Rechercher
Rechercher

À La Une - Liban

Le parquet demande au tribunal militaire de rejeter en cassation l'acquittement de Amer Fakhoury

Selon des informations de la chaîne LBCI, l'ex-responsable de l'ALS est sorti d'hôpital après la décision de sa remise en liberté, mais il n'aurait toutefois pas quitté le territoire libanais.


Des membres du mouvement Amal manifestant devant l'ancienne prison de Khiam, au Liban-Sud, le 15 septembre 2019. Photo AFP / JOSEPH EID

Le commissaire du gouvernement près la cour de cassation militaire, le juge Ghassan Khoury, s'est saisi mardi de l'affaire Amer Fakhoury et a demandé à la cour de cassation militaire de casser le jugement rendu par le tribunal militaire de première instance. Ce tribunal avait opté la veille pour la remise en liberté de l’ex-responsable de la milice pro-israélienne de l’Armée du Liban-Sud, après avoir abandonné les charges de torture de prisonniers à la prison de Khiam en 1998 dont il avait été, à une certaine époque, le commandant. Cette libération a suscité l'émoi dans plusieurs milieux politiques.

Le juge Khoury a également demandé à la cour de cassation militaire d'émettre un mandat d'arrêt contre Amer Fakhoury et de le juger à nouveau pour les crimes qui lui sont imputés, à savoir "l'enlèvement, la torture et la détention de citoyens libanais à l'intérieur de la prison de Khiam, ainsi que les meurtre et les tentatives de meurtre contre d'autres personnes". Selon l'Agence nationale d'information (Ani officielle), le juge Ghassan Khoury s'est saisi de cette affaire après une demande d'appel présentée hier par le procureur général près la Cour de cassation, le juge Ghassan Oueidate.

Le juge des référés de Nabatiyé, Ahmad Mezher, a pour sa part interdit à l’ex-responsable de l'ALS de quitter le territoire libanais au cours des deux prochains mois, suite à une demande déposée par plusieurs avocats libanais. 

Le tribunal militaire avait ordonné hier la libération de ce dernier après avoir accepté les vices de formes soulevés par les avocats de M. Fakhoury, précise l'Ani. Cette décision est intervenue alors que le secteur de la justice, comme l’ensemble du pays, est entré dans une période de léthargie du fait des décisions drastiques du gouvernement visant à lutter contre le nouveau coronavirus. Selon des sources politiques interrogées par L'Orient-Le Jour, la décision du tribunal militaire est intervenue à la suite d’une réunion qui se serait tenue la semaine dernière entre Gebran Bassil et Hassan Nasrallah, au cours de laquelle le chef du Courant patriotique libre aurait, entre autres, exprimé au secrétaire général du Hezbollah son souhait de voir l’afffaire Fakhoury close.

Amer Fakhoury fait néanmoins l'objet d'un deuxième procès intenté par d’anciens détenus de Khiam, mais il n’a pas pu comparaître en raison de son état de santé dû, selon son avocat, à une leucémie. Son procès a été plusieurs fois reporté. Il se trouvait dernièrement à l’hôpital. Selon des informations de la chaîne LBCI rapportées mardi matin, Amer Fakhoury est sorti d'hôpital après la décision de sa remise en liberté, mais il n'aurait toutefois pas quitté le territoire libanais. 

Accusé de meurtres, de tentatives de meurtre, d'enlèvements et de tortures à partir de 1985, Amer Fakhoury avait été arrêté le 12 septembre 2019, sous la pression de l’opinion publique et notamment des anciens détenus de la prison de Khiam. En 1996, il avait été condamné par contumace à 15 ans de prison pour collaboration avec Israël. Se croyant couvert par la prescription, il est rentré au pays en septembre dernier, ne s’attendant pas à ce que les autorités l’appréhendent pour d’autres crimes, notamment pour la torture et la mort d’anciens détenus, ou l’obtention présumée de la nationalité israélienne.

"Un jour triste"
Fin février, la sénatrice américaine démocrate Jeanne Shaheen, qui se mobilisait pour obtenir la libération de l’ancien responsable de l’ALS, avait annoncé avoir présenté un projet de loi bipartisan avec le sénateur républicain Ted Cruz, prévoyant des sanctions contre les responsables libanais impliqués dans la détention ou l’arrestation de tout citoyen américain au Liban. Ce projet de loi sur "la tolérance zéro pour les détentions illégales" de citoyens américains au Liban (Zero Tolerance Act) intervient "après le refus des autorités libanaises de libérer le citoyen américain Amer Fakhoury, détenu illégalement à Beyrouth depuis septembre 2019 et qui souffre d’un cancer de stade 4", avait annoncé la sénatrice dans un communiqué.

