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Économie - Interview

Si Ghosn est jugé équitablement, il sera innocenté, assure l'un de ses avocats à L’OLJ

L'ex-numéro un de l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi "a été présenté comme coupable dès le premier instant", dénonce  François Zimeray.

Carlos Ghosn a été de nouveau inculpé, lundi 22 avril 2019 au Japon, pour des accusations de détournement de fonds de Nissan. Il a aussitôt déposé une demande de libération sous caution. Photo AFP

Ce que les médias ont appelé "la chute du taikun", "du titan", ou encore "d’une icône de l’industrie automobile" a débuté le 19 novembre 2018. Ce jour-là, Carlos Ghosn, PDG de l’alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, détenteur des nationalités brésilienne, française et libanaise, est arrêté à la sortie de son avion privé à l’aéroport de Tokyo. Depuis, mises en examen et poursuites judiciaires s’enchaînent. Remis en liberté le 6 mars 2019, contre le versement d'une caution de 9 millions de dollars, après 108 jours au centre de détention de Kosuge (nord de Tokyo), Carlos Ghosn est de nouveau arrêté le 4 avril. Et alors qu’il est déjà sous le coup de trois inculpations pour minoration de déclarations de revenus et abus de confiance aggravé, le patron déchu a de nouveau été inculpé lundi pour des accusations de détournement de fonds de Nissan.

"Carlos Ghosn a été présenté comme coupable dès le premier instant", dénonce dans un entretien à L’Orient-Le Jour, François Zimeray, avocat français de la famille Ghosn, qui s'insurge notamment contre sa ré-arrestation le 4 avril dernier, sur base d'"accusations juridiquement douteuses". Après plus de cent jours d'une incarcération "dans des conditions injustes et cruelles afin qu’il soit contraint à des aveux", Carlos Ghosn s'était "scrupuleusement conformé" aux conditions strictes de sa remise en liberté, s'insurge l'avocat. "Les circonstances dans lesquelles il a été arrêté à l’aube, avec une vingtaine d’agents se précipitant à son domicile et les médias informés avant la ré-arrestation, témoignent clairement d’une volonté de l’humilier", ajoute-t-il.


(Lire aussi : Que reproche la justice japonaise à Carlos Ghosn ?)


"Accusé à tort"

Depuis cette ré-arrestation, Carlos Ghosn, 65 ans, était interrogé sur des transferts d’argent émanant de Nissan à un distributeur de véhicules du constructeur à Oman. Au total, 5 millions de dollars parmi les fonds transférés ont été utilisés à des fins d’enrichissement personnel, selon le bureau des procureurs japonais. 

L’ancien patron de Renault-Nissan est soupçonné d'avoir utilisé une société libanaise, la Good Faith Investments, pour détourner une partie de l’argent versé par Nissan à Suhail Bahwan Automobile, le concessionnaire Renault-Nissan du sultanat d’Oman entre 2012 et 2018. D’après des éléments de l'enquête interne de Nissan rapportés par les agences, une partie de ces sommes ont abouti sur les comptes d'une société dirigée par l’épouse de M. Ghosn, Carole Ghosn, "Beauty Yachts", enregistrée dans les Îles vierges britanniques. Selon des sources proches du dossier citées par l'AFP, la somme qui aurait été détournée a été injectée via une société au Liban dans un fonds contrôlé par son fils Anthony aux États-Unis, Shogun Investments LLC.

Prié de commenter ces accusations, Me Zimeray se contente de répondre : "M. Ghosn a déclaré qu'il était innocent de toutes les charges retenues contre lui. Il est catégorique, il est accusé à tort et injustement détenu sur des accusations sans fondement". "Nous allons donc concentrer nos efforts pour que M. Ghosn ait un procès équitable", poursuit-il.


"Une trahison"

Dans une vidéo enregistrée avant sa seconde arrestation et diffusée quelques jours plus tard, M. Ghosn avait déclaré à plusieurs reprises être innocent de toutes les accusations portées contre lui. Il se dit en outre victime d’un "complot, d’une conspiration et de trahison". 

"Des courriels révèlent la vraie histoire (...) : le ministre japonais de l’Économie, du Commerce et de l'Industrie (Meti) travaillait avec des dirigeants de Nissan pour bloquer la fusion de Nissan et Renault souhaitée par Carlos et préserver l'autonomie de Nissan à tout prix", assurait également Carole Ghosn dans une tribune publiée mi-avril par le Washington Post. "Ce qui aurait dû se régler en conseil d'administration est devenu une affaire judiciaire", ajoutait-elle. Lundi, le journal Nikkei rapportait que Nissan va rejeter une proposition de Renault d'une intégration plus poussée au niveau du management et demander une relation capitalistique équilibrée. La direction de Nissan estime que le constructeur japonais n'a pas bénéficié d'un traitement équitable jusqu'ici et qu'avec une fusion cette inégalité de traitement deviendrait permanente, expliquait le journal en citant des sources. Renault fait valoir, dans sa proposition, qu'une intégration plus poussée permettrait d'optimiser les synergies au sein de l'alliance franco-japonaise, ajoutait-il.



