Il ne manquait plus au Liban, comme retombées de la guerre syrienne, que de voir Moscou réclamer une déviation du trafic aérien libanais en direction des aéroports occidentaux, trois jours durant, en raison de manœuvres militaires en Méditerranée. La zone des manœuvres russes se trouverait en effet dans le couloir des avions qui partent du Liban vers l'Occident.
Au lieu d'en notifier le palais Bustros ou de lui adresser une demande en bonne et due forme dans ce sens, le commandement de la marine russe en Méditerranée s'est contenté d'adresser un télégramme à l'aviation civile de l'AIB réclamant un détournement des vols de leur voie habituelle vers un autre couloir aérien. Le télégramme est arrivé à 14h à l'aviation civile, laquelle a aussitôt informé le ministre des Travaux publics et des Transports, Ghazi Zeaïter. Ce dernier a transmis l'information au Premier ministre Tammam Salam, au président de la Chambre, Nabih Berry, et au chef de la diplomatie, Gebran Bassil. M. Zeaïter a tenté d'expliquer à la marine russe combien ce changement de couloir serait néfaste pour le trafic aérien libanais, précisant que l'alternative était trop proche d'Israël et que l'armée de l'air israélienne pourrait donc gêner les vols en partance de Beyrouth. Du reste, la demande russe contrevient aux usages internationaux en vigueur et à la Convention de Vienne.
Ghazi Zeaïter a mené d'âpres concertations avec les Russes pour leur demander de réviser leur décision et de s'éloigner de la zone aérienne empruntée par les avions libanais, expliquant que le Liban ne pouvait accepter cette demande coûteuse. Mais Moscou, qui n'a pas informé l'Organisation de l'aviation civile internationale de sa décision, a campé sur ses positions. Ce n'est qu'avec le tweet du chef du Rassemblement démocratique, le député Walid Joumblatt, critique à l'égard de la démarche cavalière russe, que l'affaire, autrement tenue secrète, s'est ébruitée.
Des sources ministérielles ont sévèrement critiqué cette attitude impérialiste de Moscou, qui a pratiquement fait fi de la souveraineté du Liban sans même donner plus de précisions sur ce qu'il compte entreprendre durant ses trois jours de « manœuvres ». D'autant que Gebran Bassil rentre tout fraîchement d'une visite dans la capitale russe et affirme qu'il n'était pas au courant de cette décision. Outre la grande gêne diplomatique qu'elle occasionne aux deux pays, l'initiative russe n'est pas sans créer un grand chambardement dans le trafic aérien libanais, surtout que les « manœuvres » interviennent durant le week-end férié de l'Indépendance. Beaucoup de Libanais s'interrogent sur le fait de savoir s'ils devraient retourner au pays ou s'abstenir. Du reste, les craintes de dommages collatéraux ne sont pas à écarter si la marine russe devait choisir d'expérimenter des missiles particulièrement destructeurs.
Jusque tard dans la nuit, les pourparlers se poursuivaient avec les Russes pour les inciter à décaler leur zone de manœuvres, sans succès. Un couloir aérien serait donc aménagé de manière provisoire pour empêcher les avions en partance du Liban de se retrouver dans la zone des manœuvres russes.
Au lieu d'en notifier le...
commentaires (5)
Si Gebran Bassil n'était pas au courant de ce genre de décision, il est donc franchement à côté de la plaque et incompétent en tant que ministre des affaires étrangères et en tant que membre du gouvernement!
Carine Husni
16 h 55, le 21 novembre 2015