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Lifestyle - This is America

Junk-food, le goût de l’instantané

Haro général sur la junk-food, éternelle tentation des 7 à 77 ans, à l’heure où la tendance « healthy » balaie le monde. La malbouffe garde néanmoins encore une journée qui lui est consacrée.

La junk-food, Tang et chips, à l’honneur un jour par an, (et plus) aux USA. Photos Bigstock

Il y a quelques jours, le pays de l’Oncle Sam célébrait le Jour national de la junk-food, honnie et décriée par les médecins, diététiciens et surtout par les parents des ados. Ce rendez-vous avec la malbouffe a été fixé dans l’espoir qu’en s’éclatant officiellement durant 24 heures, ses adeptes seront rassasiés pour un moment, que le désir d’aliments et autres snacks supergras, supersalés, et supersucrés, sans aucune vraie valeur nutritive, soit quelque peu atténués.

Retour donc, à cette occasion, sur les créateurs de ces denrées cultes, et d’abord le célèbre père de certains spécimens de junk-food qui perdurent malgré tout et qui se sont avérés être le fait d’un esprit scientifique : William (Bill) A. Mitchell (1911-2004), un chimiste qui avait officié auprès de la General Foods Corporation entre 1941 et 1976. C’est à lui que l’on doit le tang, le Pop Rocks, le Cool Whip et le Jell-O. Il avait d’abord mis au point, en 1957, la poudre baptisée Tang à la saveur d’orange qui, mélangée avec une certaine quantité d’eau, produit une boisson très orange. Celle-ci, « au goût de fruits », a la particularité de ne contenir... aucun fruit. Le produit, mis en vente en 1959, est devenu populaire lorsque la NASA l’a utilisé en 1965 pour ses vols spatiaux habités, en raison de sa teneur en vitamines. Et même s’il n’a pas été au goût de l’astronaute John Glenn, le Tang est depuis associé aux programmes de vols spatiaux américains habités. Et sur Terre, encore consommé par des millions de personnes.


La junk-food, une affaire d’hommes de sciences

À la même période, en essayant de créer un soda instantané, Mitchell a obtenu une sucrerie connue sous le nom de Pop Rocks, brevetée en 1961 et commercialisée fin des années 1970. Il s’agit de bulles de dioxyde de carbone enveloppées dans un bonbon qui, une fois en bouche, éclatent en provoquant une sensation piquante. Et qui a fait les délices des enfants des années 80 et 90, et quelque peu effrayé les parents, au moins dans un premier temps. La société productrice de cette sucrerie avait dû envoyer une lettre à moult écoles leur assurant qu’en éclatant, les Pop Rocks ne risquaient pas de tuer leur progéniture !

Leur auteur, le chimiste Mitchell, qui avait même été en tournée dans ce but, ne s’était pas arrêté en si bon chemin. En effet, récupérant une invention qui remontait au début du siècle, il a réussi à concocter un dessert pouvant se faire à partir d’une poudre de gélatine qui, une fois mélangée à de l’eau froide, pavait la voie à la célèbre Jell-O instantanée, aujourd’hui déclinée en une foule de saveurs et couleurs. Continuant sur sa lancée des aliments préparés instantanément, il a lancé une simili-crème chantilly, baptisée Cool Whip et qui, instantanément aussi, est devenue très populaire. La recette originelle ne contenait alors aucun produit laitier, alors qu’à présent on y a introduit une petite quantité. Kraft Heinz, la société qui produit la Cool Whip, en vend deux cents millions de pots par an.


Un inventeur boulimique

William Mitchell a tout de même fait breveter 70 inventions culinaires, « à raison d’une par mois », selon les calculs d’un scientifique alimentaire Marv Rudolph, qui les a recensées.

Né dans l’État du Minnesota en 1911, Mitchell avait dû travailler, alors qu’il était ado, la nuit dans une usine de cristallisation de sucre de canne pour pouvoir financer ses études le jour. Après avoir obtenu un diplôme en chimie de l’Université du Nebraska, il fait un passage à l’Agricultural Experiment Station du Nebraska avant d’être engagé, en 1941, par l’une des plus importantes entreprises américaines de produits alimentaires, la General Food. Là, tout en laissant libre cours à sa créativité de chimiste, il ajoute une nouvelle palme à son succès en devenant l’un des pères de ce qui allait être appelé la junk-food. Ce moyen de se sustenter convenait parfaitement au nouveau « way of life » qui a suivi la Seconde Guerre mondiale, et où il fallait avancer à grands pas et sans perdre un instant, même en mangeant. D’où la naissance d’innombrables rayons de supermarchés proposant toutes sortes de « frozen-food » et de « fast-food », des potato chips jusqu’aux plats préparés.

À l’époque, on ne se souciait pas de la teneur excessive en calories et en cholestérol de ces produits et de leurs effets nocifs sur la santé. Puis est venu le temps de la prise de conscience du danger de l’obésité et des maladies cardio-vasculaires dues à ce genre d’alimentation que l’on s’est alors mis à contrecarrer.

Aujourd’hui, avec les courants bio et la slow-food, par opposition à fast-food, une grande partie des consommateurs voient donc d’un très mauvais œil les aliments modifiés. Même l’une des sept filles du père de la junk-food, Cheryl Mitchell – qui a suivi les traces de son père en devenant une experte de la science alimentaire – s’est écartée de son legs : on la retrouve pionnière du vegan milk, avec la création d’une gamme de laitage végétale à partir d’amandes, de cacahuètes et de riz.

La junk-food n’a pas rendu les armes pour autant. L’on en veut pour preuve la journée actuelle qui lui est consacrée. En 2019, il a même été question de la célébrer avec une… tarte au Tang dont voici les ingrédients : une tarte précuite, un demi-verre de poudre de Tang, un pot de Cool Whip, 1 verre de sour cream et 1,75 verre de lait concentré. Le tout parsemé de Pop Rocks. Une tarte comme tout droit sortie du laboratoire de feu l’homme de sciences William Mitchell. 100 % junk aussi !


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