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Économie - Monnaie

Importations de blé, de carburant et de médicaments : mode d’emploi du mécanisme de la BDL

Le processus oblige les distributeurs concernés et leurs banques à faire valider leurs commandes par la BDL.

Un bureau de change, à Beyrouth. Joseph Eid/AFP

Alors que le marché libanais compose depuis quelques semaines avec une baisse de la quantité de dollars circulant sur le marché, la Banque du Liban a présenté hier, comme elle l’avait annoncé, un nouveau mécanisme devant réguler le financement des importations de blé, de médicaments et de carburant – essence, mazout et gaz.

La circulaire (n° 530 datée, publiée lundi, mise en ligne hier et qui concerne les lettres de crédit) propose une solution aux professionnels des filières concernées qui sont obligés de régler leurs marchandises en dollar mais qui encaissent une partie plus ou moins importante de leurs recettes en livre libanaise. Les syndicats de distributeurs de carburant ainsi que le rassemblement des minotiers du pays étaient montés au créneau ces dernières semaines pour pointer du doigt les difficultés qu’ils avaient à convertir leurs livres au taux officiel, fixé par la BDL depuis 1997 – à raison de 1 507,5 livres pour un dollar.

Si ce taux est toujours en vigueur officiellement, l’accès au dollar, qui circulait relativement librement jusqu’ici, est en effet de plus en plus compliqué, que ce soit à cause des limites de retraits imposées par les banques (où il se négocie aux environ de 1 515 livres) ou de sa disponibilité chez les cambistes qui le vendaient à plus de 1 600 livres la semaine dernière. L’objectif de la circulaire n° 530 dans ce contexte est donc de réduire la demande de dollars sur le marché en offrant une alternative aux importateurs de ces trois catégories de marchandises dont le maintien de l’approvisionnement reste vital pour le pays.


(Lire aussi : Moody’s adresse un ultimatum aux dirigeants libanais)



Rémunérations sur les sommes bloquées
Concrètement, le mécanisme va désormais obliger les distributeurs concernés et leurs banques à obtenir l’accord de la BDL pour pouvoir valider leurs commandes :

• L’importateur concerné va d’abord adresser les détails de sa demande (quantité, montant, catégorie) à sa banque, en lui fournissant plusieurs justificatifs attestant de son contrat avec son fournisseur – précédentes factures, connaissements (document de transport maritime, pouvant être considéré comme la preuve du contrat), lettres de crédit, etc. Le nombre de documents devant être fournis ou la période couverte n’ont pas été explicités dans la circulaire.

• La banque notifie la BDL qui va ouvrir un compte spécifique sur lequel seront placées : une somme en dollar correspondant à 15 % minimum du montant total de la commande concernée qui fera office de garantie, et une autre somme en livre (au taux officiel plus la marge autorisée des banques) équivalant à la totalité du montant en dollar demandé pour régler la commande. Donc pour une commande de 10 000 dollars, le client devra accepter de bloquer 1 500 dollars et un peu plus de 15 millions de livres.

• Saisie des documents, la BDL valide ou non la demande selon des critères qui n’ont pas été spécifiés par la circulaire. Selon une source bancaire contactée par L’Orient-Le Jour, ces critères sont la moyenne commandée par un distributeur donné lors des années précédentes ; ou encore la conformité du profil du distributeur et/ou du fournisseur par rapport à la réglementation bancaire en matière d’évasion fiscale, de lutte contre le blanchiment d’argent et de financement du terrorisme pourrait entrer en ligne de compte.

• En cas d’accord, la BDL débloque le montant en dollar demandé pour le transférer, ensuite, à la banque du distributeur. La Banque centrale impose en outre une commission de 0,5 % sur chaque opération (50 dollars pour un montant de 10 000). Cette commission devrait être à la charge du client, même si la circulaire ne le spécifie pas, selon la source contactée. La date de règlement est fixée par la BDL et le compte est supprimé dès que la transaction est finalisée.

