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Économie - Dette

Dette : le Liban n’a plus d’autre choix que de négocier, assure Yassine Jaber

Standard & Poor’s emboîte le pas à Moody’s en dégradant à son tour la notation souveraine du pays.

Les membres de la délégation du FMI repartent aujourd’hui aux États-Unis. Mohammad Azakir/Reuters

Après avoir retardé l’échéance pendant des années, le Liban ne semble clairement plus avoir d’autre choix que de négocier un aménagement du remboursement de sa dette publique, qui a atteint 91,6 milliards de dollars à fin décembre, soit plus de 150 % du PIB, un des pires ratios du monde derrière ceux de la Grèce et du Japon.

Ce constat, qui est loin d’être une surprise, comme en témoignent les récentes évaluations des trois principales agences de notation financière américaines – Moody’s, Fitch et Standard & Poor’s –, qui ont pris acte des conséquences de la détérioration de la situation économique et financière ces derniers mois sur la solvabilité du pays, a été notamment souligné hier par le député du mouvement Amal Yassine Jaber.

« Il ne s’agit plus simplement de décider de payer ou non la prochaine échéance d’eurobonds (1,2 milliard de dollars de titres de dette publique en devises qui doivent être déboursés le 9 mars). Le pays a presque épuisé ses réserves et doit négocier avec ses créanciers pour restructurer (diminuer les montants empruntés ainsi que les intérêts) et/ou rééchelonner (baisser les intérêts en repoussant les échéances) », a-t-il déclaré hier à L’Orient-Le Jour. Ces propos s’alignent sur la position du chef de sa formation politique, le président Nabih Berry, qui avait estimé en cours de semaine « que la restructuration de la dette (était) la meilleure solution » à la crise actuelle.



(Lire aussi : Restructuration de la dette : les cabinets Lazard et Cleary Gottlieb Steen & Hamilton LLP auraient été sélectionnés)



Minimiser les conséquences
« Il faut désormais voir si nous pouvons négocier avec nos créanciers en minimisant les conséquences légales et financières pour le pays, puis décider comment répartir les pertes entre les différents acteurs impliqués, qu’il s’agisse des détenteurs d’eurobonds, des banques, des institutions ou des citoyens », a ajouté M. Jaber. Nabih Berry, qui s’est réuni hier après-midi avec les membres de la délégation du Fonds monétaire international (FMI) arrivée en cours de semaine au Liban à la demande du gouvernement de Hassane Diab, a de son côté assuré que le pays était prêt à « mener les réformes essentielles requises dans tous les domaines, afin que l’opération de sauvetage soit un succès et que la confiance soit rétablie ». La délégation, à Beyrouth en réponse à une demande d’assistance technique du Liban, a entamé en milieu de semaine une tournée auprès des responsables libanais dans le cadre d’une visite préliminaire devant lui permettre de définir ce que le FMI pourrait fournir au Liban en matière de conseils, voire d’aides, en fonction de la réalité de sa situation économique et financière. La délégation a conclu hier sa tournée et doit rentrer aux États-Unis aujourd’hui.

Si aucune décision officielle et définitive concernant ce dossier n’a pour l’instant été annoncée, le fait que le gouvernement ait décidé, au cours de la semaine dernière, de faire appel à des cabinets internationaux pour l’assister dans l’examen technique et juridique des options disponibles ne semble plus laisser beaucoup de place au doute. Dans la foulée de l’annonce de l’appel à propositions lancé mercredi dernier, les agences Moody’s puis S&P ont d’ailleurs décidé vendredi de dégrader la notation souveraine du pays de « Caa2 » à « Ca » avec perspective « stable » pour la première, et de « CCC » à « CC » avec perspective « négative » pour la seconde.



(Lire aussi : Pour un ajustement structurel équitable)



Possibilité « virtuellement certaine »
Moody’s a justifié son troisième abaissement de la note du pays en un peu plus d’un an en estimant que le scénario d’une restructuration était devenu inévitable et présume, pour justifier sa perspective, que cette opération se fera en « coordination » avec les créanciers, sous la surveillance du programme économique du FMI.

S&P a considéré de son côté que la possibilité que le Liban restructure sa dette ou ne paye pas une prochaine échéance était « virtuellement certaine, peu importe le moment ». L’agence considère en outre que le fait que le Liban ait fait appel au FMI reflète « l’absence de volonté politique de procéder aux ajustements drastiques nécessaires » pour entamer le redressement du pays.

