Après Dalia Gebeyli, Waël Hamzé, Gilbert Hobeiche et Alaa Hussein, l’activiste Linda Boulos Makari a été interrogée hier par les services de renseignements des Forces de sécurité intérieure à Tripoli, pendant près de trois heures. L’activiste originaire de Zghorta et membre fondateur d’un groupe de révolutionnaires intitulé « Comité de la protection de la révolution » est accusée de fournir de la nourriture aux protestataires et de leur assurer un transport gratuit d’une région à une autre.
Vers 11 heures, heure prévue pour l’interrogatoire de Mme Boulos Makari, des protestataires de Tripoli et de Zghorta étaient déjà rassemblés devant le Sérail. Les manifestants scandaient en chœur les slogans de la révolution, affichant ainsi leur soutien à l’activiste. « Nous ne comprenons pas selon quelle logique l’État se préoccupe du financement des activistes qui assurent la nourriture et le transport aux révolutionnaires, alors qu’il fait fi des politiciens accusés de corruption et de vol de l’argent public », lance Ghaleb Douaihy, activiste zghortiote.
Avant de comparaître devant les agents des services de renseignements des FSI, Linda Boulos Makari a rendu visite au bâtonnier du Liban-Nord, Mohammad Mourad. Dans une déclaration à L’Orient-Le Jour, ce dernier n’a pas commenté l’affaire, mais a rappelé que l’ordre des avocats de Tripoli soutient le soulèvement populaire depuis son déclenchement le 17 octobre. « Nous œuvrons pour la protection des protestataires et des activistes depuis le premier jour du mouvement de contestation, et nous avons réussi jusqu’à présent à œuvrer en faveur de la libération de 158 protestataires arrêtés », a déclaré M. Mourad avant de poursuivre : « L’État et les responsables sont appelés à faire face à la réalité et à admettre que le paysage socio-politique du pays ne ressemblera plus jamais à celui qui prévalait avant le 17 octobre. »
Libérée vers 15h30, Linda Boulos Makari a été accueillie dans la liesse par les protestataires rassemblés depuis des heures devant le Sérail. « Dans le bureau des services de renseignements, on m’a posé des questions sur des sujets qui n’avaient rien à voir avec la réalité », raconte la jeune femme. « On m’a demandé si je collaborais avec des groupes radicaux ou si j’étais financée par les États-Unis. On m’a aussi demandé des précisions concernant mon dernier voyage à Washington en 2019, dans le cadre d’une conférence sur les chrétiens d’Orient », ajoute-t-elle.
Pour l’activiste, dont le groupe est à l’origine de l’initiative Matbakh el-Thaoura (cuisine de la révolution) à Tripoli et à Beyrouth, ces convocations « visent avant tout à terroriser les activistes, notamment les femmes, pour les décourager ». « Les services de renseignements sont surtout préoccupés par la participation de manifestants de Tripoli aux mouvements de contestation à Beyrouth, d’où leurs tentatives de les diaboliser et de montrer qu’ils sont tous des fauteurs de troubles », conclut-elle.
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"L’activiste (...) est accusée de fournir de la nourriture aux protestataires et de leur assurer un transport gratuit d’une région à une autre" Le terme "accusée" est étrange. On ne peut "accuser" quelqu'un que d'une faute. un crime. un délit..Depuis quand transporter des gens gratuitement ou leur donner de la nourriture est-il devenu un délit?
15 h 59, le 31 janvier 2020