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Lifestyle - Mode

La mode, pacte et impact

Au mois d’avril dernier, à l’occasion du Fashion Summit de Copenhague, le président Emmanuel Macron avait confié à François-Henri Pinault, président du groupe Kering, la mission de réunir une coalition de marques déterminées à agir de manière à rendre l’industrie de la mode plus éthique et moins toxique pour l’environnement.

Capsule Salvatore Ferragamo en ®Orange Fiber.

À tout seigneur tout honneur, la France, pays phare de la mode mondiale, s’est engagée la première à réduire l’impact de pollution d’une industrie qui compte parmi les plus désastreuses pour la planète, émettant des milliards de tonnes de gaz à effet de serre, près du tiers de la pollution chimique de l’eau, de l’usage de pesticides et des rejets de microplastiques. Trente grands groupes de mode détenant 147 marques se sont finalement joints à l’initiative Kering, entre enseignes de luxe et mode de masse. Ces acteurs ont confirmé leur engagement au « Fashion Pact » présenté à Biarritz dans le cadre du sommet du G7. À travers ce pacte, les signataires promettaient d’atteindre « zéro émission nette de CO2 d’ici à 2050 et 100 % d’énergies renouvelables d’ici à 2030 ». Voilà qui annonce des changements radicaux dans l’industrie de la mode qui va s’orienter de plus en plus vers des textiles et matériaux alternatifs, notamment liés aux déchets de l’industrie agro-alimentaire, pommes recyclées, fibres de pulpe d’orange et résidus de jus d’agrume pour les nouvelles soies, mais aussi fibres d’ananas, peau de poisson ou champignons pour les nouveaux cuirs. Mieux, le recyclage a de beaux jours devant lui avec de plus en plus d’opérations de récupération de vêtements usagés et une tendance à reconvertir ce qui existe en débridant la créativité au niveau mondial pour le plus grand bonheur des millenials.

Valorisation de la fripe

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la diminution des ressources en Europe avait donné naissance à une mode inventive. Les surplus militaires étant, en matière de vêtements, les plus faciles à trouver, les femmes ont adopté les premiers trenchs et manteaux retaillés, réutilisé de vieux rideaux, comme dans The Sound of Music, pour en confectionner des robes et même osé le tuxedo, comme Marlene Dietrich. Le bas nylon étant le graal des filles gâtées, les autres tracent une couture au crayon à l’arrière de leurs jambes. Les souliers ont des semelles de bois et de liège, le caoutchouc des pneus usés sert au ressemelage. On est encore dans une ère où rien ne se perd, mais cela ne saurait tarder. Déjà l’industrie s’emballe et le textile, au même titre que d’autres richesses, donne lieu à des cités ouvrières qui s’organisent autour des usines, sur le modèle de Ford, rassemblant toutes les forces humaines au service de la production.

La jeunesse des années 1960 voit déjà venir le problème de la production de masse et d’un nouveau conditionnement des modes de consommation, orientés vers le gaspillage, le remplacement rapide des biens, la stimulation d’un désir sans fin, d’une valorisation de l’accumulation comme signe de réussite sociale, entraînant compétition. Déjà, les jeunes Européens écument à nouveau les surplus militaires et les marchés de fripes, réinventent leur style, transforment le vêtement en manifeste politique et social et font de la mode une révolution au plein sens du terme : le retour d’un cycle jusqu’à l’épuisement.

La fripe rebaptisée « vintage » depuis quelques années n’est rien d’autre qu’un pied de nez à la mode de masse, mais celle-ci n’est pas dupe, véritable Léviathan polymorphe qui simule les anciens/nouveaux codes pour mieux les récupérer.

Les nouveaux textiles

Créer de nouveaux textiles d’origine végétale est louable, mais c’est oublier les pesticides et les soucis d’irrigation dans un contexte planétaire où les ressources en eau diminuent. Aussi les recherches s’orientent-elles plutôt vers les plantes peu gourmandes en eau et surtout la récupération des déchets de l’industrie agroalimentaire. On retiendra parmi les champions de cette tendance la société italienne Orange Fiber qui récupère les pulpes d’agrume des usines de jus pour les transformer en textiles. La première collaboration en ce sens a eu lieu en 2017 avec la marque Salvatore Ferragamo qui a produit une capsule de twin-sets et foulards à base de ce nouveau matériau.

La créatrice Stella McCartney, qui a hérité de sa mère un combat sans merci contre la violence faite aux animaux et en faveur d’une reconnaissance du droit de ces derniers à une exploitation éthique, se fait fort depuis qu’elle a créé sa marque éponyme de n’utiliser que des cuirs végétalisés. La fibre de certains ananas, par exemple, enregistrée sous le label ®Pinatex, utilise une variété d’ananas impropre à l’alimentation mais durable et peu gourmande en eau. Elle produit un matériau proche de la texture et de la solidité du cuir. À part l’agroalimentaire, c’est évidemment le recyclage des plastiques existants qui occupe désormais l’industrie textile. Ainsi, de nombreux articles de luxe sont désormais fabriqués à partir de la récupération de plastiques transformés en fibres, notamment dans les équipements de sport. Il est clair qu’une nouvelle phase est amorcée dans notre façon de nous habiller, loin du mimétisme débilitant et au plus près du respect de l’environnement. 


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commentaires (1)

Je ne suis pas certain si un manteau en peau de poisson ou de pommes recyclées m'irait bien. C'est aussi une question de valoriser le 'savoir faire' des traditions et les materiaux classiques ... comme la laine de mouton que nous portons et que nos ancèstres portaient mais c'est une question de coût que malheureusement les produits dérivées chimiques sont plus bon marché que des materiaux précieuses naturelles.

Stes David

14 h 24, le 25 septembre 2019

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Commentaires (1)

  • Je ne suis pas certain si un manteau en peau de poisson ou de pommes recyclées m'irait bien. C'est aussi une question de valoriser le 'savoir faire' des traditions et les materiaux classiques ... comme la laine de mouton que nous portons et que nos ancèstres portaient mais c'est une question de coût que malheureusement les produits dérivées chimiques sont plus bon marché que des materiaux précieuses naturelles.

    Stes David

    14 h 24, le 25 septembre 2019

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