Le Premier ministre libanais, Saad Hariri, qui s'est envolé mercredi soir pour Paris pour une visite familiale de quelques jours avant de retourner au Liban a accordé un entretien à Paris Match qui a publié, jeudi matin, l'interview titrée "Je suis toujours en danger de mort".
Le chef du gouvernement qui avait annoncé le 4 novembre sa démission depuis Riyad, avant de la geler au lendemain de son retour au Liban, le 22 novembre, a démenti avoir été détenu par les Saoudiens. "J’ai démissionné depuis Riyad avec l’intention de créer un choc positif pour le Liban, a-t-il dit. Si j’avais été détenu, je ne serai pas ici, à Beyrouth, aujourd’hui. Avant cela, j’ai pu aller à Paris, en Egypte, à Chypre. J’étais libre".
Il a également affirmé qu'il reprendra son rôle de Premier ministre comme si de rien n’était. "Je souhaitais que le monde comprenne que le Liban ne peut plus tolérer les ingérences d’un parti comme le Hezbollah dans les affaires des pays du Golfe, où vivent 300 000 Libanais. Ils sont très importants pour notre économie, a-t-il affirmé avant d'ajouter : Nous ne devons pas payer pour les agissements du Hezbollah".
Le président Michel Aoun avait lancé lundi une série de concertations avec les principaux pôles politiques du pays afin de persuader le Premier ministre de revenir définitivement sur sa démission. Ce dernier exige une politique de distanciation effective par rapport aux conflits régionaux, notamment en Syrie, où le Hezbollah, allié de l'Iran, soutient militairement le régime de Bachar el-Assad.
Concernant les armes du parti chiite, M. Hariri a indiqué qu'il fallait différencier entre son rôle politique et son rôle militaire. "Il faut bien faire la distinction. Au Liban, le Hezbollah a un rôle politique. Il a des armes, certes, mais il ne les utilise pas sur le sol libanais. L'intérêt du Liban est de faire en sorte que ces armes ne soient pas utilisées ailleurs. De là vient le problème", a-t-il déclaré. "Trop de sang a coulé dans la région. Je redoute que l’ingérence du Hezbollah à l’extérieur finisse par coûter très cher au Liban, a-t-il ajouté. Je n’accepterai pas qu’un parti politique libanais participe à des manœuvres qui servent les intérêts de l’Iran".
"Le Liban vit un petit miracle. Nous n’avons pas eu à subir ce qui se passe en Syrie, en Irak, en Libye, au Yémen et, au début, en Egypte, a poursuivi M. Hariri. Personne ici ne souhaite revivre une guerre civile. Pour cela, il est fondamental de mettre en œuvre une politique de rassemblement, avec comme souci principal les intérêts du Liban".
Interrogé sur les menaces sur sa vie, M. Hariri a affirmé qu'elles "sont toujours là". "J’ai beaucoup d’ennemis, les extrémistes et le régime syrien. Ce dernier a prononcé une peine de mort contre moi. Ils m’accusent d’ingérence dans leur pays, a-t-il ajouté. Franchement, vous nous imaginez, nous les Libanais, faisant de l’ingérence en Syrie ?"
(Lire aussi : Le Liban officiel table sur « une unité miraculeuse »)
Questionné sur le conflit syrien, M. Hariri a estimé que le président syrien Bachar el-Assad n'a pas gagné la guerre. "Ce sont les présidents (russe, Vladimir) Poutine et (iranien, Hassan) Rohani qui ont gagné", a-t-il dit, affirmant que M. Assad "doit partir". "On se trompe en imaginant que la victoire contre Daech a résolu le problème. Le problème, en Syrie, c’est Bachar el-Assad. Ça a commencé en 2011 et, à l’époque, Daech n’existait pas, a-t-il dit. D’ailleurs, combien de personnes Daech a-t-il tué dans le monde ? 10 000, 20 000, 30 000 peut-être. Combien Bachar el-Assad en a-t-il tué? 700 000".
Interrogé sur le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammad Ben Salmane, M. Hariri l'a décrit comme étant "un modéré qui veut faire une politique d’ouverture pour son pays". "Il cherche à combattre la corruption,(...) il prône la modération et autorise les femmes à conduire. Autrefois, il n’y avait pas de cinémas, pas de concerts en Arabie saoudite", a-t-il dit.
"Israël et l’Arabie saoudite ont opéré un rapprochement. Si les Israéliens décident d’attaquer les intérêts iraniens et le Hezbollah en Syrie, comment réagirez-vous ?", interroge le journaliste. "Nous ne réagirons pas si cela se passe en Syrie", répond M. Hariri.
Au sujet des deux cent quarante employés français de Saudi Oger, la société de M. Hariri, qui n’ont pas perçu leur salaire depuis deux ans, le Premier ministre libanais a affirmé que "le gouvernement saoudien doit payer ses arriérés". "Dès qu’il l’aura fait, nous verserons les salaires. Nous avons pris ce dossier à bras-le-corps", a-t-il affirmé.
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commentaires (14)
Le liban politique croit ferme qu'il pourra continuer a vouloir la chose et son contraire..... le liban politique n'apprend pas SE(S) LECONS' le liban politique croit ferme en l'intelligence superieure de sa classe politique.
Gaby SIOUFI
10 h 18, le 01 décembre 2017