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Liban - Décryptage

Le dossier des déplacés syriens : Aoun mène la bataille du retour

Le dossier des déplacés syriens reste l’un des plus délicats qui s’imposent au nouveau gouvernement. La polémique qui avait commencé lors de la première séance effective du gouvernement, avant que le chef de l’État ne décide d’y couper court en frappant sur la table et en déclarant être le responsable le plus à même de définir l’intérêt national, continue de marquer ce dossier. Le ministre FL des Affaires sociales Richard Koyoumjian avait demandé au chef de l’État comment le ministre d’État aux Affaires des réfugiés Saleh Gharib s’était rendu en Syrie alors que la politique officielle du gouvernement prévoyait la distanciation. Le chef de l’État avait alors rétorqué que la politique de distanciation est adoptée à l’égard du conflit en Syrie, mais pas à l’égard d’un problème qui devient de plus en plus menaçant pour le Liban au point que, bientôt, les Libanais pourraient ne plus trouver de place pour eux au Liban. Les ministres FL avaient tenté de discuter, mais le chef de l’État avait aussitôt levé la séance. Les Forces libanaises ont visiblement cherché à désamorcer la crise, se contentant de proposer un plan pour résoudre ce dossier qui tient compte des exigences de l’Occident et de ses alliés ; mais les visiteurs internationaux, américains et européens en particulier, ont pris le relais.

Selon une source diplomatique libanaise proche de ce dossier, les Occidentaux ne cherchent désormais plus à dissimuler leur position réelle derrière des considérations humanitaires ou autres. Leurs émissaires disent clairement, dans leurs rencontres avec les responsables libanais, qu’ils refusent toute idée de retour des déplacés avant la solution politique pour ne pas céder cette carte au président Bachar el-Assad. D’une façon indirecte, l’Occident et tous ceux qui avaient appuyé l’opposition syrienne reconnaissent aujourd’hui que le renversement du régime syrien est pratiquement impossible. Leur objectif est désormais de l’empêcher de remporter une victoire éclatante en essayant de faire pression sur lui pour obtenir des concessions politiques. La carte du retour des déplacés est une carte importante dans ce contexte.

Au début, les émissaires occidentaux disaient aux responsables libanais qu’en réalité, c’est le président syrien qui ne veut pas du retour des déplacés, parce qu’un tel retour compromettrait son projet de changement démographique en Syrie en faveur des minorités alaouite et chiite au détriment de la grande majorité sunnite qui d’ailleurs constitue la plus grande partie des déplacés syriens au Liban, en Jordanie et en Turquie.

Mais le président syrien a prononcé il y a une dizaine de jours un discours dans lequel il a officiellement appelé les déplacés syriens à rentrer chez eux, en les déclarant tous bienvenus dans leur pays et en donnant la priorité aux déplacés installés au Liban. Assad a ainsi indirectement répondu à tous ceux qui l’accusaient de vouloir entraver le retour des déplacés et en même temps, il a voulu renforcer la position du président libanais qui est déterminé à poursuivre coûte que coûte le processus du retour des déplacés installés au Liban.



(Lire aussi : Grandi : Nous œuvrons en Syrie à créer les conditions d’un retour des réfugiés)


C’est dans ce contexte qu’est intervenue la visite du nouveau ministre d’État chargé du dossier des réfugiés syriens Saleh Gharib à Damas, où il a rencontré plusieurs responsables syriens dont le président Bachar el-Assad. Avant d’être critiquée par certaines parties libanaises, cette initiative a fortement déplu à l’Occident, et les émissaires qui se sont succédé depuis à Beyrouth ont tous soulevé cette question. David Satterfield l’a fait avec ses interlocuteurs libanais (sachant qu’il n’a pas rencontré le chef de l’État), tout comme Federica Mogherini, haute représentante de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, qui était à Beyrouth la semaine dernière. Selon la source diplomatique précitée, Mme Mogherini aurait exprimé l’opposition de l’UE à un retour des déplacés syriens avant la solution politique, car les conditions de sécurité pour un tel retour ne seraient pas encore réunies. Face à la position ferme libanaise qui estime que le retour digne et sûr est possible puisque le calme est revenu dans la plupart des provinces syriennes, Mme Mogherini aurait menacé de suspendre les aides européennes au Liban dans le cadre de la gestion de la présence des déplacés syriens sur son territoire, avant de se rétracter, face à la réaction officielle libanaise ferme et claire.

