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"Je ne savais rien" : en Syrie, les souvenirs très sélectifs des jihadistes étrangers capturés

Nawaf, Bahreïni de 22 ans, et Hassan, Turc de 49 ans, étaient-ils aussi subalternes et pacifiques qu'ils le disent au sein de l'EI? Des indices sèment le doute.

Hassan, un Turc de 49 ans, soupçonné d'avoir collaboré avec le groupe Etat islamique et actuellement détenu par les Unités de protection du peuple kurde (YPG), donnant une interview près d'un poste de police à Rmeilan, dans la province syrienne de Hassaké, le 13 février 2018. AFP / Delil souleiman

Simples "employés" du groupe Etat islamique, ils n'ont guère combattu, étaient réduits au silence et ont fini par le fuir : deux jihadistes étrangers arrêtés en Syrie et interrogés par l'AFP se présentent comme les victimes d'un "califat" dévoyé, où ils n'auraient joué qu'un rôle minime.

Comme des centaines d'hommes de plus de 40 nationalités, Nawaf, un Bahreïni de 22 ans, et Hassan, un Turc de 49 ans, sont venus garnir ces derniers mois les prisons du nord-est syrien, qui continuent d'accueillir chaque semaine de nouveaux détenus, à mesure des avancées des forces arabo-kurdes, militairement soutenues par les Occidentaux, dans les derniers réduits tenus par l'EI. Ce mardi, au quartier général de la police de Rmeilane, les deux hommes, non menottés, ont l'air en bonne santé sous leurs pantalons et vestes de jogging propres.

Nawaf, allure d'adolescent, visage poupin et yeux clairs, dit avoir rejoint l'EI à l'été 2015 pour "défendre les musulmans bombardés", sans préciser s'il vise le régime de Damas, ou les Occidentaux qui avaient commencé à frapper l'EI à l'été précédent. L'islam rigoriste promis par le "califat" l'attire, jusqu'au port du voile intégral imposé aux femmes: "C'est bien", dit-il, "comme ça elles n'attirent pas les gens sexuellement".

Passé par le Qatar, puis la Turquie, il est d'abord envoyé combattre en Irak, une période sur laquelle il ne s'appesantit pas, puis revient en Syrie pour s'établir à Raqqa, "capitale" de facto de l'EI dans le nord syrien. Il dit y avoir mené une "vie normale", hors des exécutions et autres châtiments violents de l'EI, "que l'on ne voyait que dans les médias ou sur les films de propagande". Il se marie avec une jeune Koweïtienne de 24 ans, avec qui il aura une petite fille peu après.

Plus âgé, Hassan le Turc, crâne dégarni, yeux bleu et courte barbe blanche, se présente comme un civil diminué par plusieurs opérations du dos. Il arrive à Raqqa courant 2015, où sa femme, ouzbèke, est médecin à domicile, et lui "travaille comme gardien de parking". "Je ne combattais pas, je ne savais rien" des activités de l'EI, dit-il.


(Lire aussi : Le sort des jihadistes étrangers détenus en Syrie reste en suspens)


'Personne n'osait contester'
A partir de cette année-là, l'EI revendique des attentats sanglants à travers l'Europe. "Je ne les approuve pas", dit Nawaf. "Mais c'est la philosophie de l'EI, et personne n'osait la contester" de peur d'être accusé de trahison et exécuté, souligne-t-il.

Les deux hommes étaient-ils aussi subalternes et pacifiques qu'ils le disent au sein de l'EI? Des indices sèment le doute.
Avant Raqqa, Hassan dit être passé par des camps de combattants en Syrie et en Turquie, et avoir vécu "avec des Ouzbeks" au Waziristan, une région tribale pakistanaise où les seuls Ouzbeks présents étaient des jihadistes réputés brutaux, longtemps affiliés à el-Qaëda avant de rallier l'EI. Nawaf dit lui être un "simple employé" au Bureau des recherches de l'EI, chargé de préciser la doctrine islamique. Mais c'est à l'époque un centre de pouvoir très influent, car dirigé par un autre Bahreïni, son mentor Turki al-Binali, l'un des plus hauts dignitaires religieux de l'EI.

Nawaf comme Hassan seront poussés hors de Raqqa à l'été 2017 par l'avancée de la coalition arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS). Exfiltrés par l'EI bien avant le début de la bataille, ils atterriront dans la région de Mayadine, dans la province orientale de Deir ez-Zor, où les jihadistes se déchirent, selon eux, en sanglants règlements de compte.

La peur d'en être à leur tour victimes les pousse à s'enfuir. A l'automne, Hassan prend la direction du nord à moto avec sa femme. Le couple sera arrêté à un checkpoint kurde, et séparé en détention. Nawaf donnera près de 4.000 dollars à un passeur véreux qui finira par le "donner" aux forces kurdes alors qu'il s'apprêtait à franchir la frontière turque, début janvier.

Les deux hommes n'ont aucune idée de ce qui les attend, alors que la plupart des pays traînent les pieds pour récupérer leurs jihadistes détenus en Syrie. Tous deux affirment avoir tourné la page de l'EI. "Ce ne sont que des traîtres, des tortionnaires, ils n'ont rien de musulman", dit Hassan, qui veut juste trouver à l'avenir "un bon endroit pour pratiquer l'islam".



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comme par hasard ! c'est des pauvres égarés, ils ont rien fait du foutage de gueule

Talaat Dominique

18 h 41, le 16 février 2018

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Commentaires (1)

  • comme par hasard ! c'est des pauvres égarés, ils ont rien fait du foutage de gueule

    Talaat Dominique

    18 h 41, le 16 février 2018

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