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À La Une - Liban

Devant le Parlement, des manifestants réclament un nouveau gouvernement et une justice indépendante

Des blessés lors d'échauffourées entre manifestants et forces de l'ordre, à l'intérieur d'une banque à Saïda.

Des manifestants libanais rassemblés le 2 janvier à proximité du siège du Parlement, dans le centre-ville de Beyrouth. Photo tirée de la page Facebook @HelaHelaHoPage

En ce premier jour ouvrable de l'année 2020, les manifestants libanais ont repris jeudi leur mobilisation dans la rue contre le pouvoir politique, les administrations publiques et les banques, dans le cadre de la révolte populaire inédite déclenchée le 17 octobre 2019, alors que le pays est sans gouvernement depuis plus de deux mois.

En fin d'après-midi, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés à proximité du siège du Parlement à Beyrouth, certains réclamant la formation rapide d'un nouveau cabinet. "Nous appelons le Premier ministre désigné Hassane Diab à former un gouvernement sans plus tarder afin que nous puissions juger ce nouveau cabinet", a expliqué l'un des manifestants au micro de la chaîne LBCI. D'autres criaient leur opposition totale à Hassane Diab, réclamant qu'il se récuse, et l'accusant de faire partie de la classe politique qu'ils conspuent depuis des mois. Ils ont également appelé les députés à ne pas accorder la confiance à un gouvernement qui inclurait des figures issues de la classe politique traditionnelle.

Une autre manifestante appelait à une "justice indépendante", dans un pays où même le corps judiciaire est qualifié de corrompu par de nombreux Libanais, qui reprochent aux juges d'être proches des responsables politiques.

Sous la pression de la rue, mobilisée contre les dirigeants depuis le 17 octobre, le gouvernement du Premier ministre sortant Saad Hariri avait démissionné le 29 octobre. Le 19 décembre, à l'issue de consultations parlementaires, le président Michel Aoun a désigné l'ex-ministre Hassane Diab, appuyé par le Hezbollah et ses alliés, au poste de Premier ministre. Ce dernier a promis la formation d'un gouvernement de technocrates indépendants, comme le réclament les manifestants. Mais ceux là même qui ont appuyé la désignation de M. Diab sont pour un cabient techno-politique. Selon plusieurs sources concordantes, la naissance du gouvernement pourrait intervenir en fin de semaine.


Actions ciblées

Ce jeudi a également été marqué par une série d'actions ciblées contre les administrations publiques et des banques, sur fond d'importantes restrictions monétaires. Lors d'une action contre une banque de Saïda (Sud), des échauffourées entre les manifestants et des agents des forces de l'ordre ont fait plusieurs blessés, a rapporté notre correspondant Mountasser Abdallah. 

Des dizaines de contestataires étaient entrés dans une des branches du Crédit libanais dans la capitale du Liban-Sud, vers midi, afin de faire pression pour que des clients puissent effectuer diverses opérations et retirer des fonds. Ils ont scandé des slogans contre le secteur bancaire et la corruption, selon notre correspondant. La situation commençant à dégénérer entre ces manifestants et le personnel de la banque, les forces de sécurité intérieure sont alors intervenues. Des échauffourées ont éclaté au cours desquelles plusieurs protestataires ont été blessés. Deux d'entre eux ont été transportés vers un hôpital de la ville, tandis que plusieurs autres ont été traités sur place par la Croix-Rouge libanaise. 

Plus tôt dans la journée, des tensions avaient également dégénéré en violences entre employés et clients d'une branche de la Fransabank à Nabatiyé (Liban-Sud). L'incident est survenu lorsque l'établissement a refusé aux déposants de payer certaines factures et de retirer des fonds.

