Les modalités du vote des Libanais de l’étranger n’ont pas fait l’unanimité hier en Conseil des ministres. De nombreuses questions demeurent quant à la volonté de faire venir les bulletins de vote au Liban afin de procéder au dépouillement. Une mesure qui fait craindre à certains ministres de se retrouver face à des tentatives de fraude. Les ministres se sont également penchés sur l’affaire de la divulgation des données personnelles des électeurs de la diaspora qui a éclaté cette semaine.
« Nous avons discuté de la transparence du vote de la diaspora. Avec toute notre confiance dans les ambassadeurs libanais, ils ne peuvent pas travailler dans tous les bureaux de vote et le ministère de l’Intérieur ne peut pas envoyer des inspecteurs à 140 bureaux. Nous craignons une multitude de recours en invalidation », a mis en garde le ministre de l’Éducation, Marwan Hamadé.
Répondant à ces accusations, le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a affirmé que « tous les moyens permettant d’assurer la surveillance et la transparence du vote des Libanais de la diaspora ont été assurés », soulignant que son ministère « œuvre pour augmenter la transparence à l’étranger », dans les 40 pays où la diaspora est appelée à voter. « Il ne faut pas que nous exportions nos divisions à l’étranger », a-t-il appelé.
Le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, a quant à lui indiqué que son « ministère ne peut pas envoyer des équipes dans les bureaux de vote à l’étranger, qui seront donc surveillés via des caméras liées au ministère de l’Intérieur ». « Il n’y aura pas de dépouillement dans les bureaux de vote à l’étranger. Les urnes seront scellées et c’est la société de courrier rapide DHL qui se chargera de les faire parvenir à Beyrouth, jusqu’à la Banque du Liban », a-t-il dit.
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Les données personnelles des électeurs
Le ministre d’État à la Planification, Michel Pharaon, a pour sa part commenté le scandale causé cette semaine par la transmission présumée des données personnelles des électeurs étrangers à certains candidats aux législatives. L’affaire avait éclaté après que le député sortant Nicolas Sehnaoui, candidat à Beyrouth I, a contacté des électeurs résidant à Paris via l’application WhatsApp.
« J’ai demandé s’il y avait eu effectivement des données qui ont fuité à travers certaines ambassades libanaises à l’étranger. J’ai proposé qu’une enquête soit ouverte après ce qu’il y a eu lieu à Paris. Ce qu’il s’est passé est douteux », a estimé M. Pharaon, joint par L’Orient-Le Jour. « J’ai posé la question en Conseil des ministres et je n’ai pas eu de réponse claire. M. Bassil s’est contenté de dire qu’on lui avait demandé ce genre d’informations, mais qu’il avait refusé de les donner, a-t-il souligné. C’est dommage parce qu’il y a un malaise après ce qui s’est passé dans la capitale française. Il y a une quasi-certitude que les données personnelles des électeurs ont été transférées à certains candidats. »
Gebran Bassil s’est défendu dans l’affaire Sehnaoui, soulignant que « les informations relatives aux électeurs ne sont pas secrètes ». « Chacun possède une partie des données personnelles des électeurs, elles peuvent être distribuées et certains travaillent à les récupérer. Il est demandé au ministre de l’Intérieur et à moi-même de ne pas les divulguer officiellement, mais à mon avis c’est que tout le monde peut y avoir accès », a-t-il dit.
Le député de Batroun, Boutros Harb, qui a été l’un des premiers à dénoncer la divulgation des données des électeurs, a vivement réagi à la question hier sur Twitter. « C’est honteux que les numéros de téléphone des Libanais de la diaspora et leurs adresses e-mail soient mis à la disposition des candidats du courant dirigé par le ministre des Affaires étrangères (CPL), alors que les autres candidats n’y ont pas accès, ce qui constitue une entorse criante à la loi », a-t-il écrit.
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Le Mondial sur Télé-Liban
Sur un tout autre plan, le ministre de l’Information Melhem Riachi a annoncé à l’issue du Conseil des ministres que son ministère allait entrer en contact avec la chaîne d’informations sportives BeIN afin de discuter des moyens d’assurer gratuitement la retransmission en direct des matches de la Coupe du monde de football sur la chaîne publique Télé-Liban.
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La France autorise aussi les français résidents à l'étranger de voter pour élire des députés au parlement français, à la différence, que ces non-résidents élisent des députés qui les représentent spécifiquement. C'est très bizarre que des non-résidents libanais puissent voter pour la députation dans leur lieu d'origine. Prenons un cas extrême pour illustrer mon propos. Si en 2050, 10 millions de libanais de l'étranger voteraient contre 5 millions de libanais résidents au Liban, les non-résidents auraient plus de pouvoir pour choisir les députés libanais que les libanais au Liban. Cette loi électorale a réussi à mettre sous-toit des bizarreries incroyables.
11 h 36, le 05 avril 2018