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Culture - Interview

Matthieu Chedid : Mon envie d’explorer la culture libanaise est profonde

Il se définit comme un alchimiste et cite souvent sa grand-mère, l’écrivaine Andrée Chedid. « L’Orient-Le Jour » a pris le bus avec lui jusqu’à Achrafieh, deux jours avant son mégaconcert à Baalbeck, demain samedi 4 août.

Il se définit comme un alchimiste et cite souvent sa grand-mère, l’écrivaine Andrée Chedid. « L’Orient-Le Jour » a pris le bus avec Matthieu Chedid, alias M, et une bonne partie de sa famille – son frère Joseph, son père Louis, sa sœur Anna et sa fille Billie – deux jours avant son mégaconcert à Baalbeck, demain samedi 4 août. Photo Yann Orhan

Matthieu Chedid est arrivé au Liban accompagné de son frère Joseph, de son père Louis, de sa sœur Anna et de sa fille Billie, qui lui a fait l’heureuse surprise, au dernier moment, de prendre l’avion avec eux. Dans le chaos d’une ville qu’il n’a plus vue depuis six ans, il avoue être emballé par ce chemin initiatique qu’il fait, entouré des siens. Il répond aux questions de L’Orient-Le Jour.

Treize Victoires de la musique, trois Césars et sept albums à succès. Comment fait-on pour garder les pieds sur terre avec une telle reconnaissance ? 
Cette reconnaissance me permet surtout d’acquérir de la confiance et de donner du sens à mon chemin artistique. C’est vrai que c’est très important de ne pas s’approprier ses succès, puisque le succès est quelque chose qui nous échappe et cela serait une hérésie de penser que l’on y est pour quelque chose. C’est vraiment une constellation d’événements qui crée ce succès. C’est pour cela que je remercie tous les jours ma bonne étoile.

Pour les cinéphiles, rien qu’à évoquer la lettre M, on est tenté de poursuivre « M le Maudit », mais ça ne vous a pas empêché de l’adopter. Vous n’êtes pas superstitieux, je suppose ?
 M est aussi une lettre magique. C’est le verbe « aimer » qui raisonne dans la lettre M, et c’est ce qui m’a toujours inspiré.
 
Votre style musical est changeant, vous passez d’une couleur à l’autre. Vous abandonnez la précédente ou vous tissez un fil conducteur ?
Pour moi, la musique, c’est vraiment comme la vie, c’est une variation avec plein de nuances. On passe de moments tristes à des moments joyeux, de moments calmes à des moments excitants. J’aime expérimenter autour de différentes humeurs, varier les plaisirs et être toujours audacieux. C’est peut-être ça qui définit le style de M : la variation, la diversité. Ça m’ennuierait terriblement de me limiter à un seul style, ce n’est pas ma nature, et comme dirait ma grand-mère : « On est multiple. »



 
Vous n’êtes pas sans ignorer que la symbolique du hibou est négative. En Égypte, il exprime l’obscurité, et dans la Chine antique, c’est un animal qui dévore sa mère. Vous êtes pourtant un être positif, un homme drôle qui aime la vie. Pourquoi ce look ?
 Ma grand-mère Andrée Chedid, qui travaillait à la galerie Maurice Garnier, m’a offert, lorsque j’étais plus jeune, une lithographie du hibou de Bernard Buffet. Je me suis rendu compte, des années plus tard, que c’est ce hibou qui m’avait inconsciemment inspiré ma coiffure... Il faut savoir que cet animal représente aussi la sagesse et la lucidité. Il a une vision pénétrante. Je ne suis pas du tout superstitieux et j’aurais plutôt tendance à voir le côté positif des choses.
Alors, si la symbolique du hibou a des aspects à la fois négatifs et positifs selon différentes cultures, comme dans la vie, je ne vais garder que le positif !
 
