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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

La signification du passage de la théorie de la séduction à la théorie du fantasme

Comme nous l'avons vu la dernière fois, Freud crut longtemps en sa théorie de la séduction. Le fait que ses patientes hystériques tenaient le même langage à ce propos amena Freud à croire en la véracité de leurs propos, d'autant qu'il s'agissait toujours de la chose sexuelle. Qu'il s'agisse toujours de cause sexuelle était suffisant pour amener Freud à considérer avoir inventé une théorie majeure, qu'il est le seul à l'avoir découverte et qu'en conséquence sa notoriété serait basée là dessus.

Il écrit à Fliess le 21 septembre 1997 : « Je ne crois plus à ma neurotica. Les déceptions continuelles dans les tentatives pour mener une analyse à son véritable terme, la fuite des personnes qui pendant un certain temps avaient été les mieux accrochées, l'absence des succès complets sur lesquels j'avais compté. » Ces raisons constituent le 1er groupe des raisons qui ont donc amené Freud à renoncer à la théorie de la séduction. Impossibilité de mener à son terme l'analyse entreprise, et ce dans beaucoup de cas, beaucoup de patients qui arrêtaient leurs cures et le peu de succès dans d'autres cas, voici un groupe de raisons qui ont amené Freud à remettre en question la théorie de la séduction.

Ensuite, Freud fut confronté au fait de devoir incriminer tous les pères d'être des abuseurs et des pervers, y compris le sien. Il finit par aboutir à une conclusion logique : « une telle extension de la perversion vis-à-vis des enfants est quand même peu vraisemblable. » Le fait de devoir penser que son père ait pu être un père abuseur, de même qu'il le serait lui-même vis-à-vis de ses filles fut une raison supplémentaire de remettre en question la théorie de la séduction. Ce fut un autre groupe de raisons.

Par ailleurs, « dans la psychose la plus profonde, le souvenir inconscient ne perce pas, de sorte que le secret des expériences vécues dans la jeunesse ne se trahit pas, même dans le délire le plus confus ». Comment donc comprendre ? Si dans la psychose, où la censure est à son plus bas niveau, le souvenir inconscient ne vient pas à la conscience, cela voudrait dire qu'il y a des zones dans la mémoire qui restent inaccessibles. Comment alors accéder aux souvenirs d'abus sexuels dont parlent les hystériques?

« Il n'y a pas de signe de réalité dans l'inconscient, écrit Freud à Fliess, de sorte que l'on ne peut pas différencier la vérité de la fiction investie d'affect. » Autrement dit, fort de son expérience dans les manifestations, les formations de l'inconscient, comme le rêve surtout, Freud savait qu'on ne peut pas distinguer réel et fiction. Dans les rêves, aucune indice de réalité.

Et pourtant, dans les récits des patientes hystériques concernant les abus qu'elles avaient subis, aucun mensonge. Les patientes disaient la vérité, sans que cette vérité ne soit démentie par un indice quelconque de réalité dans la mémoire. Or, jusqu'à aujourd'hui, on continue de traiter les hystériques de menteuses, de simulatrices, de comédiennes. Et déjà, dès le début de sa pratique, Freud les croyait. La difficulté du problème tenait précisément à cela : comment les croire alors qu'aucun indice de réalité, de trace psychique ne pouvait confirmer leur récit ? En même temps, ces hystériques ne mentaient pas.

Face à ces difficultés, et pour la première fois, toujours dans cette même lettre à Fliess, Freud avance l'idée d'une solution : « Dès lors, la solution qui restait, c'est que la fantaisie sexuelle s'empare régulièrement du thème des parents. »
Un pas immense venait d'être fait par Freud.
Le père n'était pas un abuseur, un violeur. Cependant, il était plus facile à l'hystérique de soutenir que le père l'était pour faire passer son désir à l'arrière-plan. Il était plus facile pour la patiente de soutenir cela, pour ne pas avoir à affronter son propre désir pour le père. Comme on l'a vu la dernière fois, il est plus facile pour tout enfant d'affirmer que son père l'a séduit, et de s'être laissé faire, de s'être soumis à ce désir du père, plutôt que d'avouer qu'il a lui-même désiré son père.

Se conformer au désir de l'Autre ou se rebeller contre ce même désir permet à l'être humain d'échapper à son propre désir, de ne pas l'assumer. La psychanalyse et seule la psychanalyse permet à l'être humain de dire « Je », de ne plus se contenter de se conformer ou de se rebeller contre le désir de l'Autre.

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