Le parquet libanais a inculpé lundi un haut responsable de la Banque centrale pour manipulation du taux de change, en pleine crise monétaire dans le pays, a indiqué une source judiciaire. Il s'agit, selon cette source, de la première inculpation d'un responsable de la Banque du Liban (BDL) dans un pays au bord du naufrage économique. L'affaire intervient dans un contexte de tensions croissantes et inédites entre le gouvernement et le gouverneur de la BDL, Riad Salamé, en poste depuis 1993.
Le directeur des opérations monétaires à la Banque centrale, Mazen Hamdane, avait été arrêté jeudi par les forces de l'ordre. Le lendemain, l'institution a nié dans un communiqué "toute manipulation du marché des changes" à travers ses opérations. Le procureur financier Ali Ibrahim a "inculpé M. Hamdane pour manipulation de la monnaie nationale et atteinte à la stabilité de la livre, à travers des achats directs de dollars auprès des changeurs", a dit le responsable judiciaire à l'AFP. Il a été déféré devant un juge d'instruction.
Au Liban, le taux de change officiel reste inchangé, mais le pays a connu ces derniers mois l'émergence d'un marché noir et une forte dépréciation de la livre libanaise dans les bureaux de change. La livre libanaise est indexée sur le billet vert depuis 1997 au taux fixe de 1.507 livres pour un dollar. Mais la monnaie nationale a dégringolé jusqu'à franchir en avril le seuil historique des 4.000 livres pour un dollar. Et les banques ont imposé des restrictions draconiennes sur les retraits en dollar, dans un contexte de pénurie de billet vert. Face à cet effondrement, la Banque centrale a fixé un plafond de 3.200 livres pour un dollar dans les bureaux de change.
Ces derniers jours, une cinquantaine de changeurs illégaux ont été dans ce contexte interpellés pour l'achat de dollars à des prix très élevés. Le président du syndicat des bureaux de change, Mahmoud Mrad, a également été arrêté. Le syndicat des changeurs avait appelé il y a quelques jours la filière à se mettre en grève pour protester contre l’inaction des autorités contre les acteurs du marché noir, un mouvement prolongé par la suite pour protester contre les arrestations de leurs confrères.
Fin avril, le gouvernement a adopté un plan de réformes qui entérine un flottement à venir du taux de change. Les autorités ont entamé des négociations avec le Fonds monétaire international (FMI) pour une aide financière.
commentaires (11)
Et si le dossier de Hamdane s'avère vide! Surtout que l'homme a été plus ou moins blanchi par la réunion et les chiffres avancés par le haut comité de la BDL. Est-ce que le procureur financier qui prend des ailes ces temps-ci,accuse à tort et à travers sans tenir compte des rôles des gens qu'il inculpe ,et de leurs droits tout court? On verra bien où ça va mener cette série d'arrestations, en attendant la parole des juges. A partir des suites judiciaires, dépendra la confiance à accorder au juge Ibrahim.
Esber
22 h 27, le 18 mai 2020