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Liban - Réfugiés

Palestiniens au Liban : vers la fin de la guerre des chiffres

Une conférence tenue au Grand Sérail a officiellement marqué le début d'un projet ambitieux : le recensement de la population palestinienne sur le territoire national.

Photo archives Mahmoud Zayyat/AFP

« Dès aujourd'hui (hier), une équipe de 600 chercheurs, libanais et palestiniens, ira récolter des informations. » Hassan Mneimné, président du Comité de dialogue libano-palestinien (connu sous son acronyme anglophone LPDC), donne le ton. L'ancien ministre de l'Éducation, ainsi que les autres intervenants, dont notamment le chef du gouvernement Saad Hariri, sont ici pour parler d'actions concrètes. Cette réunion, parrainée par le Premier ministre, met en effet la dernière touche au processus entamé dès novembre 2016, lorsque les officiels libanais et palestiniens avaient signé un mémoire d'entente pour la mise en œuvre d'une collecte de données statistiques sur les réfugiés palestiniens au Liban.

Les chiffres – a fortiori concernant les populations – ont souvent accompagné les luttes de pouvoir au pays du Cèdre. L'absence de données précises sur le nombre de Palestiniens et l'évolution de cette population depuis 1948 avaient renforcé la fantaisie. Toutefois les acteurs scientifiques et internationaux ainsi que la volonté politique du gouvernement visent à soutenir ce projet qui « permettra d'éviter les estimations imprécises », insiste Hassan Mneimné.

Ce travail sera le fruit d'une collaboration entre les experts du Bureau central des statistiques palestiniennes (BCSP) et ceux de l'Administration centrale des statistiques du Liban (ACS), qui ont pour importante tâche de parcourir dans les prochains mois les 12 camps palestiniens officiels et 121 regroupements informels, répartis dans les 6 mohafazats. Ces informations démographiques et géographiques permettront d'avoir « une idée précise des besoins et de la situation socio-économique des populations palestiniennes », précise Maral Tutelian, directrice de l'ACS.

Le but est également politique, mais non politisé : grâce aux données recueillies, l'État libanais souhaite agir sur le volet social pour trouver une issue au dossier palestinien. Les camps, un temps marginalisés, ont fini par devenir un problème sécuritaire aux yeux du gouvernement, a confié Hassan Mneimné à L'Orient-Le Jour. « Nous sommes en train de travailler pour mettre fin au terrorisme qui serait dû en partie à la perte des droits humains et civils », a-t-il poursuivi.

 

(Pour mémoire : La tentative d'assassinat d'un « diplomate » palestinien, un règlement de comptes interne ?)

 

 

Méthode scientifique
La question palestinienne était restée épineuse depuis la fin de la guerre du Liban. La statistique apparaît alors comme un outil de prédilection pour les Libanais. Les chiffres sont froids mais ils ont l'avantage de pouvoir accompagner une solution rationnelle au problème. Pour Ola Awad, présidente du BCSP, organisme chargé du projet côté palestinien, le mot d'ordre est « scientifique ». Sa confrère libanaise de l'ACS, Maral Tutelian, fait à cette fin l'éloge « du développement rapide des techniques de collectes des données » où « les techniques descriptives ont fait place aux techniques analytiques ». « L'information gagne en importance puisqu'elle permet de refléter des phénomènes sociaux loin de toute subjectivité », a-t-elle souligné.

Le projet connaîtra diverses phases qui se succéderont jusqu'à la fin de l'année 2017. Dans un premier temps, deux questionnaires qui porteront sur les populations et leur environnement doivent être élaborés par les experts, l'objectif étant quantitatif, pour recueillir le nombre de personnes vivant dans les camps ou ailleurs, ainsi que leur statut – tous ne sont pas réfugiés de jure. De même l'aspect qualitatif sera pris en compte, à travers une enquête sur les types de familles et leur composition, puis le type d'habitat, ses caractéristiques, les matériaux de construction, etc.

À l'issue du travail de terrain, les formulaires seront mis sur des tablettes plutôt que sous forme papier. « Concernant l'insertion des données, ce sera dans un programme élaboré par l'Administration centrale des statistiques », a annoncé Maral Tutelian qui a conclu : « J'espère que ce recensement constituera le premier pas d'un long chemin qui conduira à d'autres recensements pour avoir une idée précise des besoins et de la situation socio-économique des populations palestiniennes ». Un projet qui a trouvé un soutien du côté des organisations internationales (Unicef) ou des États qui se sont portés volontaires pour le financer (Japon, Suisse).

 

(Lire aussi : Le Liban, pays pivot d'une stabilité régionale nouvelle ?)

 

 

« Un fardeau pour le peuple libanais »
L'idéal scientifique d'être absolument objectif n'exclut pas l'utilisation des données pour la préparation et l'exécution de politiques sociales à l'égard des populations palestiniennes. La question devient d'ailleurs un enjeu de taille dans l'agenda gouvernemental. « D'un côté, à travers l'histoire, Libanais et Palestiniens ont payé cher le prix de la guerre civile, qui laisse encore des cicatrices. (...) D'un autre côté, apparaissent de nouvelles conditions humanitaires avec des urgences et des problèmes à régler », a rappelé Hassan Mneimné.

La marginalisation des réfugiés et leur paupérisation a eu ces dernières années un effet de retour du problème sécuritaire, notamment lié à la radicalisation de la guerre civile syrienne. Hassan Mneimné a tenu à souligner que « les camps ne doivent pas rester une poche sécuritaire en dehors de la souveraineté nationale ».

