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Économie - Finance

De-risking et sanctions : Salamé réclame des garde-fous

Alors que les milieux politiques et financiers craignent de nouvelles sanctions US contre le Hezbollah, le gouverneur de la BDL a mis en garde hier les banques correspondantes contre les dérives d'une aversion excessive aux risques.

« Les banques correspondantes devraient être légalement tenues de justifier la fermeture de comptes. Sinon, elles continueront de le faire dans une optique de réduction des coûts », a alerté le gouverneur de la BDL, Riad Salamé. Photo DR

Le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, a mis en garde hier contre l'expansion du de-risking pratiqué par des banques internationales vis-à-vis de leurs partenaires dans la région arabe lors de la conférence intitulée « De-risking et sanctions : de la sensibilisation à l'aversion » à l'hôtel Four Seasons.

« Nous devons porter une attention particulière à cette (prudence) excessive si nous voulons protéger le système financier et bancaire de notre région », a prévenu M. Salamé. En cause, « des sanctions imposées par des gouvernements et des organes de contrôle à plusieurs banques correspondantes ces deux dernières années », a-t-il précisé. « La majorité des banques ne peuvent pas supporter les coûts nécessaires au contrôle de leurs banques partenaires et leurs clients, alors elles procèdent à la fermeture de comptes sans fournir aucune justification », a-t-il dénoncé. Résultat, « plusieurs pays, principalement africains, n'ont plus de relations avec des banques correspondantes (aux États-Unis) et ne sont plus en mesure d'effectuer des transferts financiers », s'est désolé M. Salamé.

Le gouverneur de la BDL craint que ce comportement des banques correspondantes conduise à l'exclusion de catégories entières du système bancaire. « Les banques correspondantes devraient être légalement tenues de justifier la fermeture de comptes. Sinon, elles continueront de le faire dans une optique de réduction des coûts », a alerté M. Salamé. « De notre côté, nous considérons que l'application des normes internationales en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme protège nos sociétés, nos économies et nos banques de ces politiques (de de-risking) », a-t-il estimé, citant plusieurs circulaires émises par la BDL et les lois adoptées entre 2015 et 2016 par le Parlement, comme la ratification de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999 ou les différentes lois en matière de transparence fiscale.

 

(Lire aussi : De Washington à Moscou, le Liban tente d’anticiper de nouvelles sanctions contre le Hezbollah)

 

Inquiétude
Si à aucun moment de son intervention le gouverneur n'a explicitement fait référence aux sanctions américaines contre le Hezbollah, ces déclarations interviennent dans un contexte particulier. Depuis plusieurs semaines, des responsables politiques et financiers manifestent leur inquiétude concernant le durcissement attendu des sanctions américaines à l'encontre du parti chiite, considéré comme une organisation terroriste par Washington.

De fait, des parlementaires ont préparé une proposition de loi intitulée Hezbollah International Financing Prevention Amendments Act of 2017 (Hifpa 2017) visant à éliminer toute forme de soutien financier au Hezbollah, qui doit encore être discutée par le Congrès. Le texte prévoit un élargissement des sanctions à toutes les personnes physiques et morales liées directement au Hezbollah et ses institutions affiliées, ainsi qu'aux organismes et aux États lui fournissant des aides financières, matérielles, militaires ou technologiques. Le projet de loi prévoit aussi l'élaboration de rapports sur les patrimoines des dirigeants du Hezbollah et ceux du mouvement Amal, jusque-là épargné par les textes américains.

 

(Lire aussi : Des personnalités proches du Hezbollah et de ses alliés pourraient être touchées par les sanctions)

 

Le président de la République Michel Aoun et le Premier ministre Saad Hariri ont indiqué cette semaine qu'ils allaient établir des contacts avec l'administration américaine en vue « d'éviter que cette loi soit votée ». « Son adoption constituerait un coup dur pour le Liban », a déclaré jeudi M. Hariri. L'exécutif libanais a également annoncé qu'une délégation composée de représentants de l'ABL, de ministres et de députés se rendra prochainement à Washington à ce propos, sans toutefois préciser si M. Salamé fera partie ou non du voyage. Cette éventualité de nouvelles sanctions est l'un des principaux arguments avancés par les milieux bancaires pour plaider en faveur de la reconduction du mandat de M. Salamé à la tête de la BDL, qui expire en juin.

Pour rappel, l'adoption en décembre 2015 du Hifpa par le Congrès avait suscité de vives tensions entre le Hezbollah et le secteur bancaire libanais. La BDL avait alors émis en mai 2016 une circulaire régissant son application afin notamment d'éviter que les banques libanaises excluent une partie de la population libanaise en tentant de réduire les risques encourus en cas de non-respect des injonctions américaines. Elle impose notamment aux banques désirant fermer un compte suspect – n'appartenant pas directement à l'une des personnes figurant sur la liste noire – de soumettre une demande d'autorisation préalable à la commission d'enquête spéciale (CSI) de la BDL.

 

 

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