Carlos Ghosn, ancien PDG de l’alliance Renault-Nissan a comparu jeudi devant le procureur général de la République, Ghassan Oueidate, dans le cadre de deux affaires distinctes. Il a tout d'abord été entendu dans le cadre de l'enquête sur la "notice rouge" envoyée à la justice libanaise par le bureau d'Interpol au Japon. Il a ensuite été interrogé dans le cadre de la plainte déposée contre lui la semaine dernière par trois avocats libanais qui l'accusent d'être entré en Israël en 2008, ce qui est interdit par la loi libanaise. Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), le juge Oueidate a décidé de le relâcher sous caution d'élection de domicile. L'enquête à ce sujet se poursuit, selon l'AFP.
Interrogé mercredi à ce sujet, lors d'une conférence de presse à l'Ordre de la Presse, à Beyrouth, M. Ghosn avait affirmé en substance qu'il s'est rendu en Israël en service commandé par l’Etat français, en tant que détenteur de la nationalité française et en sa qualité de patron de Renault, la compagnie automobile étant propriété de l’Etat français.
Quel risque court M. Ghosn pour avoir enfreint l’article 285 du code pénal libanais interdisant tout contact avec l’ennemi ?
Que dit la loi ?
Le Liban, qui ne reconnaît toujours pas Israël, interdit à ses ressortissants de se rendre dans ce pays voisin. L’article 285 du code pénal libanais, qui régit cette question, interdit toute visite en territoire ennemi sans autorisation préalable. Il punit les transactions commerciales entre un Libanais ou un résident au Liban avec un ressortissant ou un résident d’un pays ennemi. Cet article punit également l’entrée sur le territoire d’un pays ennemi d’un Libanais ou d’un résident arabe au Liban, sans autorisation préalable du gouvernement. Ces actes sont passibles d’un an de prison et du paiement d’une amende.
En ce qui concerne les délais de prescription des faits : trois ans pour l'entrée sur le territoire israélien et pas de délai pour les transactions commerciales.
Les binationaux n’échappent pas à ces sanctions, leur nationalité prise en compte étant la libanaise.
L’article 50 du Code de justice militaire, accorde au tribunal militaire la prérogative de juger dans cette affaire.
Par ailleurs, les interactions entre Libanais et Israéliens sont largement abordées dans une loi de boycottage d'Israël datant de 1955. Cette loi interdit à toute personne physique ou morale d'entrer en contact avec des Israéliens ou des personnes résidant en Israël. Elle interdit également tout type de transactions, commerciales, financières ou autres. Ce crime est passible de trois à 10 ans de travaux forcés.
Le cas Ghosn
Selon l’avocat Akram Azouri, "certes, les faits reprochés sont susceptibles d’être qualifiés d’infraction pénale délictuelle en application de l’article 285 du code pénal". "Toutefois, ajoute l’homme de loi, le Parquet a l’obligation, avant de mettre l’action publique en mouvement, de vérifier si les faits reprochés sont prescrits ou pas. Or, en l’espèce, et à supposer que les faits reprochés sont susceptibles d’être qualifiés selon l’article 285, l’infraction potentielle serait alors prescrite en 2011, étant donné que la visite de Carlos Ghosn en Israël remonte à 2008." "En tout état de cause, ajoute Me Azouri, toute autre qualification pénale potentielle de la visite de M. Ghosn en Israël serait également prescriptible par le délai de prescription maximal de 10 ans, échu en 2018".
Lire aussi
Procès, extradition, arrestation... Que risque l’ex-patron de Renault-Nissan au Liban ? (par Le Commerce du Levant)
Carlos Ghosn : J’ai senti que j’allais mourir au Japon
Carlos Ghosn a assuré un show sans lever les doutes, estime la presse française
Droit pénal japonais : les critiques de Ghosn, les réponses des spécialistes
Ces trois avocats sont comme trois hyenes . Ils ont eu largement le temps de mettre en lumiere ce voyage en Israel, mais ils ne le font que sur un homme a terre. Quelle honte!
19 h 05, le 10 janvier 2020