Le retour de l'État libanais comme acteur social est ainsi un corollaire du projet de recensement : les autorités compétentes y voient une source d'information exhaustive afin d'agir politiquement et de ne pas perdre leur légitimité dans des zones un temps délaissées. Le président du LPDC a notamment évoqué dans son discours « le problème d'infiltration des groupes extrémistes et terroristes au sein des camps », allusion entre autres au cas de Aïn el-Héloué, au sein duquel une opération menée l'été dernier a abouti à l'arrestation du jihadiste Imad Yassine.

Les troubles sécuritaires alliés aux conditions de vie difficiles des Palestiniens dans certains regroupements ont été confirmés par Saad Hariri qui soutient cette initiative de recensement « dans l'intérêt de la cause palestinienne, qui permettra au monde entier de voir la souffrance des Palestiniens, et combien les Libanais souffrent aussi ». Les orateurs ont tous insisté sur le « droit du retour ». Tous convenaient et insistaient que malgré l'intérêt scientifique du recensement, le Liban ne peut pas endosser, pour reprendre la formule rocardienne, « toute la misère du monde » : il ne s'agit pas de recenser une population en vue de l'intégrer politiquement à la communauté nationale. Il s'agit de modifier les conditions matérielles d'existence des réfugiés sur le sol libanais, mais dans une attitude assumée de pays d'accueil temporaire, ainsi que l'a précisé le président du Conseil dans son allocution improvisée, « parce que le Liban ne peut pas accueillir tout ce nombre de réfugiés palestiniens, avec maintenant 1,5 million de Syriens ». « Notre fardeau et notre responsabilité grandissent », a-t-il fait valoir.

 

 

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« Dès aujourd'hui (hier), une équipe de 600 chercheurs, libanais et palestiniens, ira récolter des informations. » Hassan Mneimné, président du Comité de dialogue libano-palestinien (connu sous son acronyme anglophone LPDC), donne le ton. L'ancien ministre de l'Éducation, ainsi que les autres intervenants, dont notamment le chef du gouvernement Saad Hariri, sont ici pour parler...

commentaires (7)

Car n'oublions pas, n'est-ce pas, les précédentes "réactions imprévisibles" : D é g u e u l a s s e s.... contre Sabra et Chatilla ; chez NOUS ici si, si !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

20 h 48, le 04 février 2017

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Commentaires (7)

  • Car n'oublions pas, n'est-ce pas, les précédentes "réactions imprévisibles" : D é g u e u l a s s e s.... contre Sabra et Chatilla ; chez NOUS ici si, si !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    20 h 48, le 04 février 2017

  • Espérons seulement, n'châllâh, que "l'inventaire!" de cet ex-ministré M'nâïymnéééh ; si jamais il était établi et surtout "publié!" ; du nombre exact de ces, yîîîh, Palestiniens mais réfugiés malgré eux en ce Grand-Liban si "humaniste" mahééék ; étant donné l'usurpation éhontée de leurs terres par les Juifs sionistes ; ne risquera pas de donner lieu à beaucoup de réactions imprévisibles telles, e.g., encore plus de Xénophobie et de Racisme envers eux ! Yâ äâdrâh, espérons que non !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    18 h 21, le 04 février 2017

  • Je ne me suis pas attarde a lire tout le contemu de l'article. Il m'a suffit d'apprendre que l' intention existe d'inventorier, avec autant de precision que possible, le nombre exacte de refugies Palestiniens au Liban. Je souhaite au dr. Hassan Mneimneh, ancien ministre de l'Education, tout le succes dans cette entreprise.J'espere que le compte sera precis et que le resultat ne sera pas loin de mon estimation personnelle.Compte tenu de l'augmentation de cette population depuis 1948, si ce chiffre etait publie, ceci risque de donner lieu a beaucoup de reactions imprevisibles. D'un autre cote, ma longue carriere de comptable de direction me porte a applaudir une telle initiative pour un grand nombre de raisons, la bonne gouvernance n'en etant pas une des moindres.Bonne chance dr. Mneimneh

    George Sabat

    16 h 08, le 04 février 2017

  • Charles Hélou et le général Boustani connaissaient le nombre des Palestiniens, c'est pourquoi ils avaient signé l'Accord du Caire en 1969 en leur faveur... au détriment des intérêts du Liban.

    Un Libanais

    12 h 59, le 04 février 2017

  • "Le but est également politique, mais non politisé." ! Wâllâââh ?! Bâllâââh !? Hâssine M'nâïymnéééh : "Les camps, un temps marginalisés (seulement un temps? Et de comBien de temmmps ? SOIXANTE-DIX ans?.... yâââï, seuleMent!). Nous sommes en train de travailler pour mettre fin au terrorisme(!) qui serait dû, en partie, à la perte des droits civils et humains." ! Ainsi, selon cet ex-ministré, ces Cammmps qui ont perdu, tout bonnement bon an mal an mahééék, tous droits humains et civils sont un NID(!) du terrorisme ! Quid de Bîîr-Hâssîne et de Ddâhhïyéééh, ex-ministré l'haSSine M'nâïymnéééh ? Pauvres Palestiniens ! Yâ wâïyléééh !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    12 h 01, le 04 février 2017

  • "Ce travail sera le fruit d'une collaboration entre les experts du Bureau central des statistiques palestiniennes (BCSP) et ceux de l'Administration centrale des statistiques du Liban (ACS), qui ont pour tâche de parcourir les 12 camps palestiniens officiels et 121 regroupements informels, répartis dans les 6 mohafazats." ! Et pourquoi délibérément ignorer les VRAIS Experts, eux, de l'UNRWA ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 43, le 04 février 2017

  • Très bonne initiative pour présenter la facture de ce que le Liban subit depuis 48 à cet état criminel et terroriste qu'est israel.

    FRIK-A-FRAK

    09 h 31, le 04 février 2017

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