• La circulaire précise enfin que la BDL s’engage à rémunérer, à des taux qu’elle n’a pas précisés, les sommes bloquées pendant plus de 30 jours. Selon la source précitée, ces intérêts seraient reversés au distributeur (et non à la banque) et pourraient s’appliquer à toutes les sommes bloquées – en livre et en dollar. « Le blocage de certains montants pendant un mois est quelque chose de courant pour les distributeurs de carburant », justifie la source bancaire interrogée.



« On doit être positif »
La publication des détails de ces mécanismes a suscité certaines critiques de la part des professionnels des filières concernées. « Certains d’entre eux, distributeurs de carburant ou minotiers, ne sont pas enchantés de devoir payer une commission de 0,5 %, mais c’est surtout le fait que la commande doive être validée par la BDL et la prolongation très probable du délai des transactions qui angoissent certains distributeurs », indique un autre banquier. Il souligne en outre que la mise en place de cette procédure dans une économie où le dollar circulait librement jusqu’ici crée un précédent, sans toutefois vouloir croire en la possibilité que d’autres secteurs puissent être concernés à l’avenir. Les syndicats des distributeurs, qui avaient pris connaissance des grandes lignes du mécanisme en fin de semaine dernière, ont salué la publication de la circulaire dans un communiqué hier soir en estimant néanmoins que les sociétés concernées devaient désormais étudier le mécanisme en détail pour vérifier sa viabilité par rapport aux impératifs de leur filière. Ils ont également estimé que les marchandises qui avaient été réglées avant la publication de la circulaire seraient revendues aux conditions et prix qui étaient alors en vigueur, c’est-à-dire en tenant compte de l’inflation du prix du dollar chez les cambistes.

Le syndicat représentant l’industrie pharmaceutique locale – et qui commercialise également des médicaments importés – a, lui, accueilli positivement la publication de la circulaire. « L’adoption de ce mécanisme est une bonne chose, mais il reste certains points à clarifier. Nous espérons avoir des précisions dans les prochains jours pour pouvoir nous projeter », a ainsi indiqué à L’Orient-Le Jour la présidente de ce syndicat, Carole Abi Karam. Le rassemblement des minotiers ne s’était pour sa part pas exprimé hier soir.


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commentaires (3)

Il est évident que la volonté est de limiter et diminuer au maximum la circulation du dollar. Ces mesures et conditions ne sont certes pas très contraignantes pour les importateurs honnêtes de ces matières mais décourageantes vu les délais que chaque opération prendra dorénavant. Des consignes venant de l'extérieur. Tant mieux si ça puisse sauver le secteur davantage de sanctions

Elie H

17 h 41, le 02 octobre 2019

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Commentaires (3)

  • Il est évident que la volonté est de limiter et diminuer au maximum la circulation du dollar. Ces mesures et conditions ne sont certes pas très contraignantes pour les importateurs honnêtes de ces matières mais décourageantes vu les délais que chaque opération prendra dorénavant. Des consignes venant de l'extérieur. Tant mieux si ça puisse sauver le secteur davantage de sanctions

    Elie H

    17 h 41, le 02 octobre 2019

  • pourvu qu'ils fassent gaffe aux SUR- importations en vue de profiter des circonstances qui leur permettraient de "" re-exporter"" vers la syrie soeur a nos depends , aux depends de notre economie .

    Gaby SIOUFI

    13 h 12, le 02 octobre 2019

  • MESURES PAS TRES CORRECTES. LE CONNAISSEMENT OU DOCUMENT DE TRANSPORT MARITIME... DIT BILL OF LADING... PEUT ETRE OBTENU MEME SI LA MARCHANDISE N,EST PAS CHARGEE SUR UN BATEAU. FAUT DEMANDER TOUS LES AUTRES DOCUMENTS EN MEME TEMPS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 01, le 02 octobre 2019

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