La classe politique libanaise est d’ailleurs la cible depuis le 17 octobre d’un mouvement de contestation qui continue de mobiliser une partie de la population.

En août 2019, S&P avait été la plus patiente des trois agences en maintenant la note du pays à « B- » alors que ses consœurs l’avaient fait passer de la catégorie « B », qui s’applique aux obligations dont la probabilité de remboursement est incertaine, à « C » pour celles sur lesquelles le risque de défaut est important, voire imminent. Enfin, mardi dernier, Fitch (qui a dégradé deux fois la notation du Liban en 2019, à « CC » ) avait jugé dans un commentaire publié à l’occasion d’un rapport plus dense sur la situation du pays qu’il était probable que le Liban se trouve contraint de procéder à une « certaine forme de restructuration » de sa dette. Elle avait notamment jugé que le pays avait « techniquement » assez de réserves pour honorer le service de sa dette en 2020 et 2021, mais que le coût très élevé de l’opération rendait cette perspective « irréaliste sur le plan politique ». Tout comme S&P, Fitch a enfin considéré que toute opération de swap sur les eurobonds dont l’objectif serait de reporter les échéances à court terme « pouvait être considérée comme une mesure de détresse » et donc sanctionnée par une nouvelle baisse de la notation souveraine du Liban.

Mais le sort de la dette publique n’est qu’une partie du problème, souligne un économiste souhaitant garder l’anonymat. « Une question tout aussi cruciale concerne le niveau réel des réserves de devises disponibles de la Banque du Liban, qui doit permettre de définir la marge de manœuvre du pays et le montant des aides qui devront être injectées. Or si la BDL a indiqué que ses avoirs en devises – qui incluent les réserves disponibles – étaient de 30,5 milliards de dollars en excluant l’or (14 milliards de dollars environ), les différentes estimations qui ont été relayées cette semaine font état d’un montant réel de 17 milliards pour certaines et de 24 milliards pour d’autres (toujours en excluant l’or) », précise-t-il.



Lire aussi

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Après avoir retardé l’échéance pendant des années, le Liban ne semble clairement plus avoir d’autre choix que de négocier un aménagement du remboursement de sa dette publique, qui a atteint 91,6 milliards de dollars à fin décembre, soit plus de 150 % du PIB, un des pires ratios du monde derrière ceux de la Grèce et du Japon.Ce constat, qui est loin d’être une surprise,...

commentaires (10)

Les citoyens sont suffisamment mis à contribution avec la dévaluation de la LL, les licenciements et les réductions de salaires. Que leur reste t il : les économies d'une vie de labeur, et les yeux pour pleurer car ils regardent leur compte en banque et ne peuvent pas en disposer. CELA SUFFIT.

Desperados

17 h 21, le 24 février 2020

Tous les commentaires

Commentaires (10)

  • Les citoyens sont suffisamment mis à contribution avec la dévaluation de la LL, les licenciements et les réductions de salaires. Que leur reste t il : les économies d'une vie de labeur, et les yeux pour pleurer car ils regardent leur compte en banque et ne peuvent pas en disposer. CELA SUFFIT.

    Desperados

    17 h 21, le 24 février 2020

  • Si tous ces voleurs faisaient rapatrier quelques millions le Liban ira mieux

    Eleni Caridopoulou

    17 h 03, le 24 février 2020

  • lES SEULS COUPABLES SONT LES PARTIS AU POUVOIR QUI SAVAIENT TRES BIEN QU'ILS PRENAIENT L'ARGENT DES CITOYENS A TRAVERS LA BDL PUIS QU'ILS APPROUVAIENT LES PROJETS DE SALAME DE PAYER PLUS D'INTERET AUX BANQUES POUR QU'ILS ACHETTENT LDES BONS DE TRESOR LIBANAIS L'ERREUR EST DE NE PAS AVOIR TOUT FAIT EN LIVRES LIBANAISES CAR ON AURAIT PU IMPRIMER DES LIVRES A VOLONTE ET RENDRE CETTE MONNAIE MOINS CHERE QU'UN TICKET DE MONOPOLY CE QUI VA ARRIVER DE TOUTE FACON EVIDEMENT LES POLITICIENS ET LES BANQUES SONT LES PREMIERS RESPONSABLE ET PAS LE EPUPLE SI QUELQU'UN DOIT PAYER CELA C'EST LA CONFISCATION DE TOUS LES BIENS DES POLITICIENS SANS EXCEPTION PUIS LA MAIN MISE DE TOUTES LES ACTIONS DES BANQUES LIBANAISES ET LEUR DISTRIBUTION AUX DEPOSANTS EN CONTRE PARTIE DES SOMMES QU'ILS DEVRONT EN FIN DE COMPTE AUSSI AVOIR A PERDRE SANS CELA C'EST LA REVOLUTION SANGLANTE QUI AURA LIEU CAR L'IMPUNITE DES POLITICIENS ALORS QUE LE PEUPLE CREVERA DE FAIM , RICHES COMME PAUVRES, EST INNACEPTABLE LA VERITE EST QUE LES POLITICIENS PRENDRONT JUSTE L'AVION POUR UNE DESTINATION INCONNUE ( OU CONNUE )ET SE MOQUERONT BIEN DE CE QUI ARRIVERA AU PAYS

