Malgré les fêtes de Noël, la formation du futur gouvernement libanais continue à faire parler d'elle, une semaine après la désignation de l'ancien ministre et universitaire Hassane Diab au poste de Premier ministre et alors que le pays est en affaires courantes depuis près de deux mois. Le président libanais Michel Aoun a notamment déclaré que ce n'est pas le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil qui forme le futur gouvernement, exprimant l'espoir que le cabinet "qui sera composé de spécialistes" verra le jour avec la nouvelle année. De son côté, le Premier ministre désigné a poursuivi ses tractations.
A l'issue d'un entretien avec le patriarche maronite Béchara Raï, à Bkerké, après la messe de Noël, le chef de l’État a souhaité que "le gouvernement constituera le cadeau de la nouvelle année fait aux Libanais". Il a affirmé avoir rassuré le patriarche, qui s'en prend régulièrement aux responsables politiques dans ses homélies depuis le début de la révolte populaire le 17 octobre, sur le "bon déroulement des choses", notamment la résolution des crises politique et économique. Répondant aux questions des journalistes, il a démenti que ce soit Gebran Bassil, son gendre, qui s'occupe de la formation du futur cabinet. M. Bassil "est le chef du plus grand bloc parlementaire, mais en réalité, ce n'est pas lui qui s'occupe de la formation du gouvernement", a-t-il souligné.
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Gouvernement d'experts
Michel Aoun a encore souligné que la forme du futur cabinet n'avait pas encore été abordée dans les détails avec M. Diab, qu'il avait reçu mardi au palais présidentiel. Concernant la "couleur" du gouvernement, il a affirmé que celle-ci ne pouvait pas être déterminée lors de la désignation du Premier ministre, mais au cours du processus de formation. Certains observateurs estiment que, Hassane Diab ayant été uniquement nommé par les formations politiques du 8 Mars, le gouvernement à venir sera monochrome. Michel Aoun a dans ce contexte réfuté les informations de la presse occidentale, qui qualifient déjà l'équipe ministérielle de M. Diab de "gouvernement du Hezbollah". "Ce n'est pas correct. Le gouvernement sera celui de tous les Libanais et, entre autres donc, du Hezbollah", a-t-il précisé.
Il a ajouté que le futur gouvernement "ne sera pas un cabinet techno-politique", mais qu'il sera uniquement composé d'experts, revenant donc sur son intention de voir figurer dans la prochaine équipe ministérielle des figures politiques et des spécialistes.
Le président Aoun répondait notamment aux accusations lancées mardi par le Premier ministre sortant Saad Hariri, qui avait accusé le ministre sortant des Affaires étrangères d’avoir imposé le choix de Hassane Diab comme Premier ministre et de vouloir "gouverner le pays" à sa guise. Lors d'une discussion avec des journalistes, M. Hariri avait annoncé qu'il ne voterait pas la confiance au cabinet que formera Hassane Diab. Il avait assuré qu’il est hors de question qu’il revienne au pouvoir pour le moment, même en cas d’échec de Hassane Diab à former un gouvernement, sauf si M. Bassil et Michel Aoun "font preuve de modération".
Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, qui avait annoncé à l'instar de M. Hariri qu'il ne participerait pas au gouvernement Diab, a pour sa part affirmé "attendre" pour voir si le futur cabinet est, comme l'a dit le Premier ministre sortant, le gouvernement de Gebran Bassil. "Peut-être que M. Hariri a des informations à ce propos, mais nous verrons bien", a-t-il souligné.
Pendant la messe ayant précédé l'entretien de M. Aoun à Bkerké, le patriarche maronite a affirmé que "la paix ne coexiste pas avec la faim, le chômage, les privations et l'injustice, ni avec la volonté des dirigeants de vouloir réaliser leurs propres intérêts, aux dépens du bien commun". Il a appelé à une formation rapide du gouvernement et à "soutenir le Premier ministre désigné, pour que le futur cabinet formé puisse faire face aux défis que rencontre le Liban".
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Avec les deux Khalil
Des informations ont par ailleurs été rapportées mercredi selon lesquelles Hassane Diab s'est entretenu lundi soir avec le ministre sortant des Finances Ali Hassan Khalil, représentant le président de la Chambre Nabih Berry, et le conseiller politique du chef du Hezbollah Hussein el-Khalil. Selon ces informations de la chaîne de télévision locale LBC, les trois responsables ont discuté de la formation du gouvernement.
Mercredi, le Premier ministre désigné a exprimé l'espoir dans un message publié sur Twitter que "la fête de Noël dissipera les inquiétudes des Libanais et que la résolution des crises que connaît le pays arrivera très prochainement".
S'exprimant également sur le sujet, le métropolite grec-orthodoxe Élias Audi a pour sa part critiqué les responsables politiques "qui ne se préoccupent que de leur propre salut et qui, au lieu de chercher à réchauffer les cœurs des citoyens en leur octroyant les droits les plus élémentaires, ne veulent que réchauffer leurs propres sièges qu'ils craignent de perdre". Les dirigeants "sèment la peur d'un effondrement économique, social et financier", a-t-il encore dénoncé.
Dénonçant la corruption et l'incompétence de la classe politique, mais aussi une détérioration continue des conditions de vie, des centaines de milliers de libanais battent le pavé dans tout le pays depuis le 17 octobre. Les manifestants veulent des mesures rapides pour redresser l'économie, mais refusent que les plus démunis en payent le prix, dans un pays où un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale. Le pays connaît aussi une crise de liquidités qui menace les importations et a entraîné une hausse des prix.
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commentaires (16)
PRIERE LIRE NON TREMPE COMME D,AUTRES AILLEURS DANS DES COMBINES ETC... MERCI.
LA LIBRE EXPRESSION
09 h 09, le 27 décembre 2019