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Liban - Conflit arabo-iranien

Double camouflet arabe au Hezbollah, pointé du doigt comme « terroriste »

Nouhad Machnouk, hier, à la conférence de Tunis. Photo Ani

La crise entre le Liban – et plus particulièrement le Hezbollah – et les pays du Golfe n'est pas près de prendre fin. C'est au contraire vers une escalade progressive qu'évolue la situation. Hier, c'est un double camouflet qu'a encore reçu le parti chiite, puisque le Conseil de coopération des pays du Golfe a décidé de le classer comme organisation terroriste, avant que la 33e réunion de la Conférence des ministres arabes de l'Intérieur à Tunis n'adopte à son tour cette terminologie dans son communiqué final, en dépit de la désapprobation explicite du ministre de l'Intérieur, Nouhad Machnouk.

« Les États du CCG ont décidé de classer organisation terroriste la milice du Hezbollah, y compris tous ses dirigeants, factions et associations », a ainsi annoncé dans la journée Abdellatif Zayani, secrétaire général du groupement régional formé de l'Arabie saoudite, du Qatar, de Bahreïn, du Koweït, des Émirats arabes unis et d'Oman. M. Zayani a justifié dans un communiqué cette mesure par « la poursuite des actions hostiles de cette milice qui recrute les jeunes (du Golfe) pour perpétrer des actes terroristes », accusant le Hezbollah de « trafic d'armes et d'explosifs, de sédition et d'incitation au chaos et à la violence, ce qui constitue une flagrante violation de la souveraineté, de la sécurité et de la stabilité » des monarchies arabes.
« Les États du CCG considèrent que les exactions des milices du Hezbollah dans les pays membres du Conseil, ainsi que les actes terroristes et d'incitation auxquels elles se livrent en Syrie, au Yémen et en Irak, vont à l'encontre de toutes les valeurs, de tous les principes moraux et humains, ainsi que des résolutions internationales. Cela constitue une menace à la sécurité nationale arabe », poursuit le communiqué.
« Compte tenu de la poursuite par ces milices de leurs pratiques terroristes, les pays du CCG ont décidé de les classer comme organisation terroriste. Le Conseil prendra les mesures nécessaires pour mettre en application leur décision dans ce domaine, conformément aux lois relatives à la lutte contre le terrorisme qui sont appliquées au sein des pays membres, ainsi qu'aux lois internationales similaires », ajoute-t-il.


(Lire aussi : Berry : La question de l'arabité du Liban est tranchée par le préambule de la Constitution)

 

La réunion de Tunis
En soirée, la position des monarchies du CCG a reçu le soutien des ministres arabes de l'Intérieur, réunis à Tunis. Ceux-ci ont dans un communiqué condamné « les pratiques et les actes dangereux du Hezbollah terroriste pour déstabiliser la sécurité dans certains pays arabes ». Ils s'en sont par ailleurs pris aux « pratiques iraniennes visant à déstabiliser la sécurité à Bahreïn et dans de nombreux pays arabes, ainsi qu'à saboter la coexistence pacifique entre les composantes de la société arabe, en mobilisant au plan sectaire et en excitant les sentiments confessionnels », soutenant les sanctions des pays arabes contre Téhéran.
Présent à Tunis, Nouhad Machnouk s'est opposé à ce que le Hezbollah soit qualifié de « terroriste » dans le communiqué final de la réunion, au terme d'une discussion calme avec le président de séance, son homologue bahreïni, Rached ben Abdallah al-Khalifa. Si bien que le ministre saoudien de l'Intérieur, le prince héritier Mohammad ben Nayef, a demandé que la position de M. Machnouk figure dans le communiqué final. Au final, le Liban s'est « distancié » de cette résolution précise.


(Lire aussi : Le Liban s'invite aux entretiens du prince héritier d'Arabie, demain, à Paris)

Machnouk
Dans son allocution à Tunis devant ses homologues, le ministre libanais de l'Intérieur a toutefois défendu l'offensive de l'Arabie saoudite, qui « a permis de rétablir l'équilibre (...) avec le projet de l'Iran ».
Mettant l'accent sur « l'identité arabe du Liban, sa seule option », il a estimé que « celui qui a tué Rafic Hariri a tenté d'assassiner l'arabité du Liban, mais ce dernier continue de lui faire face ». Il a cependant estimé qu'il était « injuste de mettre en doute l'arabité du Liban, et d'englober tous les Libanais dans cette accusation, comme si le Liban était définitivement dans une position d'hostilité vis-à-vis des Arabes, ce qui justifierait le fait de l'abandonner sans faire la différence entre une majorité arabe et une minorité qui a pris le parti de mettre en application un projet néfaste pour elle et le Liban ».
« J'avoue que mon gouvernement n'a pas pris les bonnes positions lors du sommet des chefs de la diplomatie arabes et de celui de l'OCI. Mais on ne saurait sanctionner le Liban en figeant l'instant présent et en le coupant d'une continuité d'événements qui remontent à 1980, avec l'apparition du projet iranien, ou encore à 2005, avec les assassinats de Rafic Hariri, Wissam el-Hassan et Mohammad Chatah », a noté Nouhad Machnouk. « Le Liban est fier de dire qu'il n'a jamais failli à son devoir, même s'il saigne à blanc du fait de l'hégémonie des armes (...) », a-t-il ajouté. « Nous ne serons pas une épine dans le dos des Arabes », a conclu M. Machnouk.

