Le pays du Cèdre fut depuis des millénaires le croisement de toutes les cultures du Levant ainsi que le champ de bataille de toutes les confrontations. À l’aube de cette énième tension irano-américaine, il est bon de rappeler l’histoire récente du Liban au vu des confrontations et des guerres des dernières décennies.
La guerre de 1967 ou naksa eut pour conséquence directe l’accord du Caire de 1969, accord qui spolia la souveraineté libanaise et réduisit le territoire national en un camp d’entraînement pour les forces palestino-progressistes. La guerre de 1973 eut pour conséquence directe la transformation du Liban en un champ de bataille alternatif et son usage dans une guerre asymétrique contre Israël pour venger la défaite des armées arabes conventionnelles, transformation qui conduisit ultérieurement à l’éclatement d’une guerre palestino-chrétienne puis islamo-chrétienne en 1975.
Les accords de Camp David en 1978 et la sortie de l’Égypte du conflit arabo-israélien provoqua le renouvellement des confrontations militaires sur le territoire libanais qui prit cette fois une connotation syro-chrétienne dont les habitants du quartier chrétien d’Achrafieh de la capitale Beyrouth gardent toujours un sentiment amer. La révolution iranienne de 1979 eut pour conséquence directe l’armement de la communauté chiite et la création du Hezbollah, communauté longtemps humiliée par les milices palestino-sunnites qui mirent la main sur le Sud-Liban et la domination de la scène politico-économique par le tandem maronito-sunnite.
L’invasion israélienne de 1982 eut pour conséquence directe le déplacement forcé des chrétiens du sud du Mont-Liban et la fin du tandem druzo-maronite qui était à la base de la création du Liban. La première guerre du Golfe de 1990 eut pour conséquence cette fois l’occupation syrienne du réduit chrétien et un feu vert international accordé à la Syrie pour qu’elle « gère » le Liban, accord tacite qui va durer jusqu’en 2005. La guerre civile en Syrie de 2011 eut pour conséquence le déplacement de deux millions de réfugiés syriens au Liban, événement cataclysmique qui finit par provoquer un appauvrissement général et un changement démographique dont les effets continueront à se faire sentir dans les décennies à venir. Il est clair que le Liban n’est pas loin aujourd’hui des effets d’une guerre américano-iranienne dans la région du Golfe. Au vu de la configuration confessionnelle du Liban, toute position prosaoudienne est écartée de prime abord, ce qui risque de provoquer l’expulsion de quelque cinq cent mille Libanais qui travaillent dans la région de la péninsule Arabique. En cas d’expansion des confrontations, rien n’empêche que soient inclus l’Irak et le reste des pays du Levant dont le Sud-Liban risque de devenir une ligne de confrontation libano-israélienne et peut-être conduire à la destruction de l’infrastructure du pays du Cèdre comme ce fut le cas en 2005. Pareille guerre risque de provoquer des animosités entre sunnites et chiites qui pourraient évoluer en une guerre civile entre les deux confessions, laissant les deux communautés chrétienne et druze à leur sombre destin.
Croisement de cultures, des religions, des continents, des révolutions et de toutes les guerres du Moyen-Orient, le Liban ne peut que prier pour la paix dans la région.
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commentaires (3)
PRIERE LIRE IL Y A TRES MALHEUREUSEMENT ETC... MERCI.
LA LIBRE EXPRESSION
17 h 44, le 19 mai 2019