L’entretien du Premier ministre sortant, Saad Hariri, avec le chef du CPL, Gebran Bassil, le premier depuis le début du soulèvement le 17 octobre, a constitué hier une petite brèche dans l’immobilisme politique qui n’a que trop duré.
La réunion de près de quatre heures, entrecoupée d’un déjeuner, s’est tenue loin des feux de la rampe. Elle a été rendue possible grâce à une médiation du directeur de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, qui aurait convaincu Gebran Bassil de se rendre lui-même à la Maison du Centre, alors que ce dernier prévoyait de dépêcher une délégation du CPL auprès du Premier ministre sortant.
De sources proches du chef du CPL, on s’est contenté de mettre l’accent sur le caractère « positif » des échanges, dont les résultats devraient apparaître « dans les heures à venir ». Les tractations sont cependant loin d’être finies, bien que les concertations officieuses sur les différents scénarios de sortie de crise – qui ne feraient pas perdre leurs acquis aux principales parties politiques, désavouées par une foule qui appelle à la chute d’un système politique verrouillé et sclérosé – se soient intensifiées avec la démission de Saad Hariri, il y a une semaine.
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Ces concertations devraient normalement déboucher sur le lancement des consultations parlementaires contraignantes pour la nomination d’un nouveau Premier ministre qui sera chargé de former un gouvernement dont la nature reste encore à définir. Le principe d’un recours à des spécialistes dans la nouvelle équipe ministérielle est acquis, mais on en est toujours à discuter de la place qu’il faudra leur accorder dans un cabinet dont on continue à dire qu’il sera techno-politique, c’est-à-dire composé de personnalités qui veilleront au maintien des orientations politiques de l’exécutif aux côtés de celles qui seront chargées des dossiers techniques. Devant Gebran Bassil, Saad Hariri a répété hier qu’il reste déterminé, si jamais il est nommé pour diriger la nouvelle équipe ministérielle, à former un gouvernement neutre, sans figures parlementaires, de nature à inspirer confiance au peuple et à la communauté internationale, dont les vœux se recoupent finalement, et qu’il n’est pas question pour lui d’accepter d’être nommé sous conditions.
L’argumentation du chef du CPL reste la même, à savoir que la conjoncture actuelle commande la présence de politiques, voire de députés au sein du gouvernement, étant donné que des décisions engageant le sort du pays devraient être prises. Mais pour M. Hariri, cet argument ne tient pas la route, puisque ce genre de décisions est de toute façon pris au Parlement.
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Un décalage énorme
Entre la foule massive de contestataires – au nom desquels Saad Hariri s’exprime paradoxalement – et le pouvoir en place, le décalage reste ainsi énorme, la majorité que représente le tandem CPL-Hezbollah étant apparemment déterminée à concéder aux manifestants juste de quoi, selon le tandem, apaiser leur colère, sans que son emprise sur la vie politique n’en soit ébranlée.
À Baabda où l’on continue de miser sur le facteur temps, arguant de l’absence de textes constitutionnels fixant un délai déterminé au chef de l’État pour engager les consultations parlementaires contraignantes, on indique, de sources politiques, que le président Michel Aoun soutient toute formule fédératrice devant favoriser la naissance d’une nouvelle équipe ministérielle. Par ailleurs, Baabda justifie le retard dans le lancement des consultations parlementaires par la nécessité d’assurer « un climat politique propice » afin de garantir le succès des consultations en cours.
En d’autres termes, il faut qu’un consensus se dégage sur la nature et la composition de la nouvelle équipe ministérielle avant que Michel Aoun ne convoque les députés pour les consultations d’usage qui seraient de pure forme.
De sources politiques proches de Baabda, on confirme cette tendance en soulignant que la personnalité qui sera chargée de former la nouvelle équipe ministérielle sera elle-même un signe indicateur de la nature du nouveau gouvernement. Concrètement, cela signifie que la nomination de Saad Hariri pour diriger le deuxième gouvernement du mandat Aoun reste tributaire de sa volonté de « retrouver le CPL et le Hezbollah à mi-chemin » et de s’engager à suivre une politique étant, au plan stratégique, dans le prolongement de celle du gouvernement démissionnaire, qui assurait au Hezbollah la couverture politique dont il a besoin face aux pressions internationales croissantes.
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commentaires (17)
QUAND CERTAINS PIEDS-NUS SONT -NOMMES- MINISTRES, OBTIENNENT DE CERTAINS PAYS DES CONTRATS DE PETROLE AU NOMS DE SOCIETES OFSHORE DIVERSES, DEVIENNENT DES PROPRIETAIRES DE VILLAS, DE TERRES, DE YACHTS, D,AVIONS PRIVES ETC... IL NE FAUT PAS TROP CHERCHER ! LA CORRUPTION ET LA POURRITURE CRIENT A HAUTE VOIX.
LA LIBRE EXPRESSION
20 h 50, le 05 novembre 2019