En soirée, le ministre de l'Intérieur a fait paraître un communiqué dans lequel il a précisé qu'il avait condamné, dans son allocution, l'ingérence militaire du Hezbollah dans les pays arabes, et qu'il avait approuvé le communiqué final, protestant uniquement contre le qualificatif de « terroriste » accolé au Hezbollah « afin de préserver les institutions constitutionnelles qui restent au pays ». M. Machnouk a indiqué qu'il avait agi après les réserves émises par son homologue irakien sur certaines résolutions du communiqué final. « Partant, il n'y avait pas d'unanimité arabe », a-t-il noté.

L'attitude de M. Machnouk a cependant essuyé des critiques de la part du ministre démissionnaire de la Justice, Achraf Rifi. « Je ne comprends pas pourquoi il s'est démarqué de l'unanimité arabe (...). Nous savons que le CCG a raison, et nous en avons des preuves concrètes », a-t-il indiqué dans un entretien à al-Jazeera, concernant les accusations de « terrorisme » contre le Hezbollah et l'Iran. M. Rifi a invité le gouvernement Salam à démissionner, dans la mesure où « il assure désormais une couverture aux actes du Hezbollah », précisant que lui ne reviendrait pas sur sa démission. Il a également appelé à ce que « la colère libanaise gronde » pour accompagner « la colère arabe ».

Hariri
Réagissant à la décision du CCG, le chef du courant du Futur, le député et ancien Premier ministre Saad Hariri, a affirmé qu'elle était motivée par les agissements du parti chiite dans le monde arabe. « Plutôt que d'être avec l'unanimité arabe, le parti cherche à la briser, dans un geste qui va à l'encontre de l'intérêt du Liban. Puis nous entendons des discours enflammés qui justifient ces agissements (...). Pourquoi certains jeunes Libanais interfèrent-ils dans ces pays ? Nous sommes contre les interventions du Hezbollah dans n'importe quel État, parce qu'il n'est pas plus grand que son pays. Ces questions nécessitent une réponse claire du Hezbollah », a indiqué M. Hariri.

La décision du CCG a en outre soulevé une série de réactions hostiles de la part des alliés du Hezbollah à Beyrouth.

 

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La crise entre le Liban – et plus particulièrement le Hezbollah – et les pays du Golfe n'est pas près de prendre fin. C'est au contraire vers une escalade progressive qu'évolue la situation. Hier, c'est un double camouflet qu'a encore reçu le parti chiite, puisque le Conseil de coopération des pays du Golfe a décidé de le classer comme organisation terroriste, avant que la 33e réunion...

commentaires (4)

PERSONNE À L'ETRANGER N'A INTERET QUE CETTE GUERRE DE RELIGIONS IRANO/SAOUDITE S'ARRÊTE. MAIS C'EST LE PAUVRE LIBAN QUI PAYS LE PRIX.

Gebran Eid

15 h 06, le 03 mars 2016

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Commentaires (4)

  • PERSONNE À L'ETRANGER N'A INTERET QUE CETTE GUERRE DE RELIGIONS IRANO/SAOUDITE S'ARRÊTE. MAIS C'EST LE PAUVRE LIBAN QUI PAYS LE PRIX.

    Gebran Eid

    15 h 06, le 03 mars 2016

  • Cette décision fait partie de ce qui se prépare pour isoler et continuer a affaiblir cette organisation terroriste et aider a rétablir les institutions de l’état au Liban. Il est temps que les Libanais qui refusent que le projet Iranien du Waliy el Fakih s'applique au Liban réagissent surtout que ceux-ci représentent la majorité du peuple. C'est eux qui se doivent de decider de l'avenir du pays et non une organisation milicienne et mafieuse qui ne les respecte pas.

    Pierre Hadjigeorgiou

    12 h 02, le 03 mars 2016

  • DAME LA -MARQUISE- SE SCANDALISE... CRIE A LA ROUBLARDISE ET A LA MAINMISE... MAIS INDECISE... DANS SA MEPRISE... ELLE SE BRISE... PUIS ELLE COURTISE ET PACTISE... Y A-T-IL DE PLUS GRANDE BETISE ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 27, le 03 mars 2016

  • Pourquoi le Liban officiel se croit-il toujours obligé de défendre le Hezbollah. Il devrait, au contraire, saisir toutes les occasions qui lui sont offertes de secouer le joug de l'occupation.

    Yves Prevost

    07 h 47, le 03 mars 2016

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