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Santé - Néphrologie

Perdre du poids pour la santé de ses reins

L'obésité ne cesse de gagner du terrain. Les spécialistes tirent la sonnette d'alarme : il faut agir pour prévenir les maladies chroniques liées à ce fléau.

L’obésité peut causer sur le long terme une insuffisance rénale. Photo Bigstock

« La faim n'est pas une condition sine qua non pour manger. » Confortablement installée devant son poste de télévision, C. se sert une énième tranche de pizza, accompagnée d'un grand verre de soda. Si cette quadragénaire peut se permettre fréquemment de tels écarts, vu sa constitution maigre, de nombreuses autres personnes sont victimes du mode de vie malsain qu'elles mènent. Non seulement elles présentent une obésité, mais beaucoup d'entre elles souffrent également de maladies liées à cette pandémie, principalement le diabète, l'hypertension artérielle, des maladies cardio-vasculaires et de plus en plus de maladies rénales. C'est ce qui a d'ailleurs poussé la Société internationale de néphrologie à placer, cette année, la Journée mondiale du rein, célébrée en mars, sous le thème « Rein et obésité : une vie saine pour des reins sains ».

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), en 2014, plus de 600 millions de personnes âgées de plus de 18 ans affichaient une obésité. Ce fléau touche plus de 33 % des adultes aux États-Unis et entre 18 et 20 % des adultes en Europe. Les chiffres du Liban sont similaires à ceux de l'Europe selon une étude menée par le Dr Samir Mallat sur l'obésité au Liban et publiée en 2016 dans la revue scientifique World Journal of Cardiovascular Disease.

L'obésité est définie par un index de masse corporelle (IMC ou BMI) supérieur à 30 kg/m2. L'IMC est obtenu en divisant le poids de l'individu par sa taille en mètres carrés.
« L'obésité est une maladie chronique due à plusieurs facteurs génétiques, épigénétiques (c'est-à-dire l'impact de l'environnement sur les gènes et vice versa) et environnementaux », explique à L'Orient-Le Jour le Dr Charles Saab, président élu de la Société américaine des endocrinologues cliniciens – chapitre libanais.

 

(Pour mémoire : L’insuffisance rénale chez l’enfant, une pathologie encore méconnue)

 

 

L'obésité viscérale dangereuse
Toutes les formes d'obésité ne sont toutefois pas dangereuses. Le Dr Saab explique ainsi que la graisse sous-cutanée n'est pas inquiétante. « C'est la graisse viscérale, c'est-à-dire celle qui entoure le cœur, les reins, le foie et le pancréas, qui est maladive lorsqu'elle dépasse la normale, puisque la cellule graisseuse sécrète des facteurs qui peuvent déclencher des phénomènes hormonaux inattendus, avertit-il. Ce qui explique l'augmentation de la prévalence de maladies associées à l'obésité, comme le cancer du côlon ou du sein. L'obésité entraîne également des complications mécaniques comme la pression sur le genou ou la hanche, ainsi que des complications métaboliques, notamment le diabète de type 2 et l'hypertension artérielle, deux maladies qui peuvent entraîner des problèmes rénaux. »

Selon des études internationales, « 30 % des personnes diabétiques développent, après vingt à vingt-cinq ans d'évolution de la maladie, une néphropathie diabétique, c'est-à-dire une insuffisance rénale chronique due au diabète », avance le Dr Robert Najem, président de la Société libanaise de néphrologie et d'hypertension. « De plus, 25 à 30 % des personnes sous dialyse sont à l'origine diabétiques, poursuit-il. On sait aussi qu'une hypertension artérielle mal traitée et mal contrôlée va entraîner une insuffisance rénale, sachant que chez les patients obèses, l'hypertension artérielle est difficile à contrôler. De plus, l'obésité peut atteindre directement les reins du fait de la pression sanguine augmentée sur les glomérules (c'est-à-dire les cellules rénales situées dans la partie externe du rein et chargées de filtrer le sang). Lorsque les glomérules vont travailler au-delà de leur capacité pendant plusieurs années, ils deviennent fibreux et finissent par mourir. Or ces cellules, vitales pour la fonction rénale, ne se régénèrent pas. Le patient finit par souffrir d'une insuffisance rénale. »

 

(Lire aussi : L’insuffisance rénale, une maladie silencieuse qui touche 10 % de la population mondiale)

 

Un point de non-retour ?
Qu'est-ce qui doit alerter le patient ? « Malheureusement, le point d'alerte signifie qu'il est déjà trop tard, répond le Dr Saab. Quand on commence à sentir l'hypertension artérielle, cela veut dire que le rein est déjà affecté par l'obésité. » D'où l'importance de la prévention. Le Dr Saab souligne ainsi que les comportements alimentaires sont mieux compris sur le plan médical et que les spécialistes disposent de médicaments qui aident à lutter contre l'obésité.

Le Dr Najem insiste de son côté sur la nécessité d'adopter un mode alimentaire sain basé sur une alimentation pauvre en sucres rapides, en lipides et en sel, et sur une activité physique régulière. « Il est recommandé de faire au moins trente minutes de sport par jour, à raison de cinq fois par semaine, insiste-t-il. Il faut aussi boire beaucoup d'eau et éviter les aliments en conserve, qui sont riches en sel. Le tabac est aussi à bannir, d'autant qu'il abîme les vaisseaux. »

S'adressant aux personnes sportives qui prennent des suppléments protéiques, le Dr Najem appelle à la vigilance, notamment dans le cas d'une histoire familiale d'hypertension artérielle ou d'insuffisance rénale, ces produits pouvant être nocifs. « Il faut en outre éviter de prendre des médicaments sans prescription médicale, notamment des anti-inflammatoires, insiste encore le spécialiste. Enfin, les personnes qui ont une histoire familiale d'hypertension artérielle et d'insuffisance rénale doivent consulter régulièrement un médecin et faire, après 40 ans, un bilan annuel. »

Et de conclure : « Si l'insuffisance rénale est à ses débuts, il est possible de la faire régresser chez une personne obèse si elle suit un régime strict et perd au moins 10 % de son poids total, à condition qu'elle n'ait pas d'autres maladies susceptibles d'affecter le rein. En cas de diabète et d'hypertension artérielle, il est possible de ralentir la progression de la maladie rénale si elle est à ses débuts. Pour cela, il faut que le patient soit sérieux dans son traitement et son régime alimentaire. »

 

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