Le haut-commissaire du HCR Filippo Grandi est ensuite venu au Liban pour examiner ce dossier. Il a aussi effectué une visite en Syrie pour voir sur place la situation des déplacés rentrés chez eux. Toujours selon la source diplomatique précitée, M. Grandi aurait déclaré aux responsables libanais qu’il a rencontrés qu’il y a effectivement un effort déployé par les autorités syriennes pour accueillir décemment les déplacés de retour chez eux. Des maisons préfabriquées ont été installées par milliers à leur intention, ainsi que des écoles et toute l’infrastructure qui va avec. De même, les autorités syriennes auraient laissé le responsable onusien choisir les lieux qu’il souhaite visiter et ce dernier a pu se rendre sur le terrain pour écouter ceux qui sont rentrés et voir s’ils sont inquiétés ou menacés. La même source précise que Grandi s’est déclaré relativement satisfait des conditions de ce retour et il aurait affirmé aux autorités libanaises que le HCR ne cherche en aucun cas à entraver le retour chez eux des déplacés syriens, mais sa responsabilité est de s’assurer que ce retour est volontaire et sûr. Le Liban, qui a jusqu’à présent facilité le retour chez eux de 167 000 déplacés syriens, a remporté ainsi une petite victoire et il ne compte pas lâcher ce dossier en dépit des positions officielles américaine et européenne. Filippo Grandi a été invité par les autorités syriennes à revenir en Syrie quand il le souhaite pour vérifier sur le terrain les conditions de vie de ceux qui sont rentrés. Mais cela ne signifie pas pour autant que le dossier va connaître des développements déterminants rapidement, car un retour massif exige une reconstruction à grande échelle qui n’est pas encore envisagée faute de fonds, notamment.

La visite du chef de l’État à Moscou dans deux semaines devrait aussi permettre d’évoquer ce dossier et de faire le point sur la fameuse initiative russe qui donnait la priorité au retour des déplacés syriens installés au Liban.


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Le dossier des déplacés syriens reste l’un des plus délicats qui s’imposent au nouveau gouvernement. La polémique qui avait commencé lors de la première séance effective du gouvernement, avant que le chef de l’État ne décide d’y couper court en frappant sur la table et en déclarant être le responsable le plus à même de définir l’intérêt national, continue de marquer ce...

commentaires (10)

Je ne pense absolument pas que diaboliser l’occident dans ce dossier soit une bonne chose . C’est très réducteur. Assad dernièrement a fait de la communication , un discours et à installé trois mobile homes et construit deux écoles ...est ce suffisant ? Bien sur que non . Maintenant si les syriens veulent rentrer chez eux c’est une bonne chose ! Mais combien veulent ils le faire immédiatement ? Une dernière question : qui va reconstruire la Syrie et avec quel argent ?

L’azuréen

21 h 09, le 11 mars 2019

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Commentaires (10)

  • Je ne pense absolument pas que diaboliser l’occident dans ce dossier soit une bonne chose . C’est très réducteur. Assad dernièrement a fait de la communication , un discours et à installé trois mobile homes et construit deux écoles ...est ce suffisant ? Bien sur que non . Maintenant si les syriens veulent rentrer chez eux c’est une bonne chose ! Mais combien veulent ils le faire immédiatement ? Une dernière question : qui va reconstruire la Syrie et avec quel argent ?

