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Lifestyle - Un peu plus

Prends-moi la main

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Nous avons tous des credo et des convictions. Nous sommes souvent persuadés que nous avons raison. Que nous ne changerons pas. Que la vie que l’on mène est celle que l’on mènera jusqu’à la fin. Que ce que nous sommes restera ce que nous serons. Que ce que nous aimons, nous l’aimerons toujours. Que ce que l’on déteste sera éternellement ce que l’on déteste.

Jusqu’à ce que quelque chose ou quelqu’un vienne secouer nos idées reçues, nos statements, notre confort. Quelque chose d’inattendu et d’inévitable. Un (micro-)événement qui n’aurait probablement pas dû en être un. À un moment autre, rien n’aurait changé. Ce licenciement nous aurait plongés dans un profond désarroi ; ce divorce, déstabilisés ; ce déménagement, perturbés. Sauf que ce jour-là, par une espèce de conjoncture astrale, une intervention divine, une main qui se tend, ce qui nous aurait fragilisés nous rend plus forts. Nous permet de sortir de cette comfort zone qui nous aura étouffés longtemps, trop longtemps. Et tout devient clair. Tellement clair. La liberté s’est offerte à nous sans crier gare. La liberté de choisir, de voir ailleurs, de se rendre à l’horizon au lieu de le regarder. De quitter ce cocon où tous les points de repères convergeaient. Et cette nouvelle vie qu’on avait peur de rêver s’est imposée doucement. Elle a quitté nos songes pour devenir réelle.

Un jour, une nuit, quelqu’un a fait voler en éclats nos certitudes. Tout ce en quoi on croyait. Quelqu’un a ébranlé notre vie, notre quotidien. Tout ce qui nous paraissait évident ne l’est plus. On a largué les amarres, abandonné son petit chez soi étriqué pour emménager avec lui/elle. Nous, les réfractaires de la vie à deux, les derniers défenseurs de l’indépendance. On a mis notre brosse à dents dans son gobelet ; lui a fait de la place dans notre armoire, dans notre lit. On a mis une robe blanche, fait un enfant quand on n’en voulait pas (ou plus). On a sorti le grand jeu, les violons. On a fondu comme une guimauve. On s’est engagé sur une voie sirupeuse. On a communiqué avec des émoticons, donné des surnoms stupides. On a troqué notre cynisme pour une romance digne du plus mauvais roman de Barbara Cartland, digne de la pire chanson de Julio. On a accepté que l’autre nous prenne en main, prenne soin de nous, prenne le volant.

Un jour, une nuit, quelqu’un nous a dit deux mots. Trois, tout au plus. Et fait dévier le chemin qu’on avait emprunté. « J’ai assemblé les pièces de Lego. » « De l’ego ? » Tout à été dit lors d’une séance de psychanalyse. Une question. Il aura suffi de trois mots pour tout bousculer. Pour comprendre qu’on se trompait sur tout, et surtout sur nous-mêmes. Que nos chagrins n’étaient qu’en fait des claques foutues à notre ego. Qu’il prenait trop de place. Qu’il écrasait notre vraie nature.

Et un jour, une nuit, quelqu’un nous a bousculés, fait changer de boulot, prendre des risques. Emmenés loin, ailleurs. Appris une autre langue, fait rencontrer des gens nouveaux. Nous a fait quitter un pays où l’on ne se sentait pas bien, pas à notre place. En l’espace d’un entretien d’embauche, on a fait nos valises, rangé nos cartons et tenté l’aventure. On a pris l’avion pour Paris, le Cachemire, Pékin. On s’est engagé dans la Croix-Rouge, on a enseigné le français au fin fond de l’Amazonie. On a pris des leçons de chant, des cours de danse, de djiing, de gemmologie, de pâtisserie ; arrêté la comptabilité, la médecine, la pub, les finances. On est devenu bar tender sur une île grecque, chef à Washington, actrice à Hollywood, prof de yoga à Hawaii.

Une rencontre, un mot, deux phrases, un regard pour tout envoyer valser. Pour écrire un nouveau chapitre, fermer un livre. Pour que tout devienne magique, que les étincelles resurgissent dans les yeux, qu’on ne fuie plus le bonheur.

Nous avons tous des credo et des convictions. Nous sommes souvent persuadés que nous avons raison. Que nous ne changerons pas. Que la vie que l’on mène est celle que l’on mènera jusqu’à la fin. Que ce que nous sommes restera ce que nous serons. Que ce que nous aimons, nous l’aimerons toujours. Que ce que l’on déteste sera éternellement ce que l’on déteste.Jusqu’à ce que...

commentaires (3)

Madame, vos textes toutes les semaines sont une ode à la vie. Pourquoi pas un recueil à « la première gorgée de bière »? Les mêmes madeleines de Proust! Merci pour ces moments.

Bachir Karim

19 h 46, le 13 octobre 2018

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Commentaires (3)

  • Madame, vos textes toutes les semaines sont une ode à la vie. Pourquoi pas un recueil à « la première gorgée de bière »? Les mêmes madeleines de Proust! Merci pour ces moments.

    Bachir Karim

    19 h 46, le 13 octobre 2018

  • UN REFLET ! UN SOUPIR ! UN REGRET ! UNE LARME ! UNE AME DANS NOTRE AME APPELLE ET NOUS ALARME !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 28, le 13 octobre 2018

  • Version intellectuelle de «  un jouuuuur mon prince viendraaaa »?

    Marie-Hélène

    07 h 32, le 13 octobre 2018

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