"Restez à la maison", peut-on lire sur ce panneau d'affiche, sur l'autoroute quasiment déserte menant du nord du Liban vers Beyrouth, le 22 mars 2020. Photo REUTERS/Mohamed Azakir
Alors que la mobilisation générale contre le coronavirus avait été décrétée lundi dernier au Liban, le ministère de l’Intérieur a annoncé dimanche l'imposition de mesures plus strictes pour que soit respecté le confinement, un certain relâchement ayant été observé en fin de semaine à travers le pays. Désormais, ce sont les forces de l'ordre qui seront chargées de superviser avec fermeté le respect des mesures.
Ce que les Libanais et tous les résidents au Liban sont autorisés à faire ou pas reste toutefois quelque peu flou. A l'instar des propos du Premier ministre Hassane Diab, qui a appelé samedi, lors d'une conférence de presse, à un couvre-feu "auto-proclamé".
L'Orient-Le Jour a tenté d'en savoir plus, pour comprendre ce qu'il est désormais possible de faire dans cette situation inédite, alors que le dernier bilan au Liban était dimanche soir de 248 cas avérés de contamination au coronavirus. Depuis le début de l'épidémie dans le pays, quatre personnes ont succombé au coronavirus, selon les bilans officiels.
En l'absence d'un document clair posant les règles, L'Orient-Le Jour a interrogé une source auprès d'un service de sécurité, ainsi que Juan Hobeiche, président de la fédération des municipalités du Kesrouan et Mohammad Dergham, président de la fédération des municipalités de la banlieue-sud de Beyrouth. Voici les grandes lignes qui se dessinent :
Dans quelles situations peut-on sortir de chez soi ?
Pour la source sécuritaire, il est globalement interdit de sortir de chez soi pour une raison considérée comme non-essentielle. En d’autres termes, les sorties sont permises pour assurer le ravitaillement en nourriture et en médicaments, ou pour les personnes dont l'activité professionnelle se poursuit.
Il est recommandé qu’un seul membre de la famille fasse les courses à la fois, et le service de livraison à domicile est privilégié, ajoute Mohammad Dergham. "Afin de limiter au maximum les contacts humains, les clients sont priés de faire leur commande à partir de l’extérieur du commerce ou de la boulangerie. Leur commande leur est ensuite donnée par un employé muni de gants et d’un masque. Dans d’autres cas, un nombre limité de clients est admis à la fois dans un commerce", précise-t-il.
Est-il permis de se promener ?
Selon la source de sécurité, faire du sport dans des endroits qui pourraient être très fréquentés, comme à titre d'exemple la corniche de Beyrouth est interdit. Ceci dit, si le promeneur se trouve dans une forêt ou tout autre lieu très isolé (auquel il a accès depuis son domicile), il ne sera probablement pas abordé par les forces de l’ordre pour le peu de risque qu’il représente. Il faut que les citoyens soient juges de ce qui est logique et cohérent dans le cadre de la mobilisation générale, et faire preuve de bon sens et de sens du devoir, poursuit la source avant d'ajouter qu'il faut privilégier le sport à la maison durant la période de confinement.
Pour Mohammad Dergham, les promenades avec enfants, seul ou en groupe sont prohibées, et les longs déplacements (d’une région à une autre) ne sont pas les bienvenus à moins d’une nécessité absolue.
A noter qu'hier, les entrées et sorties de plusieurs localités libanaises (Saadnayel, Marj et Majdel Anjar, dans la Békaa), ont été bloquées à l'aide de remblais de sable pour empêcher les habitants de la localité de se déplacer, rapporte notre correspondante dans la Békaa, Sarah Abdallah.
Quelles sont les mesures prises pour s'assurer du respect des règles du confinement
Les forces de l’ordre et l’armée, secondées par la police municipale, font circuler des patrouilles et dressent des barrages pour contrôler le flux de la population, souligne la source sécuritaire. Les forces de l’ordre ont la prérogative de décider de ce qui peut constituer un éventuel danger, et peuvent donc lancer des avertissements oraux et même dresser des PV à l’encontre des imprudents, poursuit-elle.
Que risquent les institutions et les individus qui ne respectent pas les règles ?
Des procès-verbaux ont déjà commencé à être dressés contre des magasins ouverts ou des marchands ambulants toujours en activité malgré la mobilisation générale, indique la source de sécurité. Le montant de la contravention est décidé par le juge, et en cas de récidive, le contrevenant sera déféré devant le tribunal pénal, ajoute-t-elle.
"La police municipale dresse des PV à l’encontre des contrevenants mais l’assistance de l’armée, dès dimanche, a été précieuse", note pour sa part Mohammad Dergham.
"Il y a cinq services sécuritaires qui œuvrent sur le terrain – l'armée, les FSI, la Sûreté générale, la Sécurité de l’État et les municipalités – et il est nécessaire qu’il y ait davantage de coordination et de directives unifiées provenant de la cellule de crise du gouvernement", souligne toutefois Juan Hobeiche, qui regrette un certain flou dans les directives.
Quels établissements ont le droit d'ouvrir?
-Tout établissement de type restaurant ou bar servant à manger et à boire est fermé, avec activation de la livraison à domicile.
- Les supermarchés sont ouverts mais des dispositions sont prises pour que les clients y soient peu nombreux en même temps, afin d’éviter une trop grande promiscuité. Pour Juan Hobeiche, il est important d'organiser la journée de travail des petites épiceries de quartier et de leur permettre d’ouvrir six à sept heures en début de journée, afin de ne pas les pénaliser par-rapport aux grandes surfaces.
- Les services financiers (changeurs, bureaux de transferts…) sont ouverts quelques heures en matinée.
- Les pharmacies, cliniques, laboratoires observent un horaire complet.
- Les dépôts de médicaments et les pourvoyeurs de produits sanitaires sont ouverts en matinée.
- En ce qui concerne les marchands ambulants, ils n'ont plus le droit de circuler. En fin de semaine, avec le relâchement général, des vendeurs mobiles ont été verbalisés. Ce qui parfois a pu donner lieu à des accrochages avec les forces de l'ordre. Tous les marchands ambulants ont été priés de plier bagage, insiste Mohammad Dergham.
- Les commerces hors pharmacie ou alimentation qui ont tenté de contourner les directives par la ruse ont été scellés à la cire rouge et s'exposent à des amendes. Dans la banlieue-sud, assure Mohammad Dergham, les magasins contrevenant aux règles ont été fermés et scellés à la cire rouge.
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11 h 57, le 23 mars 2020