    L’azuréen

    21 h 09, le 11 mars 2019

  • " il a officiellement appelé les déplacés syriens à rentrer chez eux, en les déclarant tous bienvenus dans leur pays" très bonne nouvelle! Pourquoi attendre les instances internationales? Tout ce qu'il faut est de démanteler les tentes des déplacés, de les emmener en Syrie et les replanter où que les déplacés et Assad décident. Qui les empêchent? Si on arrive à trouver des bus par centaines pour sortir les daechiotes on pourra sûrement trouver les bus pour les déplacés pour pouvoir les redeplacés dans leur pays. Toute cette comédie à l'eau de rose ne sert qu'à créer des dissensions entre libanais. Les palestiniens ne pouvaient rentrer chez eux à cause d'une force ennemie puissante soutenues par des puissances mondiales alors que les déplacés veulent retourner vers le pays et leur président les invite à rentrer. Alors il suffit de leur donner un coup de main.

    Wlek Sanferlou

    15 h 31, le 11 mars 2019

  • J'étais tellement pris par le sujet que j'ai oublié de féliciter et remercier Scarlett pour une fois de plus nous avoir éclairé sur les fonds de l'histoire de ces retours des réfugiés victimes du complot occidentalo wahabite sous influence sioniste. Pour rappeler une chose simple à dire , CES RÉFUGIÉS NE SERONT RETOURNÉS QUE PAR LES DECISIONS ET AUX CONDITIONS QUI SERONT PRISES PAR BASHAR EL ASSAD LE HÉROS SYRIEN ET SES ALLIÉS RUSSES ET LIBANAIS. Avec , pourquoi pas quelques concessions qu'ils auront accordé à ces pays de la mauvaise foi . Merci encore Scarlett.

    FRIK-A-FRAK

    14 h 05, le 11 mars 2019

  • L'objectif principal et exclusif de la République Libanaise est le retour de tous les déplacés syriens du Liban en Syrie, point barre... Toute autre littérature utilisée de la part des différents intervenants, pour nuancer les attributs de ce déplacement, n'est autre qu'un moyen de diluer le problème et rendre cette tâche impossible, tant qu'elle ne sera pas conforme aux plans géostratégiques régionaux. Le régime syrien qui est partie prenante dans ces changements en cours, est seul responsable de leur exécution, en coordination directe avec la Russie, et indirecte avec les E.U.et leurs alliés... Le Liban aura beau faire de continuer à gesticuler et le Président de continuer à réclamer ce départ,(bravo à lui de le faire), rien ne se fera malheureusement, tant que les dits objectifs stratégiques régionaux ne seront pas arrivés à leurs termes. Seuls les intérêts des différents décideurs régionaux et internationaux, détermineront la clôture de ce dossier épineux et lourd de conséquences pour le Liban...!

    Salim Dahdah

    11 h 51, le 11 mars 2019

  • Leur objectif est désormais de l’empêcher de remporter une victoire éclatante en essayant de faire pression sur lui pour obtenir des concessions politiques. La carte du retour des déplacés est une carte importante dans ce contexte. POUVEZ VOUS M'EXPLIQUER COMMENT LE RETOUR DES REFUGIES SERAIENT UNE VICTOIRE POUR ASSAD? Si Assad les voulait vraiment pourquoi l'ambassadeur de Syrie n'a jamais visite ces concitoyens refugies au Liban pas necessairement parcequ'ils sont contre Assad mais pour fuir les bombardements de l'armee Syrienne et aussi la presence de Isis Il pourrait leur dire combien ils seraient bien accueilli en Syrie, que personne ne sera puni pour une raison quelconque, que le service militaire sera differe ou annule pour eux etc.. Mais rien de cela ne se passe Croyez moi l'Occident voudrait tellement le retour des refugiers Syriens en Syrie surtout que cela faciliterait le retour des refugies Syriens de l'Occident ou ils sont aussi des milliers Cessez de toujours penser au complot de l'Occident contre la Syrie , pensez a ces refugies qui vivent au Liban dans une situation infernale et qui revent de rentrer chez eux mais qui ont peur de cela un peu moins de parti- pris SVP

