Le nouveau leader des talibans, le mollah Habatullah Akhundzada, appelle les "envahisseurs américains" à quitter l'Afghanistan dans son premier message depuis sa nomination fin mai, sans toutefois annoncer d'offensives majeures contre eux ou leurs alliés afghans.
Le ton inhabituellement peu belliqueux de cette adresse, diffusée à l'occasion de l'Aïd-El-Fitr qui marque la fin du ramadan, correspond au profil de ce dignitaire religieux resté à l'écart des champs de bataille, même s'il est contredit par la multiplication des opérations sur le terrain dont le dernier attentat, jeudi à Kaboul, contre des cadets de la police (32 morts et 79 blessés).
"Admettez la réalité plutôt que de faire un usage inutile de votre force et de montrer vos muscles et mettez fin à l'occupation", lance le mollah Akhundzada, qui a succédé le 25 mai au mollah Mansour, dans un "message aux envahisseurs américains et à leurs alliés" reçu samedi par l'AFP. "Les musulmans afghans ne craignent ni votre force ni vos stratagèmes. Ils considèrent le martyre face à vous comme le but chéri de leur vie", poursuit-il.
Vous n'allez pas gagner" prévient le chef de l'insurrection, qui cite les précédents britanniques et soviétiques, deux grandes armées dont les tentatives d'occupation de l'Afghanistan, au 19e siècle pour les premiers, de 1979 à 1980 pour les seconds, se sont soldées par un échec sanglant. "Les Afghans n'acceptent pas des systèmes mis en places par les envahisseurs" insiste encore cet érudit qui a passé de longues années d'études dans les madrassas (écoles coraniques).
Mais s'il invite les Américains et leurs alliés à considérer une "politique raisonnable en vue d'une solution, plutôt que le recours à la force", le responsable ne fait aucune mention des pourparlers de paix, à l'arrêt depuis un an.
Les premières discussions directes entre le gouvernement de Kaboul et les talibans avaient eu lieu en juillet 2015, mais la deuxième session a été reportée sine die après l'annonce de la mort du fondateur du mouvement taliban, le mollah Omar.
(Pour mémoire : « Certains disent que les talibans sont des cannibales. Je suis taliban, mais pas cannibale »)
Appel aux "pays voisins"
"Je ne vois rien de différent dans ce message, il n'y a rien sur les pourparlers de paix ni sur la guerre" indique à l'AFP l'écrivain et analyste Ahmad Saeedi. "Pour moi, sa politique est la même".
Dignitaire peu connu mais influent au sein des talibans dont il dirigeait le système judiciaire, le mollah Habatullah Akhundzada, âgé d'environ 50 ans, a été nommé quatre jours seulement après la mort de son prédécesseur le mollah Mansour, dont il était l'adjoint, tué par une frappe d'un drone américain en territoire pakistanais, à la frontière afghane.
Le nouveau leader semble faire référence à cet épisode en "rappelant aux pays voisins et de la région que l'occupation de l'Afghanistan affecte nos intérêts communs". Il les convie à réclamer eux aussi "la fin de l'occupation et, au moins, à ne rien faire qui puisse contribuer à prolonger la présence des Américains" en Afghanistan.
Les leaders talibans ont coutume d'adresser un message public deux fois par an, pour chacune des grandes fêtes musulmanes: l'Aïd-el-Fitr, attendu en tout début de semaine prochaine en Afghanistan et l'Aïd-El-Kebir, qui sera célébré cette année autour de la mi-septembre.
Les talibans, qui avaient annoncé mi-avril leur "offensive de printemps", ont multiplié les opérations dans diverses régions du pays depuis, mettant les forces gouvernementales à rude épreuve. Celles-ci ont toutefois repoussé une offensive importante en avril contre la grande ville de Kunduz au nord, avec le soutien - aérien notamment - de leurs alliés occidentaux.
L'Otan, par son opération Resolute Support, maintient quelque 12.000 hommes dans le pays depuis le retrait fin 2014 de la majorité des troupes de la force internationale (Isaf), dont 9.800 soldats américains.
Un sommet de l'Organisation du Traité Atlantiques la semaine prochaine à Varsovie doit permettre aux nations partenaires de "renouveler leur engagement de soutien financier aux forces afghanes jusqu'à la fin 2020", a rappelé samedi devant la presse le Haut Représentant civil de l'Otan en Afghanistan, Ismaïl Aramaz.
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