Réagissant à la remise en liberté de Amer Fakhoury, le Hezbollah a critiqué lundi soir le tribunal militaire. "Depuis le premier jour de détention de l'agent Fakhoury, les pressions et les menaces américaines ont été formulées secrètement et publiquement afin de forcer le Liban à le libérer alors que tous les crimes qui lui sont reprochés ont été prouvés (...)", affirme le Hezbollah dans un communiqué. "Dans une décision inattendue, le tribunal militaire a pris cette décision erronée, faisant fi de toutes les blessures et de la douleur (...)", poursuit le parti chiite. "Il s'agit d'un jour triste pour le Liban et la justice, et cette libération provoque une déception et une colère", affirme le Hezbollah. "Il aurait été plus honorable aux membres du tribunal militaire de démissionner au lieu de se soumettre aux pressions", estime encore le mouvement dirigé par Hassan Nasrallah. Et de conclure : "Nous appelons la justice à prendre conscience de l'atteinte portée à sa réputation et à son indépendance (...)".

Le centre de Khiam pour la réhabilitation des victimes de la torture a pour sa part affirmé que la décision de libérer Fakhoury "ne nous étonne pas. Le gouvernement et les dirigeants libanais doivent présenter leurs excuses au peuple et aux résistants". Le centre estime ainsi que la libération de M. Fakhoury est "une décision politique par excellence". Hier, le directeur du centre, Mohammad Safa, avait déclaré à l'OLJ que "la libération de l’agent Amer Fakhoury est une soumission aux pressions américaines".

Le bureau politique du mouvement Amal dirigé par le président du Parlement, Nabih Berry, a pour sa part estimé que "les crimes de Amer Fakhoury ne peuvent être effacés avec le temps (...)". Il a dit "rejeter la décision de libérer Fakhoury". "Nous y ferons face, car cette décision ne ressemble pas au Liban, à son histoire et aux sacrifices qu'il a fait". 

Le leader druze Walid Joumblatt, a, lui, critiqué le timing de cette libération. "En pleine crise sanitaire et économique, l'avocat du diable au centre du pouvoir (...) trouve la solution convenable pour libérer le traître Amer Fakhoury", critique le chef du Parti socialiste progressiste, sans dire explicitement qui il vise par ses propos. "A quoi servent toutes les nominations judiciaires et les propos sur l'indépendance de la justice, avec mon respect pour le président du Conseil supérieur de la magistrature et des juges qui ont jugé M. Fakhoury. Il s'agit d'une gorgée de poison pour la présidence", a conclu M. Joumblatt sur Twitter.




Pour mémoire
Amer Fakhoury, un dossier épineux entre Washington et Beyrouth


Le commissaire du gouvernement près la cour de cassation militaire, le juge Ghassan Khoury, s'est saisi mardi de l'affaire Amer Fakhoury et a demandé à la cour de cassation militaire de casser le jugement rendu par le tribunal militaire de première instance. Ce tribunal avait opté la veille pour la remise en liberté de l’ex-responsable de la milice pro-israélienne de l’Armée du...

commentaires (4)

HONTE DE NE PAS RESPECTER LES LOIS DU PAYS A CAUSE DES REVENCHARDS...

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 41, le 17 mars 2020

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • HONTE DE NE PAS RESPECTER LES LOIS DU PAYS A CAUSE DES REVENCHARDS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 41, le 17 mars 2020

  • Une honte pour le Liban. Une prime pour les tortionnaires au service des usa et des usurpateurs. PUBLIEZ moi svp , ne faites pas de discriminations gratuites .

    FRIK-A-FRAK

    14 h 30, le 17 mars 2020

  • Ou on amnistie tout le monde, ou on n'amnistie personne. Des chiites, des druzes furent amnistiés, pourquoi s'acharne-t-on sur le chrétien ? Voilà la vérité, toute la vérité. Comme dans toutes les guerres, malheur aux vaincus ! La justice libanaise ne doit pas être comme les justices des pays des autres... Je sais de qui je parle.

    Un Libanais

    12 h 45, le 17 mars 2020

  • Il est permis de ne pas apprécier le jugement rendu, mais que viennent faire là-dedans les deux compères Bassil et Nasrallah ? C'est ça la justice indépendante ?

    Yves Prevost

    12 h 44, le 17 mars 2020

Retour en haut