Ce n’est pas la première fois que la Beirut Pride, conçue comme une série d’activités pour sensibiliser à la réalité de la communauté LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) au Liban, est interrompue dans des circonstances sécuritaires assez floues. Ainsi, le coordinateur de l’événement dans sa version 2018, Hadi Damien, a été détenu toute une nuit, de lundi à mardi, à la gendarmerie de Hobeiche, à Beyrouth, et interrogé sur base de la « traduction » de textes publiés sur le site et les pages de l’événement. Il n’a été relâché qu’après avoir signé un engagement à « annuler » le reste des activités. Sur sa page Facebook, Beirut Pride écrivait hier que les activités sont « suspendues » pour toute la semaine. Elles étaient prévues du 12 au 20 mai initialement.
Contacté par L’Orient-Le Jour, Hadi Damien explique les circonstances de sa détention. « Dans le cadre des activités de la Beirut Pride, il y avait, lundi, la lecture d’un texte théâtral, Ogres, qui porte sur plusieurs crimes homophobes, explique-t-il. L’événement avait lieu dans le studio Zoukak. Le studio s’était enquis auprès des autorités compétentes sur l’éventuelle nécessité d’obtenir une autorisation de la censure, et on lui avait précisé qu’il n’y avait pas nécessité dans ce cas. »
Or, lundi, peu de temps seulement avant le début du spectacle, on fait savoir aux organisateurs que les règles ont changé et qu’une autorisation est indispensable… et on commence à poser des questions plus générales sur la Beirut Pride. « J’étais en contact avec la Sûreté générale afin de tenter de trouver une solution pour le spectacle du soir même, poursuit Hadi Damien. Au téléphone, la police me demande de comparaître le lendemain (mardi) à 11 heures, pour apporter les clarifications exigées. »
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Mais la soirée ne devait pas se passer sans rebondissements. Moins d’une demi-heure après ces événements, plusieurs agents débarquent à Zoukak, raconte Hadi Damien, et demandent à l’emmener à la gendarmerie de Hobeiche pour qu’il y soit interrogé. Arrivé sur les lieux, le jeune homme comprend qu’il y passera la nuit… dans une cellule conçue pour cinq personnes mais qui en contenait ce soir-là 39 ! « Le lendemain vers 11 heures, on m’emmène pour l’interrogatoire mené par le chef de la gendarmerie », raconte-t-il. Et c’est là qu’il apprend le motif de sa présence chez les policiers : la traduction, en arabe, des textes décrivant les activités de la Beirut Pride, postés sur le site internet de l’événement et les pages des réseaux sociaux. Une traduction qu’il a jugée « incorrecte » et « déformée ». Ce qu’il a expliqué aux agents, avant de « clarifier tous les points litigieux ».
Interrogées par L’OLJ sur cette affaire, des sources policières ont indiqué que cette détention est intervenue sur ordre du parquet, soulignant que lesdits textes ont été considérés comme « provocateurs et portant atteinte à la pudeur, selon plusieurs associations qui en ont notifié la justice », d’où l’interrogatoire subi par Hadi Damien. Selon ces sources, les Forces de sécurité intérieure n’ont donc fait qu’appliquer la loi et suivre l’ordre du parquet, en interrogeant la personne concernée. Elles ont confirmé que M. Damien a été libéré après avoir signé un engagement d’annuler le reste des activités de la Beirut Pride.
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« Est-ce cela que l’on a considéré comme une provocation ? »
Me Layal Sakr, avocate de Hadi Damien, explique à L’OLJ les complications qui découlent de cette « traduction ». « Dans ces textes, Hadi Damien avait décrit, avec beaucoup d’honnêteté et de franchise, des activités, théâtrales et autres, qui visent à sensibiliser à la situation des LGBT dans le pays, dit-elle. La retranscription en arabe a utilisé des termes qui donnent une autre intonation à ces activités, comme celui de “contre nature” par exemple. Or ce sont des activités en tous points similaires à ce qui se passe régulièrement dans la vie nocturne en ville, mais rendues publiques cette fois. Est-ce cela que l’on a considéré comme une provocation? »
Quoi qu’il en soit, il a été donné à Hadi Damien le choix de signer un engagement d’annuler les activités restantes de la Beirut Pride, faute de quoi son dossier serait transféré au parquet. Le principal intéressé a choisi de signer ce papier sur conseil de son avocate, d’où la décision publiée en soirée par Beirut Pride sur sa page Facebook de « suspendre » les activités cette semaine. Me Sakr souligne que « ne pas signer cet engagement aurait signifié un transfert de son dossier au parquet, des audiences, un jugement, etc. toutes choses dont il peut se passer, étant plus fort quand il est libre de ses mouvements ».
Ce n’est pas la première fois que la Beirut Pride est interrompue : il y a un an, c’est pour des motifs sécuritaires qu’une marche prévue dans les rues de Beyrouth avait été interdite. Interrogé sur les événements qui sont venus assombrir l’édition 2018 de la Beirut Pride, Hadi Damien parle d’« intimidation » et d’« abus de pouvoir ». Autant lui que son avocate rappellent que la lutte pour les droits des LGBT, notamment l’amendement de l’article 534 du code pénal, qui sanctionne toujours les relations sexuelles dites « contre nature », des termes susceptibles d’être interprétés de multiples manières, ne s’arrête pas aux activités de la Beirut Pride. M. Damien évoque, enfin, des contacts avec certaines parties politiques afin de faire évoluer la situation.
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18 h 12, le 16 mai 2018