitale.

    Gaby SIOUFI

    08 h 43, le 23 juillet 2020

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