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Liban - Reportage

Retour sur la « nuit d’horreur », quartier Monnot...

Dans le centre-ville, les tentes saccagées ont déjà été remontées et les conférences ont repris, quelques heures après l’intervention des casseurs.

Un jeune lance des pierres sur les manifestants, hier à Beyrouth. Mohammad Azakir/Reuters

Les habitants du quartier Monnot, à Beyrouth, étaient sous le choc hier matin en constatant les dégâts d’une nuit de terreur au cours de laquelle des centaines de jeunes surexcités ont envahi leur quartier, après de graves heurts avec des manifestants du soulèvement populaire, sur le ring Fouad Chehab, au voisinage immédiat du quartier.

C’est vers 3h45 du matin que des centaines de casseurs, très vraisemblablement proches ou affiliés au Hezbollah et au mouvement Amal, ont déferlé rue de l’Église Saint-Joseph, quartier Monnot, après avoir sévi pendant plusieurs heures sur la voie express du Ring. Jusqu’à 5h du matin, ils ont terrorisé les habitants du quartier, brisant les vitres et cabossant plusieurs véhicules stationnés dans la rue, et allant même jusqu’à incendier l’un d’eux. Non contents de fracasser les vitres des véhicules à l’arrêt avec de grosses pierres ramassées dans un terrain vague, ils ont pris l’escalier de certains immeubles du quartier et frappé sauvagement aux portes, provoquant la panique des habitants.

« Des dizaines d’hommes ont pénétré dans notre immeuble et ont donné des coups de pied à la porte d’entrée. Mes enfants et ma femme ont commencé à crier, raconte à L’Orient-Le Jour un habitant du quartier, sous couvert d’anonymat. On leur a demandé de partir, on leur a dit qu’on ne voulait pas riposter à leurs actions. Ils sont redescendus mais ont brisé les vitres de ma voiture au passage », ajoute-t-il, tout en balayant les éclats de verre.

« Il y avait environ 400 personnes dans la rue, des adolescents pour la plupart. Ils ont arraché les pavés du trottoir pour les jeter sur l’armée ; plusieurs militaires ont été blessés, explique ce commerçant de 50 ans qui dit être né dans le quartier. Nous avons passé une nuit d’horreur. Nous sommes pacifiques, je ne comprends pas cette violence ni ce qu’ils voulaient », ajoute-t-il. Dans un parking adjacent à la Bibliothèque orientale, certaines voitures ont des vitres cassées. Le parpaing qui a servi à cabosser la carrosserie de l’un des véhicules gît encore par terre, à côté de la voiture qui en a fait les frais. Des débris de bouteilles sont visibles sur le sol ainsi que sur les véhicules endommagés. Sur les murs de la rue, dont certains restaurants ont eu les vitrines brisées, les casseurs ont écrit en lettres noires « Hezbollah » et « Amal ».

Contactée dans la nuit de dimanche à lundi par L’Orient-Le Jour, Rana Sahili, responsable adjointe des relations médias du Hezbollah, n’a pas confirmé qu’il s’agissait de partisans du parti. « Nous n’avons rien à voir avec cela. Ce sont des gens qui font partie du peuple. Aucune décision n’a été prise (par le parti) d’envoyer ses hommes à la rue », a-t-elle dit. « Ce qui s’est passé hier sur les routes doit être condamné », a pour sa part déclaré Nabih Berry, chef du Parlement et leader d’Amal, selon des propos rapportés par l’Agence nationale d’information (ANI, officielle).



(Lire aussi : Le nécessaire parallèlel'édito de Michel TOUMA)



« Les pierres pleuvaient sur nous »
Avant les actes de vandalisme à Monnot, les heurts avaient commencé de manière sporadique dimanche soir au niveau du Ring, où des manifestants bloquaient la route. Ils ont ensuite pris une tournure violente à partir de 23h30, selon des militants qui étaient présents sur place.

« Nous étions installés sur le Ring, dans une ambiance pacifique et festive. Beaucoup de manifestants étaient venus en famille, avec des enfants en bas âge, raconte à L’OLJ Van Meguerditchian, militant de 32 ans. Des hommes sont ensuite arrivés pour nous dire qu’ils allaient donner une leçon à ceux qui oseraient critiquer le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Ils ont même invité les gens qui comptaient le faire à quitter le pays », ajoute-t-il.