    LA VERITE

    11 h 25, le 11 mars 2019

  • FAUT PAS FAIRE DE CE DOSSIER UN ARTICLE PARTISAN TRES CHERE MADAME SCARLETT HADDAD. LES DEUX ONT RAISON. CEUX QUI VEULENT LE RAPATRIEMENT LE PLUS PROMPT POSSIBLE DES REFUGIES SYRIENS ET A RAISON... ET CEUX QUI SAVENT QUE SANS L,APPROBATION INTERNATIONALE... MAIS ET SURTOUT CELLE DES REFUGIES EUX-MEMES... L,EXPULSION ETANT IMPOSSIBLE ET DEFENDUE... ON NE PEUT RIEN FAIRE ! LA LOGIQUE DIT QU,IL FAUT BEAUCOUP DE PATIENCE ET D,ARGUMENTS POUR CONVAINCRE LES SYRIENS DE FACILITER LE RETOUR DES REFUGIES ET LES INTERNATIONAUX DE L,IMPORTANCE DE CETTE ETAPE TOUT SPECIALEMENT POUR LE LIBAN MAIS AUSSI POUR DES AUTRES PAYS HOSPITALIERS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 57, le 11 mars 2019

  • que demande le peuple ? voila assad qui invite les 5 a 6 millions de refugies syriens a rentrer chez eux en syrie voila qu'il leur promet beaucoup de choses pourvu qu'ils rentrent chez eux en syrie que veut le monde & surtout les mechants libanais qui l'accusent du contraire ? ils veulent quoi d'autres comme preuves de l'impatience d'assad a les retrouver chez lui en syrie? le monde veut quoi, que les ministres syriens concernes s'adresse aux refugies directement, qu'ils visitent les camps ou pourrissent leurs malhuereux concitoyens ? que les ambassadeurs syriens nommes dans les 3 pays hotes fassent qqs stupides visites a ces memes camps de refugies ? pour dire quoi de plus que ce que assad aurait dit ? pure perte de temps . Vraiment ces mechants libanais depourvus du moindre sens de devoir nationalo-panarabe ! ah mais attendez les amis, une chose manque encore - un non dit - que les chefs de ces 3 etats hotes fassent amende honorable, s'acoquinent avec assad mais a SES conditions a lui- sinon !

    Gaby SIOUFI

    10 h 45, le 11 mars 2019

  • Ce qui est dégoûtant par dessus tout ce complot occidentalo wahabo sioniste qui a foiré, par dessus toute cette mauvaise foi occidentalo wahabo sioniste qui ne veut pas reconnaître sa défaite donc la VICTOIRE des héros de la résistance libanaise du hezb et de BASHAR, c'est qu'au Liban qui croule sous des problèmes au dessus de ses forces, mais qui stoiquement fait montre de patience incroyable face à ce problème, des libanais se font les porte-parole de ces occidentaux QUI N'ONT ÉTÉ JAMAIS POUR NOS INTÉRÊTS, MAIS TOUJOURS POUR CELUI D'UN AUTRE, donc ces libanais des fl de geagix, et je le sais , la mort dans leur âme de LIBANAIS, continuent à rouler pour ce bloc occidentalo wahabo sioniste. ET LE PIRE DE TOUT ILS AGISSENT CONSCIEMMENT ET EN DÉPIT DU BON SENS LIBANAIS, tout en prétendant à qui veut les croire, LIBAN D'ABORD .

    FRIK-A-FRAK

    09 h 20, le 11 mars 2019

  • Faisons fi des puissances occidentales qui n'ont pas pour but l'interête superieur du Liban , mais pour premier objectif de changer le régime en Syrie . Ne cessons pas de repeter que le poids de ces réfugiés est de plus en plus dangereux pour notre survie économique , sociale , culturelle et sécuritaire , et que chaque jour qui passe approfondit le problème de leur inexorable implantation ! Il ne s'agit plus de se prêter à ces querelles byzantines : Il n'y a plus de bombardements chez eux , QU'ILS RENTRENT CHEZ EUX ILLICO PRESTO !

    Chucri Abboud

    07 h 34, le 11 mars 2019

  • Ecoeurants les occidentaux!

    Massabki Alice

    00 h 44, le 11 mars 2019

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