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Culture - Rencontre

Nicolas Khoury, lorsque le réel rejoint le fictif

Primé le 10 novembre aux Journées cinématographiques de Carthage pour son documentaire « Résonances », Nicolas Khoury présente au BAFF son film « Niemeyer 4 Ever », un film commandité par le festival et qui lui a nécessité un an de travail.

Nicolas Khoury avec sa statuette en or pour « Résonances » aux Journées cinématographiques de Carthage. DR

Diplômé de l’Alba, Nicolas Khoury, féru du réel, passe du montage à la réalisation et a déjà signé trois documentaires. Il aime à traduire la réalité tantôt d’une manière classique, à l’instar de Niemeyer 4 Ever, projeté au BAFF durant quatre jours, tantôt d’une manière plus libre comme Résonances qui vient d’être primé lors des Journées cinématographiques de Carthage. « Dans Résonances, je casse tous les codes, je m’évade. » Le jeune cinéaste n’est pas dans l’expérimental mais dans le geste audacieux, dans la caméra osée qui explore des horizons nouveaux. Pousser plus loin les limites, tel est le défi de cet artiste qui n’a peur de rien, au risque d’échouer ou de ne pas plaire. D’ailleurs, si son aire de jeu est le documentaire, c’est bien parce qu’il a les coudées franches. « Avec la fiction, je suis plus confiné dans le sujet et astreint à un certain processus. Jouer avec le réel est un vrai défi pour moi. »


Repousser les limites

« Pour ce documentaire long de trente minutes, je suis parti d’une idée assez particulière concernant les réfugiés et je leur ai demandé à quoi il rêvaient. Il s’est avéré qu’ils n’avaient pas de rêves mais uniquement des cauchemars. Et de plus, ces cauchemars-là se croisaient et avaient des points communs les uns avec les autres. De documentaire, donc, cela est devenu une fiction. Car on n’arrivait plus à tracer la limite entre le vrai et le faux, l’imaginaire et le réel. » Pour mettre l’accent sur l’aspect huis clos presque étouffant des camps dans lesquels vivent ces réfugiés, Nicolas Khoury choisit le bruit de l’IRM, cette cabine fermée aux résonances magnétiques qui enferme le corps et le soumet à de bruits de martèlements cacophoniques et assourdissants. « J’ai expérimenté l’IRM et j’ai senti quelle peur on pouvait ressentir dans un lieu pareil, a précisé Khoury. C’est pourquoi j’ai choisi cette similarité que j’ai transposée sur l’image du camp de Jdita, dans la Békaa, qui me paraît totalement conforme aux critères du lieu. »

Comment élaborer ce travail conceptuel qui parle du corps enfermé, incapable de s’échapper ? Sans visage et sans identité, et à travers une image brumeuse, les personnes qui témoignent deviennent un « corps » unique. Une entité. « De prime abord, je ne voulais pas évoquer les réfugiés si ce n’était avec un concept nouveau, précise le cinéaste. Qu’aurais-je pu apporter de neuf à ce sujet qui a été longtemps ressassé, voire essoré ? » Le processus est tout neuf, puisque les témoignages ont été pris avant de planter un décor. Ce qui donne parfois cette impression de superposition de dialogues ou même de décalé. Une polyphonie qui ajoute à cette notion de corps unique, mais qui a rendu le montage difficile. C’est ce son qui représente à la fois le fil conducteur du film et sa trame, jusqu’à en devenir l’acteur principal.


Une équipe fidèle

Nicolas Khoury est un cinéaste déterminé. Les fonds ou une aide financière quelconque sont certes les bienvenus, mais s’ils tardent à venir, alors il faut y aller. « Je devais commencer le tournage le jour coûte que coûte. » C’est donc avec son équipe de fidèles copains, Haissam Atmé au son et Ziad Chahoud pour la photo, qu’il offre à voir une œuvre oscillant entre réel et fictif.

La démarche est cependant différente pour Niemeyer 4 Ever, commandité par le BAFF et de format plus classique, même si le réalisateur a essayé de sortir des sentiers battus. Avec la même équipe à laquelle Karim Ghoraieb est venu se joindre, Niemeyer 4 Ever n’est pas un simple documentaire qui raconte la construction de l’espace par un des plus grands architectes du siècle, censé accueillir une foire internationale, lequel projet a été arrêté à cause de la guerre civile en 1975. Cette œuvre organique est en corrélation avec le paysage du pays, démembré, délabré, laissé entre mort et vif. Aucun corps n’aura aussi bien exprimé la souffrance de la guerre que le danseur Charlie Prince qui évolue entre ces fantômes du passé, ces quasi-colonnes de Baalbeck contemporaines devenues impuissantes dans ce relief urbain. A-t-on raté quelque chose ? Et quoi? semble s’interroger Nicolas Khoury dans ce documentaire projeté au BAFF cet après-midi à 16 heures, ainsi que les vendredi et samedi respectivement à 19h35 et à 20h30 et le dimanche 25 à 16h30.


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