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Société - Liban

Pénuries, inflation, détention d'activistes : la rue toujours mobilisée

Arrestations et armes saisies à Tripoli, annonce l'armée.

Pénuries, inflation, détention d'activistes : la rue toujours mobilisée

Manifestation devant le Tribunal militaire de Beyrouth pour réclamer la libération de la militante Kinda el-Khatib, toujours en détention, le 2 juillet 2020. Photo ANI

Pénurie de carburant, cherté de vie, effondrement de la livre libanaise, détention d'activistes anti-pouvoir... toutes ces questions ont poussé une nouvelle fois jeudi des Libanais à descendre dans la rue pour dénoncer l'incurie de l'Etat, alors que le Liban s'enfonce dans sa pire crise économique et financière.

A Beyrouth, des protestataires ont coupé en début de soirée la route devant le ministère de l'Intérieur à Sanayeh. Un peu plus tôt, des contestataires se sont rassemblés sur la place des Martyrs, dans le centre-ville de la capitale, à l'appel du groupe d'activistes "Je suis une ligne rouge". Ailleurs, des protestataires se sont rassemblés au rond-point de l'Unesco - Tallet el-Khayat pour une marche en direction de l'hôpital Barbir pour protester contre "l'effondrement financier" du pays. La route de Kaskas a aussi été coupée. A Zouk Mikaël, des manifestants se sont rassemblés sur l'autoroute, brandissant des drapeaux libanais, pour protester contre la hausse des prix.

A Tripoli, au Liban-Nord, des protestataires se sont regroupés sur la place al-Nour après avoir coupé toutes les routes alentour à l'aide de pneus et bennes à ordures. Ils ont aussi bloqué l'autoroute Tripoli - Akkar. A Saïda, au Liban-Sud, des protestataires ont manifesté sur la place Élia. Certains d'entre eux se sont allongés sur le sol pour bloquer la route. Ils ont lancé des slogans contre la hausse du taux de change. A Nabatiyé enfin, des manifestants se sont rassemblés devant le Sérail avant de marcher dans la ville pour protester contre la dégradation de la situation économique.



Dans la journée, une poignée de manifestants avaient bloqué l'autoroute sous le pont de Cola, ainsi qu'au niveau de la Cité sportive, un peu plus loin, afin de crier leur colère face à la dégradation de la situation économique et sociale et l'inflation. Les protestataires ont ainsi bloqué la voie-est de la route sous le pont dit Cola, provoquant une déviation de la circulation vers les routes intérieures. Au niveau de la Cité sportive, l'armée a demandé aux automobilistes d'emprunter également les routes intérieures. "Nous allons fermer la route de Corniche Mazraa plus tard", a prévenu un manifestant au micro de la chaîne LBCI. Et en effet, la route de Corniche Mazraa a été bloquée par des contestataires toute la soirée.

L'analyse d'Elie Fayad

Briser l’isolement ou mourir

Ces dernières semaines, la livre libanaise ne cesse de s'effondrer à grande vitesse, s'échangeant à plus de 9.000 L.L. contre le dollar, alors que le taux officiel, quasi-inapplicable, est encore fixé à 1507.5 L.L. Cette dévaluation a provoqué une forte inflation sur le marché. Une pénurie de mazout provoquant un sévère rationnement de courant est venu compliquer la situation, au moment où le Liban fait également face à la pandémie du coronavirus.

Rationnement du courant
Pour protester contre le rationnement du courant électrique qui devient insoutenable en cette saison estivale, des manifestants ont observé un sit-in devant le bâtiment d’Électricité du Liban (EDL) à Saïda, dans le sud du pays. Les protestataires ont déploré, d'après l'Agence nationale d'information (Ani, officielle) une baisse drastique du nombre d'heures d'approvisionnement en courant électrique. Un peu plus tard, après un passage devant les bâtiments de la société de télécoms Ogero, les manifestants se sont dirigés vers la rue Riad Solh, dans le centre-ville, où se trouvent la plupart des bureaux de change.

L'édito de Issa GORAIEB

Les professionnels du vide

Les activistes ont exigé que ces derniers ferment leurs portes et suspendent leurs opérations, ce à quoi certains ont brièvement obtempéré, tandis que l'armée se déployait dans la zone, toujours selon l'Ani. Dans le quartier de Mina, à Tripoli, des activistes se sont rassemblés devant les bâtiments de la société Electricité de Qadicha, pour marquer leur colère face au rationnement du courant électrique. Les manifestants ont tenté de fermer les portes du bâtiment et d'en bloquer l'accès aux employés, mais en ont été empêchés par l'armée qui les a dispersés, selon l'Ani.

Face à la pénurie de fuel oil, carburant qui alimente les centrales électriques du Liban, le ministre de l'Énergie Raymond Ghajar a pointé du doigt "l’augmentation de la demande et la contrebande". Le rationnement "se poursuivra jusqu’au 8 juillet prochain (...) avant l’arrivée de nouveaux tankers transportant du carburant", avait fait savoir le ministre.