Interrogé sur un éventuel "complot" de hauts dirigeants de Nissan opposés à un resserrement des liens avec Renault, Me Zimeray rappelle que les médias avaient rapporté, avant l’arrestation de M. Ghosn, le projet de fusion de Renault et Nissan, "un accord que Nissan et le gouvernement japonais cherchaient à bloquer", précise l’avocat en citant la presse. 

L’avocat indique également qu’il a été rapporté que M. Ghosn aurait évoqué la mauvaise performance de Nissan, des mises en garde au sujet des bénéfices et les scandales touchant Nissan en matière d'émission de polluants. "Conscients qu'ils risquaient de perdre leur emploi en raison de la baisse des performances de Nissan, certains dirigeants de Nissan, pense M. Ghosn, ont collaboré pour monter un dossier contre lui, sous le couvert d'une enquête interne", ajoute Me Zimeray.

Dans sa vidéo, M. Ghosn citait nommément ceux qui, selon lui, sont à l’origine de ce "complot", mais ses avocats ont décidé de couper ce passage "en raison de risques légaux" en cas de révélation publique de l'identité de ces personnes. "M. Ghosn est déterminé à ce que la vérité soit révélée. Nous sommes confiants que s'il est jugé équitablement, il sera innocenté", estime encore Me. Zimeray.


(Lire aussi, dans Le Commerce du Levant : Les encombrants amis du Golfe de Carlos Ghosn)


"Justice de l'otage"

Me Zimeray, qui fut nommé ambassadeur chargé des droits de l’Homme de 2008 à 2013 par Nicolas Sarkozy puis ambassadeur de France au Danemark, affirme que pour lui cette affaire n’est "pas seulement un combat pour un seul homme, mais un combat pour la défense de principes universels : le droit à la présomption d’innocence, le droit à un procès équitable, le droit à la dignité en toutes circonstances". Pour l'avocat, "la détention de Carlos Ghosn, qui ne semble ni nécessaire ni raisonnable et qui a lieu dans des conditions difficiles, illustre le système japonais de "justice de l'otage" dans le but d'obtenir des aveux forcés". "Des personnalités du monde juridique, des universitaires et des praticiens au Japon ont lancé une pétition demandant de mettre fin à ce système de justice de l'otage", dit-il encore.

En mars, la famille de M. Ghosn avait décidé de saisir les Nations unies estimant que "ses droits fondamentaux" n’étaient pas respectés. C’est Me Zimeray qui s’est chargé de la saisine.

"M. Ghosn est interrogé pendant des heures, chaque jour, sans la présence de ses avocats. Ces interrogatoires durent jusqu'à 22h. Son accès à un avocat est limité, affirme encore Me Zimeray. Il est confiné dans une cellule non chauffée avec trois repas, principalement de riz. Il dispose de 30 minutes d'activité physique par jour, à l'exception des week-ends et des jours fériés, ce qui signifie qu'il peut passer jusqu'à 5 jours consécutifs sans pouvoir respirer à l'air libre. Ses visiteurs sont limités à 15 minutes de conversation en présence d'un gardien et séparés de lui par une vitre". Me Zimeray indique en outre que M. Ghosn "se voit refuser ses médicaments et ne reçoit pas les soins médicaux appropriés pour ses problèmes de santé chroniques". Des problèmes de santé, dit-il, "exacerbés par les conditions délibérément dures de sa détention". Carlos Ghosn souffre d'un taux de cholestérol élevé et le traitement qu'il suit a provoqué une insuffisance rénale chronique et une rhabdomyolyse, maladie qui entraîne la destruction de cellules musculaires, avaient indiqué ses avocats dans un document consulté par Reuters.


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commentaires (7)

faut pas se fier aux apparences !! une leçon que j'ai apprise bien a mes depends

Bery tus

02 h 43, le 25 avril 2019

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • faut pas se fier aux apparences !! une leçon que j'ai apprise bien a mes depends

    Bery tus

    02 h 43, le 25 avril 2019

  • Dans le temps avec un Si on mettait Paris dans une bouteille!! Que faire pour que ce Si théorique soit effectivement converti en Sûrement?

    Wlek Sanferlou

    02 h 29, le 25 avril 2019

  • Que fait Renault?

    Eleni Caridopoulou

    00 h 24, le 25 avril 2019

  • UNE AFFAIRE DE PRESTIGE DES JAPS DE L,ECHEC QUI SE SENTIRENT ATTEINTS DANS LEUR AMOUR PROPRE PAR LE SUCCES DE GHOSN LA OU ILS AVAIENT EUX ÉCHOUÉ.

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 11, le 24 avril 2019

  • Si ma grand mère en avait je l'aurai appelé jeddo.

    FRIK-A-FRAK

    16 h 10, le 24 avril 2019

  • Une affaire purement politique à 100% japonaise.

    Sarkis Serge Tateossian

    15 h 09, le 24 avril 2019

  • Ma bi soh ella'sahiih.

    Wlek Sanferlou

    14 h 36, le 24 avril 2019

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