Il ressort des points de vue exprimés au cours de cette simulation – basés sur des informations plus que sur l’analyse – qu’une confrontation généralisée et totale à grande échelle paraît peu probable. Telle était du moins la perception avant les événements du week-end dernier. Des attaques ponctuelles et des ripostes limitées dans l’espace et dans le temps sont par contre très possibles. Et dans ce cas de figure, l’Iran n’interviendrait pas directement et ne reconnaîtrait jamais sa responsabilité dans d’éventuels attentats mais mettrait plutôt ses instruments locaux sur le devant de la scène. En clair, le régime des mollahs préférerait mener une guerre d’usure par le biais de ses partenaires plutôt que de s’engager directement dans une bataille. En bon apprenti, le Hezbollah adopte d’ailleurs la même tactique sur la scène libanaise : le plus souvent il ne monte jamais lui-même au créneau, mais laisse ses alliés faire le « sale boulot » pendant qu’il adopte, lui, un profil bas.
Cette approche pernicieuse de la part de la République islamique mise sur les houthis au Yémen, la milice dite de « la mobilisation populaire » (al-Hachd el-Chaabi) en Irak, le Hamas et le Jihad islamique à Gaza, et évidemment le Hezbollah au Liban, toutes ces organisations formant ensemble (avec le régime Assad) une structure transnationale que les gardiens de la révolution peuvent télécommander à leur guise.
Les conséquences sur le pays du Cèdre sont évidentes. « Nous sommes sur la même barricade que Khamenei qui est notre commandant et notre autorité de référence », lançait, en substance, le leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dans son discours pour la commémoration de la Achoura. Il devait aller jusqu’à affirmer que si l’Iran était la cible d’une attaque, c’est toute la région qui s’embraserait. En clair, ce sont toutes les têtes de pont des pasdaran qui entreraient en action, du Yémen au Liban, en passant par l’Irak, le Golan et la bande de Gaza. « Cette menace est proférée dans un objectif uniquement dissuasif », affirmera toutefois l’intervenant représentant le Hezbollah lors du séminaire de Bickfaya. Une menace qui serait donc virtuelle, mais qui illustre quand même à quel point le Liban reste pris en otage par le parti chiite pour assouvir les visées expansionnistes de Téhéran, avec en filigrane la défense acharnée du régime sanguinaire du tyran de Damas, Bachar el-Assad.
Mais dans ce contexte régional en équilibre instable, c’est principalement la situation à la frontière sud qui préoccupe pour l’heure les Libanais. Et à cet égard, Hassan Nasrallah a fait montre ces derniers jours d’un manque de cohérence dans ses prises de position – du moins en apparence. Pris dans le feu de l’action à la suite de « l’escalade contrôlée » face à Israël, il proclamait solennellement que les « lignes rouges » n’existent plus, ce qui signifie un torpillage pur et simple de la résolution 1701. Il devait toutefois sans tarder rectifier le tir en précisant que c’est dans le seul cas où Israël attaquerait le Liban (ou précisément le parti chiite) que les lignes rouges tomberaient. Et pour rassurer encore plus, toujours en apparence, la communauté internationale, il soulignera que le Hezbollah respecte la 1701, d’autant qu’il fait partie d’un gouvernement qui s’en tient à la résolution onusienne.
Un tel engagement de la part du parti de Dieu à ne pas violer la 1701 devrait en principe rassurer quelque peu les Libanais. Sauf que l’on se souvient encore qu’à la fin du mois de juin 2006, lors d’une conférence de dialogue national, Hassan Nasrallah avait souligné la nécessité de maintenir le calme au Liban-Sud et d’éviter toute action qui risquerait d’être exploitée par Israël pour provoquer une escalade avec le Liban. Quelques jours plus tard, un commando du Hezbollah franchissait, le 12 juillet 2006, la frontière sud pour effectuer une opération en territoire israélien, provoquant ainsi une guerre destructrice (pour le Liban) qui durera 33 jours…
Une petite phrase de Nietzche – qui s’applique souvent dans la vie courante et professionnelle – peut résumer parfaitement les assurances du Hezbollah concernant la 1701 : « Ce qui me bouleverse, ce n’est pas que tu m’aies menti, c’est que désormais je ne pourrai plus te croire. »
commentaires (7)
La petite phrase de Nietzche peut dans le contexte actuel s'appliquer à Monsieur Trump qui provoque les gens de tous les côtés , et puis se retire calmement laissant la place au chaos .
Esber
22 h 46, le 17 septembre 2019