«Quoi de neuf ? » Sérieusement ? Ces petites phrases qu’on vous débite machinalement ont parfois, dans certains contextes, la vertu de vous laisser les bras ballants. Quoi de neuf ?… Que peut-il se passer de neuf quand le monde entier ressemble à un train en panne au milieu d’un tunnel ? Et que ce fait est à lui seul le plus hallucinant des événements de ce siècle, annulant tous les autres. Un plaisantin a même suggéré aux bacheliers de 2100, si toutefois leur époque maintenait l’épreuve du bac, de répondre à toutes les questions, sans risque de se tromper, « 2020 » : l’an de grâce durant lequel on aura tout vu, surtout au Liban où, parallèlement à la pandémie, l’économie a entamé sa chute libre. Preuve qu’on peut toujours tomber plus bas et que les priorités se réordonnent au gré des circonstances. Nous voici sous la tyrannie planétaire établie par S.M. Covid XIX, nouveau maître des finances et de toute la production humaine, empereur des croyants et des mécréants, qui place la santé en tête de toutes les urgences, soumet les populations apeurées, donne aux gouvernants l’illusion provisoire d’élargir leurs prérogatives et remet sérieusement en question le fonctionnement du monde tel qu’on l’a connu jusqu’ici.
Dans cette atmosphère de guerre globale, on apprend que notre gouvernement en son souriant déni a créé une « caisse d’entraide » déclinée en diverses devises, appelant à la solidarité des citoyens et des expatriés pour renflouer les hôpitaux. Il ne fait aucun doute que le gouvernement, par cette initiative inconsidérée, va se faire mordre par le brave nouveau monde qui se prépare, et vite constater à ses dépens que plus personne ne fait confiance à des finances publiques dont la dilapidation spectaculaire reste encore à expliquer. La solidarité sociale, pendant ce temps, se porte bien, merci, et va même bon train. Tant et si bien que si les Libanais s’en sortent sans trop de mal au bout de ces deux semaines d’enfermement que l’on dit cruciales, ce sera grâce à l’entraide spontanée qui s’organise depuis le mois d’octobre et dont les locomotives sont désormais connues et respectées de tous, qu’il s’agisse d’assistance aux personnes âgées défavorisées ou de préparation de repas aux familles démunies qui ne peuvent pas éternellement se nourrir de conserves. Dans la foulée de la crise économique, la crise sanitaire nous a trouvés, bien qu’exsangues, prêts à l’affronter avec motivation. Dans ce domaine en particulier, nous avons renoué avec nos réflexes de rescapés de guerre et appris à remplacer l’État qui prend acte, de jour en jour, tant de son incapacité à rassurer que de l’indifférence, au pire la méfiance dont il est frappé.
Pendant que chacun de nous voyage autour de sa chambre, le temps s’étire et l’espace se creuse à défaut de se déployer. On trouve les uns plongés dans de vieux cartons à photos (on n’en a plus développé depuis une quinzaine d’années), mesurant les vies vécues et les distances parcourues à l’aune d’une sorte de glaciation subite qui les transforme eux-mêmes en clichés immobiles. D’autres explorent leurs placards, y découvrent des continents inconnus et des trésors oubliés. Certains sollicitent l’amitié des livres, mais lire restera le rare privilège des solitaires en ces temps de bruyante promiscuité. Pour le plus grand nombre, il faudra surtout trouver de quoi durer. Les nouveaux chômeurs, les journaliers, les chauffeurs de taxi, les restaurateurs, les gens du spectacle, ceux qui travaillent dans les métiers du corps, gym, danse, physiothérapie, esthétique, n’ont aucune vision au-delà de la journée qui s’achève. Le virus enjoint à chacun de courber la tête, renoncer à sa fierté, brûler ce qu’il a adoré, adorer ce qu’il a brûlé, revoir ses désirs et ses besoins à la baisse et se préparer à partager. La seule force que nous pouvons opposer à cet ennemi rampant et invisible est notre humanité. Ironiquement, c’est lui qui la révèle.
A quel type de gouvernement vous aspirez alors que l'actuel , accusé d'être dans le déni, ne chôme ni de jour ni de nuit ? Ce gouvernement qui jongle avec un tas de problèmes et notamment celui du coronavirus qui continue de faucher des milliers de personnes de par le monde .Dès lors l'exécutif s'est transformé en cellule de crise pour tenter de juguler cette marée de désastres qui s'est abattue sur le pays depuis le sinistre 17 octobre jusqu'à ce jour. D'ailleurs ,le Liban est classé parmi les meilleurs pays en matière de prévention et de prise en charge des malades contaminés par ce virus .
16 h 59, le 19 mars 2020