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À La Une - Témoignages

Nées en Arabie saoudite, elles y sont pourtant d'éternelles "étrangères"

Le royaume, qui compte plus de neuf millions d'immigrés, soit environ un tiers de sa population, impose depuis 2011 des quotas d'employés saoudiens pour tenter de résorber le chômage.

Des Saoudiennes dans une rue de Riyad. Photo d'illustration. Archives /AFP

"Es-tu Saoudienne? Non. Et ton mari? Non. As-tu des Saoudiens dans ta famille?" Trois questions qui reviennent sans cesse aux oreilles de Hafsa, Nour ou Samia, toutes trois nées en Arabie saoudite, un pays où elles ne trouvent pourtant "pas leur place".

"J'ai besoin de travailler pour aider ma famille". A 30 ans, Hafsa, dont les parents ont quitté avant sa naissance la Somalie à la recherche d'une vie meilleure en Arabie saoudite, cherche désespérément un emploi. Mais le royaume impose depuis 2011 des quotas d'employés saoudiens pour tenter de résorber le chômage, important chez les jeunes de moins de 25 ans qui représentent plus de la moitié de la population.

La jeune femme a tout essayé, même les jobs ne requérant aucun diplôme, comme la distribution de repas pendant la fête célébrant la fin du ramadan. Et à chaque fois, les trois mêmes questions et une porte qui reste fermée, à l'image de son avenir dans le royaume, pense-t-elle.

Hafsa souhaite désormais partir à tout prix. Où? "Ça m'est égal, un pays qui me donne des droits". "Quand mes parents sont arrivés, ils pensaient +le système, c'est le système et on le suit+. Ils n'avaient pas d'ambitions, ils ne se posaient pas la question de leur droits. Nous, c'est différent". En attendant, elle s'accommode de sa vie à La Mecque, dans l'ouest de l'Arabie saoudite, où elle vit dans un appartement avec dix membres de sa famille.

(Lire aussi : Entre les pays du Golfe et les réfugiés, un désintérêt mutuel)


"Je me sens menacée"
Nour, une Ethiopienne de 24 ans au visage débonnaire, dispose consciencieusement des plats sur une table en espérant ne rien oublier, pain, couverts... A l'occasion du grand pèlerinage annuel à La Mecque qui s'achève lundi, elle a réussi à trouver un emploi temporaire dans la restauration, à quelques pas de l'esplanade de la Grande mosquée.

Son père est arrivé en Arabie saoudite pour y étudier la loi islamique et y a fondé une famille. L'Arabie saoudite compte plus de neuf millions d'immigrés, soit environ un tiers de sa population, une proportion relativement basse comparée à d'autres pays du Golfe, comme les Emirats arabes unis ou le Qatar.

Dans la vie de tous les jours, la jeune femme mariée, drapée d'un niqab, travaille dans l'esthétique. Sans permis de travail, elle se déplace seulement chez des personnes de confiance. "Je me sens menacée, je vis avec la peur constante d'être arrêtée avec ma famille". Accumulant depuis toujours des jobs temporaires, Nour aimerait enfin trouver un emploi fixe qui lui permette d'avoir des revenus plus élevés.

Partir en Egypte?
Samia, une Somalienne de 27 ans, est au chômage. Sa mère a travaillé pendant 20 ans dans une école où elle s'occupait du ménage. Son père, aujourd'hui décédé, était comptable, employé sous le régime de la "kafala". En vertu de ce système en vigueur notamment en Arabie saoudite, les travailleurs étrangers doivent obligatoirement être parrainés par un employeur qui peut ainsi les garder à sa merci et n'ont pas le droit de changer d'emploi sans son accord préalable. Il est régulièrement critiqué par des organisations de défense des droits de l'Homme qui dénoncent une forme d'esclavage moderne.

Mais Samia n'a même pas d'employeur fixe et sait qu'elle n'obtiendra jamais la nationalité saoudienne. Elle accumule les petits boulots temporaires. "Les Saoudiens ne pourraient pas faire le travail qu'on fait. Il ne sont pas prêts à travailler", lâche-t-elle sans concession.
Déterminée, cette mère divorcée ne rêve elle aussi que d'une chose: partir. "Je n'ai pas d'avenir ici, pourquoi mon fils en aurait?" Elle se dit: pourquoi pas l'Egypte, la vie y est moins chère. "Mon fils pourra aller dans une meilleure école et moi, reprendre les études." "Ici, dès l'école, on nous apprend où est notre place. Et parce qu'on ne veut pas mettre en danger notre famille, on revoit nos droits à la baisse".

* Les prénoms ont été modifiés.

"Es-tu Saoudienne? Non. Et ton mari? Non. As-tu des Saoudiens dans ta famille?" Trois questions qui reviennent sans cesse aux oreilles de Hafsa, Nour ou Samia, toutes trois nées en Arabie saoudite, un pays où elles ne trouvent pourtant "pas leur place"."J'ai besoin de travailler pour aider ma famille". A 30 ans, Hafsa, dont les parents ont quitté avant sa naissance la Somalie à la recherche...
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