En 2015, dans un entretien télévisé, le général Michel Aoun avait promis aux Libanais qu’ils auraient un président issu de leurs souffrances. Ils ont attendu deux ans et demi après la fin du mandat de Michel Sleiman pour l’avoir, mais le long calvaire n’est pas terminé. Aujourd’hui, ils sont en quelque sorte en train de payer pour leur attachement à leurs droits, à leur souveraineté et à leurs principes, tels qu’ils ont été définis dans le dernier discours du chef de l’État à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies. Devant les délégations présentes dans la salle, le président Aoun a lancé un appel à la conscience des dirigeants du monde pour leur rappeler que « du jour au lendemain, tout un peuple s’est retrouvé sans identité, sans patrie. Que chacun de nous imagine un instant qu’une telle résolution internationale, sur laquelle il n’a aucune emprise, le spolie de sa terre et de son identité. Telle est aujourd’hui la situation du peuple palestinien... Qui peut garantir que les petits peuples, comme le peuple libanais, n’auraient pas à subir un tel sort ? » Le chef de l’État a aussi précisé que « l’impunité qui entoure la cause palestinienne a provoqué de nombreuses guerres au Moyen-Orient et engendré une résistance qui ne cessera pas avant d’éliminer l’iniquité et de faire régner la justice ». Ces propos jamais entendus auparavant sous la voûte du siège de l’Assemblée générale des Nations unies ont marqué les esprits et le président a reçu les félicitations de nombreux représentants d’États présents dans la salle. Mais depuis, les menaces israéliennes se sont multipliées, contre le Liban et en particulier contre son aéroport.
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Dans un style peu fréquent dans les échanges internationaux, les dirigeants israéliens ont apostrophé directement le ministre des Affaires étrangères et les passagers d’un avion de la MEA. Pour les proches de Baabda, en dépit de ces menaces, les risques de guerre restent limités. Selon les sources proches du palais présidentiel, il s’agit surtout d’une nouvelle tactique israélienne pour semer la panique chez les Libanais et jouer sur leurs divisions dans le but de soulever la question des armes du Hezbollah. D’ailleurs, la réaction du ministre des Affaires étrangères ne s’est pas fait attendre. Il a convoqué les ambassadeurs accrédités au Liban pour leur montrer, preuves à l’appui et sur le terrain, que les allégations de Benjamin Netanyahu et de ses collaborateurs sont dénuées de tout fondement. En tout cas, pour le Liban, le Hezbollah n’est pas un groupe terroriste. Il a joué un rôle primordial dans la libération du territoire de l’occupation israélienne et il bénéficie d’un large soutien populaire qui lui a permis d’avoir un bloc parlementaire important. Toutes ces manœuvres israéliennes seraient donc destinées à miser sur les divisions internes libanaises pour pousser une partie des Libanais à se révolter contre le Hezbollah. Mais selon les sources proches de Baabda, une telle tactique n’a aucune chance de se réaliser, les Libanais ayant appris à travers les expériences du passé que leur unité est leur plus grande force.
Les Israéliens mettent toutefois à profit les difficultés de former un gouvernement pour attiser les dissensions et raviver les peurs, mais selon les sources de Baabda, il faudra bien que le gouvernement soit formé un jour et il sera à la hauteur des attentes des Libanais. C’est justement pour cela que la formation prend du temps. Il semble en effet que les véritables causes du retard dans la formation du cabinet sont dues à la volonté de ceux qui veulent faire payer au Liban ses positions souveraines, pousser le chef de l’État à faire des concessions pour pouvoir par la suite, dans le cadre d’un gouvernement qui ressemblerait fort à l’actuel et qui ne respecterait pas les équilibres issus des dernières législatives, paralyser son action. Selon les visiteurs de Baabda, le président qui avait déclaré à la veille de son élection à la tête de l’État « Je ne veux plus que les chrétiens, et les Libanais en général, pleurent » ne peut pas accepter de laisser les influences extérieures détruire les espoirs et les aspirations des Libanais. Il laissera donc les choses prendre leur temps et il reste convaincu qu’en fin de compte, le gouvernement sera formé, de façon équitable et conforme au poids politique de chaque force.
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Selon ses proches, Aoun garde à portée de main le texte de la Constitution dont il lit et relit les articles pour trouver un moyen qui lui permettrait de faire bouger les choses au sujet de la formation du gouvernement. Tout en misant sur la bonne volonté du Premier ministre désigné, qui l’assure à chacun de leurs entretiens de son attachement au compromis présidentiel, Michel Aoun songerait à étudier la possibilité de pousser les députés qui ont désigné Saad Hariri pour la formation du gouvernement à retirer cette nomination, sachant que rien ne l’interdit dans la Constitution. Ce n’est toutefois encore qu’une hypothèse, car le chef de l’État se consacre actuellement à la préparation de son voyage à Erevan pour le sommet de la Francophonie, où il doit prononcer un discours et où une rencontre avec le président français Emmanuel Macron est probable. Ce voyage devrait être le dernier du président cette année, alors qu’en 2019, il s’agira de préparer le sommet économique arabe qui doit se tenir à Beyrouth. La capitale libanaise attend en effet de nombreux visiteurs de marque au cours du premier trimestre 2019 et, selon les visiteurs de Baabda, le pays devrait être à ce moment-là doté d’un gouvernement en fonction. Pour deux raisons : d’abord, ceux qui misent sur un changement de position du président devront renoncer à ce pari, et ensuite, les développements régionaux attendus ne seront pas en faveur de ceux qui croient à un effondrement de la République islamique d’Iran ou à un renversement de situation en Syrie, ou encore à une nouvelle attaque israélienne qui devrait modifier les rapports de force actuels...
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Il ya un moment natanyahu devait compter jusqu'à cent pour prendre la décision de venir guerroyer au Liban. Aujourd'hui le voisin ennemi aussi fanfaron soit-il , devra compter des centaines de fois et jusqu'à s'époumoner et perdre le souffle pour oser attaquer le Liban. En fait , et le mossad y aidant, le premier ministre israélien connait très bien l'étendu de notre nouveau potentiel militaire . Et pour conclure comme dit le proverbe : un homme averti en vaut plus que deux .
16 h 42, le 02 octobre 2018