Vous avez ramené la culture malienne en France et en musique, qu’en est-il de celle de vos origines, libanaises et égyptiennes ?
 Je pense que d’une certaine manière ma connexion à l’Afrique vient de mes racines libanaises et égyptiennes. Rien n’est vraiment prémédité, ces projets se font de façon très naturelle. Il est d’ailleurs fort possible que, si je passe plus de temps au Liban, je finisse par avoir une envie puissante de créer quelque chose ! Probablement avec Ibrahim Maalouf avec qui on a toujours plein d’idées et de projets en tête.

Pourquoi avoir attendu six ans pour revenir à Beyrouth ?
 C’est vrai que cela fait déjà six ans... Le temps passe tellement vite! J’ai toujours eu cette envie profonde de ce retour à mes racines, d’explorer la culture libanaise et de m’en nourrir. Ibrahim Maalouf me propose chaque année de venir le retrouver dans ses maisons familiales dans les montagnes libanaises, mais mon emploi du temps ne m’a malheureusement pas permis de revenir avant. C’est pour ça que c’est un rendez-vous très important pour moi et ma famille de venir à Baalbeck ce 4 août.

Comment vous vous définissez, plutôt artiste ou artisan ?
 Le mot qui me définirait le mieux serait plutôt alchimiste. C’est vraiment l’idée de l’expérience, de l’expérimentation, de la vibration, de la transmutation. Partir de quelque chose d’assez simple et, si possible, de ramener de la lumière, de rendre cela le plus magique possible.
 
Être né dans une famille comme la vôtre est une bénédiction ou une contrainte ? Vous vous deviez de perpétuer la tradition ?
 La question ne se pose même pas. C’est d’abord une affaire de transmission et c’est vrai que ça remonte à assez loin, en tout cas du côté des Chedid : Alice Godel et sa fille Andrée Chedid ont toutes deux transmis à la famille cette tradition de littérature, de poésie, cette exigence du mot juste. Mon père a récupéré le flambeau avec ses merveilleuses chansons. Puis mon frère et mes sœurs qui ont aussi hérité de cette vibration artistique, et aujourd’hui ma fille qui commence à emprunter le même chemin. C’est une transmission, une lignée d’artistes. Ce qui est certain, c’est que ma grand-mère Andrée me protège de certaines vulgarités, comme si je n’avais pas le choix de sortir de cette lignée. C’est plutôt une protection finalement.
 
Et si vous n’aviez pas été artiste, quel chemin auriez-vous emprunté ?
 Difficile de savoir car je ne sais pas vraiment faire autre chose... Je dirais quand même que j’ai une forte attirance pour la cuisine, peut-être car c’est aussi une alchimie de saveurs.
Il y a quelque chose de très créatif et de très généreux dans la cuisine qui m’attire beaucoup. Être chef m’aurait bien plu !
 
Vous avez conçu un spectacle spécial pour Baalbeck. Votre famille sera là. Un certain Ibé peut-être aussi ?
 Ibé est même le lien indéfectible entre ce spectacle et le Festival de Baalbeck. Je ne peux pas imaginer ce concert sans Ibrahim (Maalouf) car c’est lui qui m’a incité à venir et m’a fait me sentir légitime. Il m’a donné envie de proposer quelque chose d’exceptionnel pour ce show et je vous promets que nous allons vivre une grande fête, une véritable célébration.
Le concert devrait s’ouvrir sur une symphonie composée par mon grand-oncle (le frère d’Andrée Chedid), Gabriel Saab, où vont retentir les mots et la voix d’Andrée. Cela risque de vibrer incroyablement dans les vestiges romains de Baalbeck. Et j’ai hâte de retrouver le public libanais.
 
Quel sera votre rôle et celui de chacun ?
 J’ai le rôle de maître de cérémonie, cela reste un concert de -M- à la base. Je jouerai mes chansons les plus identifiées pour que les gens s’y retrouvent. Mais il va y avoir plein de surprises et évidemment le lien familial avec Louis, Joseph, Anna et Andrée que l’on va retrouver au fil du concert.
Je vois ce spectacle comme un voyage initiatique pour nous et poétique pour le public. En plus de la famille Chedid, Ibrahim sera aussi sur scène, avec d’autres invités, mais je ne vous en dis pas plus, je préfère garder quelques surprises...


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