    LA VERITE

    16 h 57, le 24 février 2020

  • Pourquoi toutes ces contradictions pour ne pas les appeler autrement de la part de la Banque du Liban ? Jusqu’a quand ce manque de franchise et ces pouvoirs occultes de la part d’une Institution qui avait jusqu a tout dernièrement toute l’estime et la confiance de la Nation ?

    Cadige William

    10 h 41, le 24 février 2020

  • Autant que je me souvienne, en été 2019 tous les (ir)responsables y compris le gouverneur de la BdL nous abreuvaient de déclarations affirmant que tout va bien et que les réserves en devises de la BdL garantissaient la stabilité financière du pays. Il s’avère que c’étaient des déclarations mensongères et à ma connaissances des déclarations mensongères au niveau financier sont des délits fortement punis par les lois internationales. Ces personnes doivent être traduites en justice immédiatement

    Lecteur excédé par la censure

    10 h 14, le 24 février 2020

  • LES AGENCES DE NOTATION PRESSENT LA FICELLE AUTOUR DU COUP DU PAYS. IL N,Y A PLUS D,AUTRE ALTERNATIVE QUE LA RESTRUCTURATION DE LA DETTE. IL FAUT PUNIR LES PROPRIETAIRES DES BANQUES ET LA BDL QUI FINANCAIENT LES EXCES DES GOUVERNEMENTS ET EN TOUCHAIENT LES PROFITS ET NE PAS TOUCHER AUX ECONOMIES D,UNE VIE DES CITOYENS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 39, le 24 février 2020

  • "... Il faut décider comment répartir les pertes entre les différents acteurs impliqués, qu’il s’agisse des détenteurs d’eurobonds, des banques, des institutions ou des citoyens ..." Hola! Hola! Hola! Le citoyen, un "acteur impliqué"? C’est quoi cette carabistouille encore? Et les politiciens alors? Pas acteurs ni impliqués? Merci de corriger comme suit: Détenteur d’Eurobond: acteur impliqué, victime de son avidité. Politicien Libanais: acteur impliqué, victime de son avidité et de sa soif du pouvoir. Citoyen Libanais: ni acteur ni impliqué, mais victime des deux autres. Je rajouterais victime de sa propre stupidité pour avoir choisi les seconds, mais ça c’est un autre débat...

    Gros Gnon

    07 h 27, le 24 février 2020

  • Bien sûr, si l'on veut résoudre des rixes internes pendant des mois, former un cabinet pendant des mois, choisir un nouveau cabinet pendant encore plus de mois, on se retrouve à court de mois à court d'alternative, à court de temps, et à court de Patrie... Comme disait Mao au début de sa longue marche: je suis fort, alors on prend notre temps et roupillons pour quelques mois...

    Wlek Sanferlou

    02 h 00, le 24 février 2020

  • Ce député dépend de Berri avez vous dit?? Quelques dizaines de millions d'euros que chacun de nos chers millardaires libanais pourraient "donner" ne feront que du bien au liban. Surtout qu'ils resteront toujours milliardaires... Enfin... On sait bien qu'ils n'en ont rien à cirer.

    LE FRANCOPHONE

    01 h 19, le 24 février 2020

  • Si vous ne voulez pas vous tromper devant le peuple et devant l'histoire; "ne voyez pas comment il faut répartir les pertes" mais appliquer les lois existantes, il y a un ordre prioritaire à respecter. Chaque décision qui n'est pas prévue par la loi ouvre la porte à des conflits dans les tribunaux au Liban et à l'étranger.

    Shou fi

    01 h 01, le 24 février 2020

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