Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, reçu par le ministre d'État saoudien pour les Affaires du Golfe, Thamer al-Sabhane, lundi 13 novembre 2017 à l'aéroport militaire de Riyad. Photo Tilda Abou Rizk.
C'est une visite doublement historique que le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, entame en Arabie saoudite. D'abord parce qu'il s'agit de la première visite d'un chef religieux chrétien au royaume wahhabite, depuis sans doute le Prophète, ensuite parce qu'elle intervient dans un contexte local et régional hautement agité et inquiétant.
Le patriarche est arrivé à 18h, heure de Riyad, 17h, heure de Beyrouth. Un accueil officiel lui a été réservé. Mgr Raï a notamment été accueilli par le ministre d'État saoudien pour les Affaires du Golfe, Thamer al-Sabhane, l'ambassadeur sortant du Liban à Riyad, Abdel Sattar Issa, ainsi que le député Farès Souhaid. Il se rendra ensuite à l'ambassade du Liban pour une rencontre avec les Libanais d'Arabie.
Nombreux sont ceux qui soutiennent, non sans regret depuis que la date du voyage patriarcal a été confirmée, que la visite de Mgr Raï - qui s'inscrit dans le prolongement du processus d'ouverture enclenché par le roi Salmane ben Abdel Aziz et le prince héritier Mohammad ben Salmane - a été pratiquement éclipsée par la démission impromptue du Premier ministre Saad Hariri, samedi 4 novembre, et la tornade politique et diplomatique qui lui a succédé. Mais ce serait trop banaliser ses objectifs. Car avant tout, cette visite, de par sa dimension inter-religieuse, transcende les considérations purement locales ou mêmes régionales dans la mesure où ses résultats ne peuvent pas ne pas avoir une résonance internationale au moment où la montée de l'extrémisme et la violence qui y est associée a fortement perturbé les relations christiano-islamiques. Le message libano-saoudien provenant des assises de Riyad, où Mgr Raï est attendu en fin d'après-midi, se veut celui de paix et d'ouverture, une ouverture inhérente au processus de modernisation lancé par le prince héritier.
Le dossier libanais sera bien entendu au cœur des entretiens prévus demain au palais royal, au même titre que celui de la situation dans la région au encore de la paix en Terre Sainte. Il est prématuré de dire avec précision sur quoi les discussions porteront, mais ce qui est presque sûr c'est qu'il ne faudrait pas s'attendre à ce que le patriarcat joue, au sens technique du terme, le rôle de médiateur dans la crise née entre Beyrouth et Riyad, après la démission de Saad Hariri, que le Liban officiel, notamment le camp du 8 Mars, considère comme l'« otage » de l'Arabie saoudite.
(Lire aussi : Raï aujourd'hui en Arabie saoudite, « au nom de tous les Libanais »)
Dialogue entre le christianisme et l'islam
« La visite du patriarche ne relève pas de la politique interne libanaise », commente à ce sujet l'ancien député Farès Souhaid, qui se trouve également à Riyad, en sa qualité de l'une des personnalités qui avaient contribué à l'organisation du voyage. « Elle vise essentiellement à établir une politique de dialogue entre le christianisme et l'islam dans la mesure où d'un côté, le monde musulman, en crise, accuse les chrétiens de ne pas soutenir ses causes, notamment la cause palestinienne, et de l'autre, les chrétiens, de par la montée du radicalisme, considèrent les musulmans comme une source de tracas », souligne M. Souhaid.
L'importance de la visite, selon les explications fournies par M. Souhaid, réside dans le fait qu'elle imprime une nouvelle politique à même d'impacter positivement la coexistence et la convivialité islamo-chrétiennes dans la région et de contribuer ainsi à combler le fossé que les épouvantables guerres régionales et les agissements des groupuscules extrémistes avaient creusé entre chrétiens et musulmans. « Devant la montée du fondamentalisme et la peur qu'elle a engendrée, les chrétiens du Liban et de la région s'étaient tournés il y a quelques années vers l'Occident, en quête de protection et de garanties. Aujourd'hui, en 2017, c'est le patriarche maronite qui effectue le parcours inverse. A travers sa visite en Arabie saoudite, il montre que les garanties requises par ses coreligionnaires ne peuvent pas provenir de l'Occident, mais d'un dialogue de fond entre l'islam et le christianisme. Les chrétiens d'Orient ne représentent pas une communauté étrangère pour se tourner vers l'Occident. Les chrétiens réalisent désormais que c'est seulement à travers cet espace commun de dialogue qu'il peuvent avoir les garanties souhaitées », explique l'ancien député dont les propos répercutent la stratégie suivie par le patriarcat maronite.
L'une des principales conséquences des assises de Riyad sera ainsi la fondation d'un Centre international permanent de dialogue inter-religieux, au sein duquel les questions conflictuelles seraient discutées et qui véhiculera surtout un message de paix. « En 1919, le patriarche Elias Howayek s'était tourné vers un des architectes internationaux, Georges Clémenceau, pour réclamer le Grand-Liban. Cent ans plus tard, le patriarche Raï se tourne vers un des architectes de la région pour demander la création d'un centre permanent de dialogue inter-religieux. L'Eglise maronite redonne encore une fois sa raison d'être à notre pays », affirme Farès Souhaid.
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C'est une visite doublement historique que le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, entame en Arabie saoudite. D'abord parce qu'il s'agit de la première visite d'un chef religieux chrétien au royaume wahhabite, depuis sans doute le Prophète, ensuite parce qu'elle intervient dans un contexte local et régional hautement agité et inquiétant.
Le patriarche est arrivé à 18h, heure...
commentaires (8)
REÇU À L'AEROPORT PAR .....ET HARIRI SUREMENT A PRIS L'AVION POUR LES ÉMIRATS COMME IL A FAIT AVEC MACRON.....MON OEIL OUI.
Gebran Eid
23 h 30, le 13 novembre 2017