« Vers 23h30, des centaines de personnes ont commencé à affluer sur la voie du Ring à bord de motos. Ils étaient munis de pierres et de bâtons. Les pierres pleuvaient sur nous, de tous les côtés. Il y a eu au moins 20 blessés de notre côté. Aucune réaction des forces de sécurité pendant ce temps-là », déplore le militant. Selon lui, les services de sécurité ne sont intervenues que vers 3h du matin, en lançant des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants, après avoir été elles-mêmes agressées par les casseurs.

Un peu plus loin, la place des Martyrs offrait hier matin un spectacle de désolation, avec ses tentes saccagées et des détritus partout sur le sol. Mais les tentes ont été à nouveau dressées dans l’après-midi, dans une volonté des manifestants de montrer leur détermination à ne pas quitter la rue. Des tables rondes et des groupes de discussion étaient organisés hier soir, dans le parking des Lazaristes, non loin de la place Riad el-Solh, et plusieurs militants ont affiché leur détermination à passer la nuit sous la tente à nouveau.



(Lire aussi : Incidents du Ring : le Hezbollah envoie des messages sans les signer)



« Qu’ils se réveillent... »
Des militants présents dans la tente du parti Sabaa confient avoir reçu des menaces la veille, ainsi que d’autres activistes. « Une des manifestantes nous a indiqué avoir reçu un message (dimanche) demandant que les tentes soient démantelées, sinon les chemises noires (du Hezbollah) menaçaient d’attaquer », raconte une membre de Sabaa à L’OLJ, sous couvert d’anonymat.

Un manifestant de 41 ans, originaire de la Békaa, et qui dit avoir été témoin des attaques perpétrées dans la nuit, critique l’utilisation du slogan « chiite, chiite, chiite », scandé par les casseurs. « Si d’autres se mettent à crier sunnite ou chrétien, on va droit vers la guerre civile. Qu’ils se réveillent pour qu’on n’arrive pas à ça. Nous en voulons aux hommes politiques mais pas au peuple. Pourquoi, au moindre problème, on parle de confessions ? » dit-il à L’OLJ.Place Riad el-Solh, une banderole représentant Jeffrey Feltman, ancien ambassadeur des États-Unis au Liban, a été déroulée dimanche sur la façade du Grand Théâtre, rappelant aux passants que la récupération politique du mouvement n’est pas à exclure. « Laisse-nous tranquilles », est-il écrit en arabe, dans des termes crus en référence à une phrase prononcée par Hassan Nasrallah dans un de ses discours. La bannière porte la signature d’un groupe inconnu appelé Ou’a (réveille-toi).

Sur sa page Facebook, le groupe se présente comme « non partisan et non confessionnel » et dénonce « l’ingérence » des États-Unis et de M. Feltman. Il demande également que l’on fasse la différence entre les responsables corrompus et ceux qui ne le sont pas, en critique du « Tous, ça veut dire tous », scandé par les manifestants depuis le début des protestations. Interrogé par L’OLJ, un militant de la société civile dit penser qu’il s’agit d’un groupe proche du Hezbollah.Dimanche, plusieurs dizaines de personnes proches de la mouvance du Hezbollah et de la gauche avaient manifesté près de l’ambassade des États-Unis à Aoukar, pour protester contre les « ingérences étrangères » et notamment américaine au Liban, s’en prenant particulièrement à M. Feltman en raison de sa dernière analyse de la situation au Liban devant le Congrès.

« Une grande inquiétude »
Par ailleurs, l’ancien député Michel Pharaon a effectué une tournée dans le quartier de Monnot hier, afin d’inspecter les dégâts. Commentant l’agression contre les manifestants pacifiques, il a estimé que « si l’objectif était de terroriser les habitants, cet objectif a été atteint ». « Mais même si l’inquiétude règne, elle ne suffira pas à mettre un terme à la révolte, étant donné la détermination de la population, a-t-il ajouté. Nous demandons l’identification des agresseurs à qui il faudra demander des comptes. »



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commentaires (2)

LES MEMES VOYOUS CASSENT ET BRULENT PARTOUT. TELS SONT LEURS MOEURS ET LEURS HABITUDES.

LA LIBRE EXPRESSION

14 h 36, le 26 novembre 2019

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Commentaires (2)

  • LES MEMES VOYOUS CASSENT ET BRULENT PARTOUT. TELS SONT LEURS MOEURS ET LEURS HABITUDES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 36, le 26 novembre 2019

  • On va de vive allure à une 2eme guerre civile… Il y a quelques années des surexcités sunnites envahissaient Achrafieh pour une caricature, maintenant c'est le tour des surexcit

    Fadi Chami

    08 h 00, le 26 novembre 2019

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