Rechercher
Rechercher

Économie - Conférence

La réorientation des investissements, une nécessité pour l’économie libanaise

Pour plusieurs experts, le secteur industriel est depuis trop longtemps pénalisé par des politiques économiques et fiscales qui favorisent la rente.

De g. à dr. : le docteur en sciences économiques, Boutros Labaki, le directeur général du ministère de l’Industrie, Alain Bifani, et l’économiste Adib Tohmé.

Pour renouer avec une croissance durable, le Liban doit revoir en profondeur certains aspects de son modèle économique et réorienter davantage ses investissements vers les secteurs productifs. Tel est le constat dressé par les trois intervenants à une conférence organisée mardi à l'hôtel Sofitel-Le Gabriel à Achrafieh, par le groupe de réflexion « La troisième voix pour le Liban ».

Pesant entre « 10 à 12 % du PIB », comme l'a rappelé pendant la conférence le docteur en sciences économiques Boutros Labaki, l'industrie a connu un véritable déclin ces dernières décennies. « Ce secteur, qui contribuait à hauteur de 16 % du PIB entre 1970 et 1975, était le deuxième plus important des pays arabes derrière l'industrie égyptienne. Il couvrait 40 % de la demande libanaise et représentait une part importante des exportations du pays », a indiqué M. Labaki.

Depuis, la situation a radicalement changé : selon les derniers chiffres du ministère de l'Industrie, les exportations industrielles ont atteint 196,8 millions de dollars à fin février, en baisse de 11,7 % en glissement annuel. Elles pesaient ainsi 43 % du total des exportations totales recensées par les douanes sur cette période. Exportations qui restent au demeurant bien plus faibles que les importations. L'amélioration de la balance commerciale du pays, en déficit de 2,8 milliards de dollars fin février (+14 % sur un an), passerait donc aussi par une stimulation de ces exportations.

 

(Pour mémoire : Les exportateurs libanais face au casse-tête des barrières normatives)

 

Fiscalité décourageante
D'où la nécessité d'augmenter des investissements productifs jusque-là freinés par les « politiques économiques mises en œuvre depuis le début des années 90 et qui ont étranglé l'industrie », a insisté M. Labaki.

Premier handicap majeur : « Les épargnants sont plus incités à déposer leur argent dans les banques qu'à l'investir dans l'industrie », a par exemple relevé pendant la conférence l'économiste Adib Tohmé. Pour rappel, les dépôts bancaires privés ont atteint 162,5 milliards de dollars à fin 2016 (+7,2 % en un an), soit plus du triple du PIB estimé par le Fonds monétaire international pour cette année.

Une tendance qui n'aide pas à la création d'emplois, comme l'a souligné pour sa part le directeur général du ministère des Finances, Alain Bifani, pendant son intervention. Rappelant que le taux de chômage « se situe entre 20 et 22 % » selon les estimations, il a noté que la création d'emplois n'avait progressé que d'un demi-point de pourcentage entre 2008 et 2010 alors que le taux de croissance du pays gravitait « autour de 8 à 9 % ».

De plus, la politique fiscale contribue elle aussi à décourager les investisseurs qui souhaitent financer des projets dans l'industrie. « Les intérêts (bancaires) sont taxés à 5 %, alors que l'impôt sur les bénéfices générés par les investissements le sont à 10 % », a par exemple constaté M. Bifani.

 

(Lire aussi : Protectionnisme : les industriels haussent le ton)

 

Or les fonds détenus par les banques servent essentiellement à financer la dette publique. « La dette publique a été multipliée par 7 en 30 ans et est détenue à 80 % par le secteur bancaire qui est devenu le principal pilier de l'économie. Nous nous endettons actuellement pour payer les intérêts de la dette, pas pour financer des secteurs productifs qui nous permettront de la payer », a déploré M. Tohmé. Fin mars, la dette publique brute a atteint 77,2 milliards de dollars (+ 8,6 % en glissement annuel).

En accord sur le diagnostic, les intervenants ont également été en phase sur les solutions à apporter. « L'État doit encourager le développement des opportunités d'investissement dans le pays et supprimer toutes les mesures qui privilégient la rente (...) afin d'assurer une croissance durable », a déclaré M. Bifani. Selon lui, il faut aussi donner les moyens au secteur privé « de créer davantage d'emplois » et de développer les infrastructures dans le domaine de l'énergie et des télécoms.

Pour M. Labaki, « il faut réindustrialiser le pays et permettre à ce secteur de devenir une source majeure de création de richesse. » Il a également listé une série de mesures régulièrement réclamées par les industriels pour relancer le secteur, parmi lesquelles figurent la lutte contre le dumping de produits étrangers concurrents, la lutte contre la contrebande, la subvention des coûts de l'énergie, l'établissement du principe de préférence nationale pour les commandes publiques, voire privées, ou encore le développement de la recherche dans ce secteur. Des solutions approuvées par M. Tohmé qui a ajouté que le Liban pouvait « espérer sortir du cycle de la dette » en atteignant ces objectifs.

 

 

Lire aussi

Projet de budget 2017 : une hausse importante des recettes fiscales

L’Association des industriels se dote d’une nouvelle base de données sur le secteur

Pour renouer avec une croissance durable, le Liban doit revoir en profondeur certains aspects de son modèle économique et réorienter davantage ses investissements vers les secteurs productifs. Tel est le constat dressé par les trois intervenants à une conférence organisée mardi à l'hôtel Sofitel-Le Gabriel à Achrafieh, par le groupe de réflexion « La troisième voix pour le...

commentaires (1)

Complètement d'accord avec ces messieurs. Nous. courons a la rune si l'on ne développons pas nos industries et améliorons notre infrastructure. Les projets sont presents et nombreux, l'obstacle est la corruption et l'inertie gouvernementale.

karim souki

10 h 01, le 24 mai 2017

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • Complètement d'accord avec ces messieurs. Nous. courons a la rune si l'on ne développons pas nos industries et améliorons notre infrastructure. Les projets sont presents et nombreux, l'obstacle est la corruption et l'inertie gouvernementale.

    karim souki

    10 h 01, le 24 mai 2017

Retour en haut