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Économie - Tendance

Malgré la crise, le tourisme alternatif se développe au Liban

Alors que les touristes du Golfe boudent le Liban, les professionnels du secteur et le ministère du Tourisme parient sur de nouvelles formes de tourisme – tourisme rural, écotourisme ou tourisme de la diaspora – pour s'adapter au changement de la demande.

« 65 % de nos clients sont libanais », explique le couple propriétaire de la maison d’hôtes Bouyouti dans le Chouf. Photo: D.R

« Cet été, les touristes arabes ne sont pas au rendez-vous », déplore le ministre du Tourisme, Michel Pharaon, dans une interview à L'Orient-Le Jour. « Bien que le nombre de touristes d'Arabie saoudite ait doublé cet été, ces chiffres étaient tellement bas depuis 2012 que l'on ne peut pas attester d'une reprise », souligne M. Pharaon. Dans l'attente de chiffres officiels sur l'ensemble de la période estivale, le premier semestre confirme cette tendance. Si les 671 398 touristes – dont 217 386 ressortissants arabes – enregistrés traduisent une hausse de 14,7 % en rythme annuel, cette fréquentation reste inférieure de 28,5 % – et de 43,5 % pour les touristes arabes – à celle connue à la même période lors de l'année prospère de 2010. « Nous n'avons relativement pas de touristes étrangers venant au Liban. La seule solution pour un retour des touristes serait l'amélioration de la situation sécuritaire de la région », confirme Liliane Nakhal de l'agence de voyages Nakhal.
« Nous avons pu assurer une activité touristique assez remarquable compte tenu des circonstances cet été, mais le potentiel du Liban pourrait être bien plus important si la conjoncture nous le permettait, relève M. Pharaon. Alors que le Liban n'a pas connu de problème sécuritaire majeur, nous avons été touchés de plein fouet par la crise des déchets, qui a entravé la bonne promotion du Liban à l'étranger. Dans les médias, pour une minute de promotion du Liban, environ 3 minutes étaient consacrées à la crise des déchets », se désole le ministre.

Changement de la demande
Par conséquent, les professionnels du tourisme rivalisent d'ingéniosité pour proposer des formules à même de séduire une autre clientèle, qu'elle soit locale ou étrangère : « Beyrouth est devenue invivable et les touristes ne sont plus attirés par les hôtels luxueux de la ville, ils recherchent la nature, et nous nous sommes par ailleurs rendu compte que la demande libanaise est également très marquée. Près de 65 % de nos clients sont libanais contre 35 % d'étrangers, principalement des Européens », explique le couple propriétaire de la maison d'hôtes Bouyouti dans le Chouf, Rafic et Roula Bazerji, qui affiche complet jusqu'en septembre.
Parmi ces voies alternatives, le tourisme rural connaît un franc succès. Son développement est d'ailleurs devenu le cheval de bataille du ministère, qui a présenté les grandes lignes de sa stratégie quinquennale en septembre dernier, dont l'objectif est d'augmenter le chiffre d'affaires de ce segment de 5 % à 20 %. Quitte à redessiner la cartographie traditionnelle du tourisme dans le pays. « Cet été, il y a surtout eu une activité importante au niveau de certaines régions, comme Ehden ou Jezzine, qui ont connu un dynamisme remarquable, alors que d'autres villages, comme Aley et Bhamdoun, dont l'activité estivale est traditionnellement liée aux touristes des pays du Golfe, ont connu un ralentissement », explique M. Pharaon.
Le ministre ne cite pas Jezzine par hasard : ce village du Liban-Sud, comme ses alentours, s'est considérablement développé depuis quelques années. « Il y a 10 ans, il n'y avait que deux hôtels, aujourd'hui il y a 16 hôtels et maisons d'hôtes, surtout axés sur la promotion des richesses de la région, que ce soit la nature ou l'artisanat local », a souligné la propriétaire de l'hôtel L'Étoile du Loup à Jezzine, Nejmeh Keyrouz.
« Le tourisme rural est très prometteur et cible surtout les jeunes étrangers, même si de plus en plus de Libanais sont attirés par ce tourisme alternatif, qui est devenu un phénomène mondial. Pour l'instant, nous n'avons pas attiré autant d'étrangers que nous l'avions prévu, mais si la promotion de ce type de tourisme continue dans ce sens, je suis certain que la demande augmentera à moyen terme », explique Jean Abboud, président de l'Association des agents de voyages et de tourisme au Liban.


(Lire aussi : Les plages privées ne connaissent (presque) pas la crise)

 

Écotourisme
« Le développement du tourisme rural encourage également les associations à se regrouper au niveau local pour défendre leur environnement et repenser le développement de leur village, déclare le ministre du Tourisme. Mais il y a aussi la nécessité de trouver des microfinancements pour assurer, avec le ministère de la Culture, la réparation et l'entretien de petits sites menacés dans les régions », souligne M. Pharaon.
Parmi les associations qui ont misé sur ce créneau, l'organisation non gouvernementale arcenciel a mis en place plusieurs projets d'écotourisme comme l'ecolodge de Taanayel ainsi que L'Auberge St-Michel et Beit el-Hana de Maasser el-Chouf. « Nous ciblons notre offre sur une clientèle libanaise, qui représente 95 % de notre demande, avec une hausse de la fréquentation du fait de l'engouement des classes moyennes ou aisées pour le tourisme rural et l'écotourisme, depuis que l'offre de ce secteur s'est largement développée », explique Gautier Farthouat, ancien responsable du programme écotourisme d'arcenciel.
Mais le ministère du Tourisme travaille en parallèle sur le tourisme de la diaspora, avec le projet Ana qui cherche à attirer les jeunes des immigrés libanais à renouer avec leurs racines. À cette fin, des packages seront mis en place, dès la mise en ligne de la plateforme Ana, pour redécouvrir leur village et le Liban.
« Cela fait 30 ans que j'organise des voyages de la diaspora libanaise au Liban, mais, depuis cinq ans, de plus en plus de jeunes sont intéressés, surtout les jeunes d'Amérique latine. Alors qu'en 2011, nous avions des groupes de 30 personnes, cet été nous avons organisé un voyage pour 80 personnes », explique Naji Farah, président fondateur de l'association Rassemblement de la jeunesse libanaise (RJLiban) qui participera au projet Ana du ministère.

 

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