Rechercher
Rechercher

À La Une - Afghanistan

Après 20 ans, Hekmatyar fait son retour à Kaboul à la tête d'un convoi armé

"Je ne vais pas l'acclamer parce qu'il a le sang de milliers d'innocents sur les mains".

Lex-chef de guerre afghan Hekmatyar, escorté par un impressionnant convoi armé, est rentré jeudi dans Kaboul, capitale qu'il est accusé d'avoir martyrisée par des bombardements sans merci. REUTERS/Omar Sobhani

Après 20 ans d'absence, l'ex-chef de guerre afghan Hekmatyar, escorté par un impressionnant convoi armé, est rentré jeudi dans Kaboul, capitale qu'il est accusé d'avoir martyrisée par des bombardements sans merci, et qui reste partagée sur ce retour.

Son retour à près de 70 ans, à bord d'un convoi de plusieurs centaines de voitures, mitrailleuses en batterie aux portières et sur les toits, consacre, plus de sept mois après sa signature, l'accord de paix avec le gouvernement de Ashraf Ghani. Ce dernier l'a accueilli en grande pompe au palais présidentiel.
"Peu de gens croient aux efforts de paix, et pourtant cette journée démontre clairement à tous qu'avec une volonté sincère, la paix peut être atteinte", a lancé l'ex-moudjahidine anti-soviétique.

Le leader du Hezb-i-Islami, en barbe blanche et traditionnel turban noir, a été salué le long de la route par des centaines de curieux et une foule enthousiaste. Agitant les drapeaux verts du parti et des fleurs rouges en signe de bienvenue, certains chantaient, en pachtou, "Bienvenue à Kaboul, Honorable Hekmatyar".

Pour ses partisans qui lui ont jeté des roses, il est resté un chef au charisme intact. Il est loin pourtant de faire l'unanimité, alors que la situation est déjà tendue par les faiblesses du gouvernement dit d'union nationale, confronté aux offensives des talibans et aux attentats du groupe État islamique.

Depuis que son retour en ville était annoncé, de grands portraits de Hekmatyar ont fait leur apparition, rapidement déchirés ou souillés de peinture rouge ou de boue, témoignant à quel point cet accord, qui lui garantit l'impunité, reste douloureux pour une partie des Kaboulis.

 

(Pour mémoire : L'Onu a levé les sanctions contre l'ex-chef de guerre afghan Helmatyar)

 

Les pires dommages
Pour beaucoup, il reste à jamais le "Boucher de Kaboul" qui a bombardé la ville alors qu'il était Premier ministre au début des années 90, lui infligeant les pires dommages en 40 ans de guerre: un tiers de la ville fut anéanti et des dizaines de milliers de civils tués.

Il est également accusé de nombreux crimes commandités, visant les médias, les ONG et les militants féministes. Cette culture de l'impunité, dont d'autres chefs de guerre ont bénéficié avant lui, passe mal dans la population. "Ceux qui ont commis des crimes, qu'ils soient talibans ou Hekmatyar, devraient être poursuivis afin que ces crimes ne se répètent pas", martèle Mohammad Rahim Mangal, employé d'une société informatique.

"Je ne vais pas l'acclamer parce qu'il a le sang de milliers d'innocents sur les mains," affirme Edress Arabzada, 20 ans. "Malgré tout, on veut bien l'accueillir si ça nous amène la paix et la stabilité" espère le jeune homme. Mais un autre ironise au passage du cortège: "Moi je pars dans les montagnes, je ne reste pas dans une ville où vit Gulo" - sobriquet pour Gulbuddin.

L'accord garantit l'immunité à l'ancien chef de guerre, ouvrant la voie à son possible retour en politique, sans démilitarisation de sa faction dans l'immédiat.

Pachtoune au visage sévère originaire de Kunduz, dans le nord, Hekmatyar a été reçu par le président Ghani en présence de tous les officiels du gouvernement, de l'ancien président Hamid Karzaï et d'un autre chef de guerre controversé, Abul Rasul Sayyaf.

Il s'agissait du premier contact direct entre Hekmatyar et Ghani: l'accord de paix avait été signé par visio-conférence en septembre, le chef du Hezb séjournant dans un lieu tenu secret, probablement au Pakistan où il avait trouvé refuge, ainsi qu'en Iran, lors de son exil volontaire à la fin des années 90. Pour le gouvernement, cet accord envoie un signe de sa capacité à rallier un opposant armé par la négociation.

Depuis son retour, Hekmatyar joue d'ailleurs le jeu: lors de sa première apparition publique le 29 avril à Laghman, à l'est de Kaboul, il a appelé les talibans "rejoindre la caravane de la paix".
Jeudi, il a réitéré cet appel, pour "ne plus donner d'excuses aux forces internationales" présentes dans le pays - quelques 12.000 hommes, dont 8.400 Américains, dont il a cessé d'exiger le retrait comme condition préalable à la paix. "Mettons fin à la guerre, vivons comme des frères et ensuite nous demanderons aux étrangers de quitter le pays", a-t-il suggéré.

 

Pour mémoire

L’Afghanistan fait la paix avec le « Boucher de Kaboul »

Après 20 ans d'absence, l'ex-chef de guerre afghan Hekmatyar, escorté par un impressionnant convoi armé, est rentré jeudi dans Kaboul, capitale qu'il est accusé d'avoir martyrisée par des bombardements sans merci, et qui reste partagée sur ce retour.
Son retour à près de 70 ans, à bord d'un convoi de plusieurs centaines de voitures, mitrailleuses en batterie aux portières...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut