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Santé - Commentaire

Le pouvoir de sauver des vies grâce à l’éducation sexuelle

Chaque jour, dans le monde, 20 000 jeunes filles de moins de 18 ans donnent naissance à un enfant. Photo Bigstock

Lorsque j’étais encore une élève aux yeux pétillants en classe de quatrième dans ma ville natale du Sri Lanka, j’étais très impatiente d’assister à mon premier cours d’éducation sexuelle. Au début de notre adolescence, mes camarades de classe et moi-même étions curieux concernant le sexe et la sexualité, même si nous n’y connaissions absolument rien. La déception fut aussi grande que l’étaient nos attentes. Au lieu de recevoir des réponses fiables à nos questions pressantes sur nos corps, les relations et la sexualité, nous nous sommes vu remettre un livre. Il nous a été demandé d’en lire un chapitre en particulier, avant d’être laissés à nous-mêmes et à nos questions.

Des millions de jeunes dans le monde entier vivent de pareilles expériences, dont les conséquences sont, souvent, néfastes.Tout comme il serait irresponsable de donner à un enfant une voiture de sport sans lui apprendre à conduire, il est dangereusement négligent de laisser le corps des jeunes se développer plus rapidement que leur compréhension de la sexualité et du sexe. Le manque d’informations fiables augmente le risque d’infections sexuellement transmissibles (IST) – y compris le VIH – et de grossesses précoces, qui non seulement peut coûter la vie à la mère, à l’enfant ou aux deux, mais risque également de perpétuer la pauvreté de génération en génération.

Même pour les personnes qui ne sont pas sexuellement actives, la compréhension des changements qui se produisent dans leur corps est essentielle à la protection de leur santé et de leur bien-être. Dans de nombreux milieux, les filles qui ont leurs premières règles ne comprennent pas ce qui leur arrive, ce qui les laisse non préparées pour protéger leur santé et leur hygiène. Souvent, elles ressentent une vive honte au sujet d’un processus parfaitement naturel.

Ce manque d’informations – auquel s’ajoute l’absence de produits sanitaires salubres et d’espaces privés pour les utiliser – conduit souvent les filles et les jeunes femmes à s’absenter de l’école durant leurs menstruations. Les tabous culturels qui interdisent aux femmes et aux filles l’accès aux lieux publics (y compris les lieux de culte) lorsqu’elles ont leurs règles ou même qui les forcent à vivre à l’extérieur de leur domicile (y compris dans des conditions climatiques extrêmes) parce qu’elles sont « impures », aggravent leur sentiment de honte et les risques connexes pour la santé.On ne saurait reprocher aux jeunes de prendre des décisions non éclairées quand les adultes refusent de leur fournir des informations. Pourtant, ce sont les jeunes qui subissent les conséquences de ces décisions, souvent pour le restant de leurs jours.

J’ai assisté à cela de mes propres yeux : les filles qui étaient dans cette classe avec moi le jour où l’on nous a dit de « nous débrouiller » pour comprendre notre sexualité sont tombées enceintes peu de temps après. Elles ont quitté l’école et perdu tout espoir d’échapper à la pauvreté. Pourquoi les écoles dans le monde échouent-elles à offrir une éducation sexuelle globale ? La réponse à cette question est que, souvent, les adultes craignent que ce type d’éducation n’encourage des mœurs légères. Selon cette logique, les « personnes les mieux informées » – comme les parents ou les médecins – doivent être celles à qui revient la prise de décision.

Contrairement au préjugé selon lequel l’éducation sexuelle encourage des mœurs légères et déclenche des grossesses précoces, une meilleure éducation améliore simplement les chances que les adolescents aient des pratiques sexuelles protégées, ce qui permet de réduire les taux de grossesse et d’IST et d’augmenter le taux des femmes éduquées. Cela a des effets largement positifs, allant de la santé à l’égalité des genres en passant par la réduction de la pauvreté.

Cette idée n’est pas nouvelle. Il y a un quart de siècle, à la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) organisée au Caire, 179 pays se sont engagés à fournir des informations dans le but d’aider les jeunes à prendre des décisions « responsables ». Selon le Programme d’action de la CIPD, l’éducation sexuelle est essentielle pour protéger les adolescents contre les IST et les grossesses non désirées, en particulier à un très jeune âge, lorsque les risques sont particulièrement grands pour la mère et l’enfant.

De nombreux progrès ont été réalisés depuis. Mais avec 20 000 jeunes filles de moins de 18 ans donnant naissance à un enfant chaque jour, surtout dans les pays en développement où l’accès aux informations relatives à la santé sexuelle et reproductive laisse à désirer, il est clair que cela est insuffisant.

Permettre aux jeunes de faire des choix responsables concernant leur corps et leur sexualité nécessite qu’on offre une éducation sexuelle globale à tous, d’une manière qui soit accessible aux jeunes et respecte leur autonomie et leurs droits. Cela implique la création d’espaces sûrs où ils puissent accéder à des moyens de contraception ou poser des questions, sans craindre que leurs famille ou amis ne le découvrent.

C’est le message que lance la nouvelle Stratégie jeunesse du Fonds des Nations unies pour la population, baptisé My Body, My Life, My World (Mon corps, ma vie, mon monde). En novembre prochain, à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de la CIPD, une conférence de haut niveau se tiendra à Nairobi, au Kenya. Elle va mobiliser la volonté politique et les ressources financières nécessaires pour appliquer pleinement le programme d’action de la CIPD. Les dirigeants du monde doivent préparer des engagements concrets soulignant que cette fois-ci, ils prennent au sérieux la tâche de faire en sorte que les jeunes, partout dans le monde, soient habilités à faire des choix en connaissance de cause au sujet de leur corps, de leur vie et de leur avenir.

* Jayathma Wickramanayake est l’envoyée spéciale du secrétaire général des Nations unies pour la jeunesse.

© Project Syndicate 2019.

Lorsque j’étais encore une élève aux yeux pétillants en classe de quatrième dans ma ville natale du Sri Lanka, j’étais très impatiente d’assister à mon premier cours d’éducation sexuelle. Au début de notre adolescence, mes camarades de classe et moi-même étions curieux concernant le sexe et la sexualité, même si nous n’y connaissions absolument rien. La déception fut...

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Toute éducation est d'abord, un apprentissage de la liberté. Une véritable EDUCATION sexuelle devrait commencer par une formation à la maîtrise de soi, de son corps et de ses sentiments. Au lieu de cela, dans les pays occidentaux, elle se réduit à une INFORMATION sur les meilleurs moyens de se procurer du plaisir sans risques.

Yves Prevost

07 h 19, le 08 septembre 2019

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Commentaires (1)

  • Toute éducation est d'abord, un apprentissage de la liberté. Une véritable EDUCATION sexuelle devrait commencer par une formation à la maîtrise de soi, de son corps et de ses sentiments. Au lieu de cela, dans les pays occidentaux, elle se réduit à une INFORMATION sur les meilleurs moyens de se procurer du plaisir sans risques.

    Yves Prevost

    07 h 19, le 08 septembre 2019

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