Budget d'austérité : sit-in des militaires retraités à Beyrouth

Des militaires libanais à la retraite ont mené mardi dès l'aube un grand mouvement de protestation, notamment à Beyrouth, pour rejeter une baisse de leurs indemnités et pensions, qui serait prévue dans le projet de budget pour l'exercice 2019, empêchant l'accès à plusieurs institutions et infrastructures publiques. 

Un premier groupe de militaires, réuni sur la place Riad el-Solh dans le centre-ville, s'est rendu au Port de Beyrouth, dont ils ont bloqué tous les accès. Un second groupe est, lui, parti du jardin de Sanayeh vers la Banque du Liban, dont ils ont également fermé toutes les issues. Ils se sont ensuite dirigés vers le ministère des Finances. 

S'exprimant au nom des militaires lors du sit-in devant une des entrées du Port, dans le quartier de la Quarantaine, le général à la retraite Ahmad el-Ouani a déclaré que "ce mouvement vise à marquer notre opposition à toute atteinte aux droits des retraités". "Nous tenons à assurer aux citoyens que ce mouvement n'est pas du tout organisé contre eux, mais pour réclamer notre argent, qui a été pillé", a-t-il ajouté, espérant être "entendu par les responsables".

Le chef de la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL), Béchara Asmar, qui était présent au sit-in à la Quarantaine, a affiché son soutien aux militaires à la retraite et s'est déclaré en faveur de "tout mouvement qui demande la fin des injustices contre la classe ouvrière, du secteur public comme privé, via des réductions des salaires ou l'imposition de nouvelles taxes". M. Asmar a par ailleurs annoncé que les institutions publiques ainsi que les offices autonomes, comme l'Office des Eaux, allaient observer un mouvement de grève jeudi, vendredi et samedi. "Si les responsables ne répondent pas à nos demandes, nous aurons recours à une grève ouverte", a-t-il averti. 

Ce sit-in, le deuxième du genre organisé par les militaires retraités, veut mettre en garde contre toute éventuelle réduction des compensations et indemnités ou atteinte aux droits et acquis des vétérans de l'armée libanaise. Lors d'une réunion lundi, les ex-militaires avaient invité les autorités à renoncer aux réductions annoncées dans le projet du budget "avant même sa discussion en Conseil des ministres", qui doit avoir lieu dans le courant de la journée. Les militaires retraités promettent l’escalade si leur cause n’est pas entendue et assurent "détenir des moyens de dissuasion" propices à inverser la situation. Parmi ces moyens, le recours en invalidation de la loi de finances devant le Conseil constitutionnel si celle-ci devait être avalisée à leur détriment.

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"Chimères"
En tournée à Ersal, localité de la Békaa se trouvant à proximité de la frontière syrienne, le ministre de la Défense, Elias Bou Saab, s'est excusé auprès des militaires à la retraite "qui doivent descendre dans la rue pour demander que leurs droits soient respectés". "Le gouvernement doit mettre un terme au gaspillage financier", a-t-il déclaré, reprochant aux autorités de "faire porter la responsabilité de la situation économique à l'armée". M. Bou Saab a affirmé qu'il "ne transigera pas en ce qui concerne les droits des militaires et défendra leurs revendications".

Le député du Kesrouan Chamel Roukoz, lui-même retraité de l'armée, a affirmé à la chaîne de télévision locale LBC, qu'il "refuse le projet de budget dans son entièreté". "Réduire le déficit budgétaire doit entrer dans le cadre d'un plan économique clair et précis", a-t-il ajouté.

De son côté, le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, a souligné, sur son compte Twitter qu'une "lecture précise du budget" permet de comprendre que "les droits des militaires ne seront pas visés", mais qu'au contraire "certaines prestations seront augmentées". "Le soutien de l'armée et des forces de sécurité a toujours été et reste une priorité", a-t-il souligné, et "tous les propos de la part de ceux qui tentent de jouer aux héros concernant une atteinte aux droits de la troupe ne sont que chimères". "Les retraités de l'armée doivent comprendre que leurs droits ne sont pas en danger", a affirmé M. Khalil. Il a souligné que le projet de budget propose "une réorganisation de toutes les pensions afin d'assurer leur continuité" et précisé que ces suggestions "sont le résultats de consultations avec les différents blocs" parlementaires. A son arrivée au Conseil des ministres, le ministre Khalil, interrogé par la LBC, a à nouveau affirmé que le projet de budget ne contient aucune mesure prévoyant une réduction des salaires ou pensions des militaires. "Les informations à ce sujet ne se basent sur aucun fait réel", a-t-il souligné.

Le général à la retraite Georges Nader a directement réagi aux propos de M. Khalil et affirmé que les retraités de l'armée "ne croient pas les propos du ministre des Finances", l'appelant à retirer du projet de budget "les articles concernant les salaires des militaires". 

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