"Arrêter les corrompus"
Sur le plan des libertés, plusieurs dizaines d'activistes et de proches de la militante Kinda el-Khatib, arrêtée depuis deux semaines et poursuivie pour collaboration avec Israël, se sont rassemblés en matinée devant le siège du Tribunal militaire à Beyrouth pour réclamer qu'elle soit libérée et qu'elle soit innocentée des charges qui pèsent contre elle. Scandant les slogans traditionnels du mouvement de contestation anti-pouvoir, les manifestants ont coupé dans les deux sens la route reliant les secteurs du Musée national et de Barbir, appelant les Libanais à "descendre dans la rue pour destituer le pouvoir", avant de former un convoi de véhicules devant le musée, le tout en présence d'un grand déploiement des Forces de sécurité intérieure et de la police militaire. Au même moment, la militante subissait son deuxième interrogatoire conduit par la juge d'instruction militaire, Najat Abou Chakra, qui avait émis la semaine dernière un mandat d'arrêt contre elle. Connue pour sa position hostile au Hezbollah et au chef de l’Etat Michel Aoun, Kinda el-Khatib avait été arrêtée à son domicile à Halba (Akkar) par la Sûreté générale.

Reportage

« Pour de nombreuses familles, le pain est central. Que vont-elles faire maintenant ? »

Parallèlement, la Chambre d'accusation du Mont-Liban a rejeté la demande de libération de l'activiste controversé Rabih Zein, détenu depuis un mois avec d'autres militants anti-pouvoir, sans que l'on connaisse le motif de son refus. Le détenu devra être auditionné par visioconférence lundi par la première juge d'instruction du Liban-Nord, Samaranda Nassar, afin que l'enquête se poursuive. Des activistes et camarades de Rabih Zein avaient tenu plus tôt deux sit-in, l'un devant le palais de Justice de Tripoli, au Liban-Nord, et l'autre devant celui de Baabda, dans le Metn, afin de réclamer la libération de Zein et d'autres protestataires arrêtés. "Ils ne sont ni des trafiquants de drogue, ni accusés d'avoir fait usage d'armes à feu", ont fait valoir les manifestants. "Ils sont simplement descendus dans la rue pour exiger que soient respectés leurs droits les plus élémentaires", ont-ils ajouté, appelant les juges à "arrêter les corrompus" et à "relâcher au plus tôt" leurs camarades. La chambre de mise en accusation du Liban-Nord avait refusé le 18 juin de relâcher Rabih el-Zein, qui avait été arrêté à Jbeil le 3 juin en application de deux mandats d’arrêt délivrés à son encontre. La chambre de mise en accusation de Baabda avait pris une décision dans le même sens.

Armes saisies
Pour sa part, l'armée a annoncé jeudi avoir arrêté la veille cinq personnes au niveau du rond-point Abou Ali, à Tripoli, qu'elle accuse d'avoir attaqué un checkpoint de la troupe et d'avoir tiré en l'air pendant que d'autres personnes bloquaient des camions transportant des denrées alimentaires. L'armée annonce avoir saisi trois fusils de type Kalachnikov et leurs munitions, ainsi qu'un pistolet et quatre grenades à main.

Des armes et des munitions saisies par l'armée libanaise à Tripoli, au Liban-Nord, dans une photo diffusée le 2 juillet 2020. Photo ANI

La troupe a également annoncé avoir "dispersé des citoyens qui s'en prenaient, dans la localité de Marj dans la Békaa, à trois camions transportant du sucre à destination de la Syrie, via le passage frontalier de Masnaa". Plusieurs camions transportant des aides humanitaires et des denrées alimentaires à destination de la Syrie ont été la cible d'attaques ces dernière semaines d'individus en colère en raison de la crise qui secoue le Liban.

Pénurie de carburant, cherté de vie, effondrement de la livre libanaise, détention d'activistes anti-pouvoir... toutes ces questions ont poussé une nouvelle fois jeudi des Libanais à descendre dans la rue pour dénoncer l'incurie de l'Etat, alors que le Liban s'enfonce dans sa pire crise économique et financière.A Beyrouth, des protestataires ont coupé en début de soirée la route devant...

commentaires (1)

ET CA VA CRESCENDO. LA CONTESTATION SE RENFORCE DE JOUR EN JOUR ET SE MUE INDENIABLEMENT EN UNE REVOLUTION POPULAIRE DE GRANDE ENVERGURE. LE PEUPLE VEUT. LE PEUPLE OBTIENDRA CE QU,IL VEUT.

LA LIBRE EXPRESSION

17 h 32, le 02 juillet 2020

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Commentaires (1)

  • ET CA VA CRESCENDO. LA CONTESTATION SE RENFORCE DE JOUR EN JOUR ET SE MUE INDENIABLEMENT EN UNE REVOLUTION POPULAIRE DE GRANDE ENVERGURE. LE PEUPLE VEUT. LE PEUPLE OBTIENDRA CE QU,IL VEUT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    17 h 32, le 02 juillet 2020

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