Les clients des banques sont soumis à d’importantes restrictions, des plafonnements de leurs retraits en livres libanaises et de grandes difficultés pour obtenir des dollars américains. Dans ce contexte, le taux de change de la livre libanaise a grimpé en flèche auprès des changeurs, dépassant les 2000 livres ces derniers jours pour un dollar, tandis que le taux officiel observé par les banques reste stable, entre 1515 et 1520 livres pour un dollar. Ces limites provoquent régulièrement des tensions au sein des établissements bancaires. Face à ces incidents, la Fédération des syndicats des employés de banques du Liban (FSEB) a menacé jeudi d'une une grève générale si leur sécurité n'était pas assurée. 


"Protéger les consommateurs"

Des contestataires ont également tenu un sit-in symbolique devant l'Office de protection des consommateurs, organe dépendant du ministère de l'Economie, dans le centre-ville de Beyrouth, afin de protester contre les augmentations sauvages des prix dans de nombreux commerces. Ils ont appelé le ministre sortant de l'Economie, Mansour Bteich, à "tout faire pour protéger les consommateurs contre la guerre des prix et la famine" et à poursuivre en justice "les mafias" sévissant dans certains commerces.

Dès les premières heures de la matinée, des dizaines de protestataires s'étaient rassemblés malgré la pluie devant les entrées principales des ports de la capitale et de la capitale du Liban-Nord, foyers de corruption rampante, selon eux. Les contestataires ont notamment tenté de bloquer l'accès au port de Beyrouth devant les véhicules, sans succès en raison de leur petit nombre. Un des activistes présents sur place, Charbel Kahi, interrogé par la LBC, a affirmé que "la révolution n'est pas terminée, tous les jours nous mènerons de nouvelles actions". Il a souligné que le port de Beyrouth est "comme la caverne d'Ali Baba et des 40 voleurs", reprochant à l’État de ne pas agir contre la corruption au sein de cette structure. Un rassemblement similaire a été organisé devant le port de Tripoli (Liban-Nord), où des dizaines de manifestants ont scandé des slogans anti-corruption et installé une tente afin de montrer qu'ils comptent rester mobilisés sur le long terme. 

Début novembre, le procureur financier Ali Ibrahim avait engagé des poursuites contre le directeur général des douanes libanaises, Badri Daher, pour dilapidation de fonds publics.


(Lire aussi : "Comment aurais-je pu fêter le Nouvel an ailleurs que sur la place des Martyrs ?")



Le Nord mobilisé

A Tripoli également, quelques dizaines de personnes ont manifesté devant le siège de l'ordre des avocats, où se trouvait pour une conférence de presse la ministre sortante de l'Intérieur, Raya el-Hassan. Ils ont crié des slogans rejetant la désignation de Hassane Diab à la tête du futur gouvernement. A Halba, dans le Akkar (Nord), région particulièrement pauvre où les contestataires sont très actifs depuis le début du mouvement de révolution populaire le 17 octobre, les manifestants se sont rassemblés devant plusieurs administrations, qui ont toutes fini par fermer leurs portes. Par ailleurs, dans la matinée, plusieurs axes de Beyrouth et de la Békaa avaient été brièvement fermés par des manifestants qui rejettent la désignation de M. Diab.


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En ce premier jour ouvrable de l'année 2020, les manifestants libanais ont repris jeudi leur mobilisation dans la rue contre le pouvoir politique, les administrations publiques et les banques, dans le cadre de la révolte populaire inédite déclenchée le 17 octobre 2019, alors que le pays est sans gouvernement depuis plus de deux mois.En fin d'après-midi, plusieurs centaines de...

commentaires (2)

Tant que perdurera un chômage élevé, on aura toujours des clients désœuvrés pour ces manifestations qui restent légitimes du reste.

FRIK-A-FRAK

15 h 19, le 02 janvier 2020

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Commentaires (2)

  • Tant que perdurera un chômage élevé, on aura toujours des clients désœuvrés pour ces manifestations qui restent légitimes du reste.

    FRIK-A-FRAK

    15 h 19, le 02 janvier 2020

  • ET LA CONTESTATION DEVENUE REVOLUTION CONTINUE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 55, le 02 janvier 2020

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