Avec un pays aussi petit, on pourrait penser que les Libanais ont déjà visité la totalité de ses régions et découvert son riche patrimoine. Une initiative lancée par Tyr, au Liban-Sud, tend à montrer que tel n'est pas le cas.
Cette ville inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco a en effet décidé de s'inviter aux quatre coins du pays du Cèdre afin d'aller à la rencontre des habitants et leur faire découvrir ses richesses. C'est grâce à « la roulotte du patrimoine », réalisée dans le cadre du projet Archeomedsites, relevant du ministère libanais de la Culture et financé par l'Union européenne, que Tyr fera le tour du Liban.
« Beaucoup de Libanais n'ont jamais visité Tyr malgré son rayonnement mondial. Ils disent que c'est loin, que la région n'est pas sûre, du fait de sa proximité avec la frontière israélienne », indique Maya Hmeidan, coordinatrice d'Archeomedsites, ajoutant que cette faible fréquentation de la ville est « malheureusement documentée par des statistiques ».
« Un concept 100 % libanais »
« La roulotte du patrimoine » vise d'abord le tourisme local. Sur un flanc de la roulotte, des images de la ville seront affichées. Des répliques 3D de ses trésors archéologiques, exposés dans son musée et celui de Beyrouth, seront visibles à travers une paroi transparente de l'autre côté de la roulotte. Quand la roulotte est à l'arrêt, une autre paroi pourra s'ouvrir sur laquelle seront affichées des informations utiles sur la ville et son histoire. Les visiteurs pourront aussi entrer dans la roulotte afin d'observer de près les objets exposés. Autour de la roulotte seront, en outre, organisées des activités, tels des ateliers de poterie, de verre soufflé, de teinture (avec la légendaire pourpre) afin de présenter les métiers et artisanats qui ont fait la renommée de Tyr.
« Nous voulons raconter aux Libanais l'histoire derrière les objets historiques qu'ils pourront voir. Leur expliquer pourquoi des hiéroglyphes de l'Égypte antique se retrouvent à Tyr, par exemple », explique Maya Hmeidan. C'est "un musée mobile" en bonne et due forme, s'enthousiasme la coordinatrice du projet. Si vous ne pouvez pas venir à Tyr, Tyr viendra à vous. »
Le concept est 100 % libanais. Il est financé par l'UE à hauteur de 351 000 euros, dans le cadre d'un programme doté de 2 millions d'euros et regroupant, aux côtés du Liban, l'Italie et la Tunisie. La roulotte, dont l'idée a germé en 2014, et qui est le fruit du travail de l'équipe d'Archeomedsites au sein du ministère de la Culture, a été dessinée et réalisée par le designer Johnny Fenianos.
Un périple en plusieurs étapes
Le coup de départ de la roulotte sera lancé le 16 septembre à 18h30, au Musée national de Beyrouth. Le lancement était prévu plus tôt, mais il a été retardé en raison des manifestations de la société civile qui ont récemment eu lieu dans la capitale. Première étape du périple, le village de Mtein dans le Mont-Liban, le 19 septembre. Les autres dates ne sont pas encore fixées, mais la roulotte passera par Zghorta au Liban-Nord, Jezzine au Sud, Zahlé dans la Békaa, pour revenir « à la maison », à Tyr, vers la fin de décembre. Car, comme le souligne Maya Hmeidan, « nombreux sont les habitants de Tyr qui ne connaissent pas l'étendue du patrimoine de leur propre ville ».
La mise en œuvre de ce projet n'a pas été aisée. « Il n'a pas été facile de convaincre nos investisseurs étrangers au départ, lorsque nous avons présenté notre projet en Italie, se rappelle Maya Hmeidan. Mais une fois qu'ils ont saisi la pertinence de la démarche, la situation s'est vite améliorée. » Au niveau financier, c'est surtout la chute du taux de change de l'euro qui a rendu la tâche difficile à l'équipe. Si la valeur de leurs fonds a nettement baissé, elle est toutefois restée suffisante pour l'exécution du projet.
Depuis le lancement de la campagne publicitaire il y a quelques jours, la coordinatrice du projet affirme avoir eu des échos positifs, notamment sur les réseaux sociaux. Et même si « la roulotte du patrimoine », en tant que projet financé par l'UE, prend fin en décembre 2015, ses créateurs veulent la garder en vie. « Nous recherchons des sponsors privés, ou des municipalités qui souhaitent promouvoir leur région en finançant le projet, indique Maya Hmeidan. Qui sait, peut-être que l'UE accepterait de renouveler son soutien. »
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06 h 10, le 14 septembre 2015